DROIT DES SOCIETES EN DIFFICULTES


DROIT COMMERCIAL
DROIT DES ENTREPRISES EN DIFFICULTES
Bibliographie :
Précis Dalloz, Le Cannu
Oral : sans préparation, sans Code.

INTRODUCTION





Il y a actuellement 50 000 procédures collectives en France.
Qu'appelle-t-on procédures collectives ?
- La sauvegarde,
- Le redressement,
- La liquidation judiciaire.
Ces procédures collectives en arrivent tôt ou tard à une liquidation judiciaire. Or, la liquidation judiciaire porte bien son nom car on liquide les actifs de l'entreprise et avec l'argent qu'on en tire on tente de payer les créanciers. Généralement, on n'y arrive pas en totalité ce qui signifie que les créanciers font les frais des procédures collectives c’est à dire qu'ils vont perdre de l'argent puisqu'ils ne sont pas totalement payés de ce qui leur est dû. A cause de cela ils peuvent eux aussi avoir des problèmes qui peuvent les conduire eux aussi à des procédures collectives.

Pourquoi généralement tout se ramène à des procédures de liquidation judiciaire ?
Parce que les difficultés des entreprises ne sont pas prises en compte en amont. On a tendance, à se réveiller trop tard et, dans ce cas, la seule solution possible c'est la liquidation.
La seconde conception est peut-être plus macro-économique. En effet, la France est de moins en moins un pays industriel et devient un pays de service. Or, une industrie c'est des bâtiments industriels, des usines, des machines, des stocks alors que des services ce sont des relations entre des Personnes Physiques et des Personnes Morales. Les services sont très liés à la personne et, autant on peut imaginer la reprise d'une industrie en difficulté, autant il est beaucoup plus difficile de reprendre des services. Imaginons un architecte qui dépose le bilan, son successeur ne reprendra probablement pas les contrats en cours. L'industrie peut être reprise, les services beaucoup moins. Or, s'il n'y a pas de reprise possible, c'est la liquidation judiciaire.
A ces données économiques, s'ajoutent des données juridiques. Le droit des entreprises en difficulté est un droit dont on constate qu'il se renouvelle tous les 20 ans. Pourquoi ce cycle ? Parce que l'économie évolue et, comme le droit des procédures collectives est un droit de traitement des difficultés, on peut constater assez vite s'il est efficace ou non. Quand on constate que les objectifs ne sont pas atteints, on modifie la loi voire on en fait une nouvelle.
On peut faire commencer ce cycle de réforme intervenant tous les 20 ans en 1967.
La seconde loi importante date de 1985. Elle a été inspirée par M. Badinter et elle a profondément réformé le droit des procédures collectives. Cette loi est encore, pour certaines procédures, en cours d'application.
Plus proche de nous, la loi du 26 juillet 2005 dite "loi de sauvegarde des entreprises" applicable à compter du 1er janvier 2006, constitue le socle de notre droit positif sauf que M. Sarkozy a demandé une réforme de la réforme ce qui a donné lieu à l'ordonnance du 18 décembre 2008 applicable le 15 février 2009. Cette fois le cycle de 20 ans a donc été très raccourcis. Néanmoins, ce n'est pas un bouleversement mais c'est un ajustement. De plus, la mesure phare de la loi de 2005 c'est la création de toutes pièces de la procédure de sauvegarde qui a été appliquée pour Eurotunnel et Libération. Cette procédure de sauvegarde n'a pas marché parce qu'elle a concerné moins de 1% des procédures ouvertes à cause des réticences des chefs d'entreprise, des tribunaux, ... Bref, l'ordonnance de 2008 décide d'ouvrir plus largement encore les portes de la sauvegarde. 

Ici il y a une notion importante qui est la notion de procédure collective.
"Procédure" parce que tout va se dérouler devant un tribunal, généralement le TGI.
"Collective" parce qu'une entreprise a des partenaires (principalement ses créanciers). Globalement, si l'entreprise a des difficultés c'est qu'elle n'arrive pas à payer ses créanciers. Généralement les créanciers sont les salariés, les fournisseurs, le Trésor public, ...
Quand on dit "procédure collective", collective signifie le traitement collectif sinon global des créanciers. L'objectif de ses procédures est donc de traiter les difficultés de l'entreprise en considérant globalement, collectivement les créanciers.
Ex : cas d'une entreprise dont l'immeuble, qui lui appartient, est hypothéqué au profit d'une banque.
Ce traitement collectif va d'abord passer par une phase de suspension des procédures. Dans un premier temps, les créanciers ne peuvent rien faire. Donc, si l'entreprise dépose le bilan, la banque garde son hypothèque certes, mais elle ne peut pas l'exercer. De même les impôts, qui ont pourtant un privilège, ne peuvent rien faire.
Les procédures collectives sont au nombre de trois :
- La sauvegarde,
- Le redressement judiciaire,
- La liquidation judiciaire.

Néanmoins l'intitulé du cours, il s'agit ici de traiter des "entreprises en difficultés". Or, il y a d'autres moyens de traiter les entreprises en difficultés. Il y a, en effet, des procédures de "prévention" qui ont également un côté procédural mais qui est beaucoup moins marqué et qui n'ont plus du tout de côté collectif. Les créanciers sont traités individuellement.
Ces procédures dites "de préventions" sont au nombre de 2 :
- La procédure ad hoc,
- La procédure de conciliation.
Concernant les procédures de préventions :

Elles ont un élément processuel moins marqué, elles n'ont pas de caractère collectif ni contraignant et, comme leur nom l'indique, elles sont faites pour prendre le plus en amont possible les difficultés des entreprises pour les traiter le plus rapidement possible avec le moins de dégâts possibles. Cependant, ces procédures sont confidentielles et quand on en entend parler on ne peut pas en parler à son tour. En effet, la confidentialité favorise l'accord puisque les fournisseurs et les clients ne le savent pas et gardent ainsi leur confiance dans l'entreprise.
Ex : la société Eurotunel a fait l'objet de plusieurs mandats ad hoc successifs.

Concernant les procédures collectives :

- La sauvegarde
C'est la nouveauté de la loi de 2005. Cette procédure n'est pas confidentielle. L'esprit de la sauvegarde c'est de prendre le plus en amont les difficultés de l'entreprise sans que ses partenaires n'en tirent des conséquences négatives (clients et fournisseurs). En effet, quand une procédure collective est connue parce qu'elle est publique, les clients et les fournisseurs ne font plus affaire avec l'entreprise. Or, s'il n'y a plus de clients ou de fournisseurs, il n'y a plus d'activité.
Ex : une compagnie aérienne fait une procédure de sauvegarde. Si ce n'est pas une liquidation judiciaire, elle va continuer son activité. Mais, pour continuer, elle doit payer l'essence, les frais aéro-portuaires, ...
L'idée de la sauvegarde est de créer une procédure qui soit bien collective parce qu'elle a ce côté contraignant mais qui ne doit pas être un repoussoir. En effet, quand on ouvre une procédure on ne va plus payer les fournisseurs mais il faut qu'ils fassent encore confiance pour ne pas que l'entreprise coule.

- La procédure de redressement judiciaire.
Elle permet l'intervention éventuelle de repreneurs.

- La procédure de liquidation judiciaire.
Les actifs sont liquidés pour tenter de payer au mieux les créanciers.

Concernant la notion de cessation des paiements :
Une entreprise en difficulté c'est une entreprise qui tôt ou tard n'arrivera pas à payer ses dettes.
Ne pas réussir à payer ses dettes cela peut vouloir dire plusieurs choses :
- On trouve une première approche qui consiste à faire le compte de tous les actifs et de toutes les dettes de l'entreprise et on regarde si l'actif est ou non supérieur au passif. Néanmoins, en raisonnant de la sorte je me met presque moi-même dans une perspective de liquidation.

- On trouve une autre approche par rapport aux dettes qui doivent être actuellement payées avec les actifs qui permettent actuellement le paiement de ces dettes. Dès lors, je fais le compte non pas de tous les actifs et passifs mais de toutes les dettes exigibles et j'essaye de savoir ce que j'ai comme actifs pour permettre le paiement de ces dettes exigibles.

D'un côté on a une approche en insolvabilité, c'est l'entreprise qui a plus de passif que d'actif. Pour celle-là, il n'est pas étonnant qu'elle soit vouée à la liquidation judiciaire.
D'un autre côté on a une approche par la trésorerie càd "j'ai une dette, est-ce que j'ai de quoi la payer ?"
Ex : Vivendi. Elle avait beaucoup d'actifs dont la valeur était considérable. Sauf que, pour acheter ces actifs, l'entreprise s'était endettée et avait souscrit à d'énormes emprunts bancaires. Fin 2002, un nouveau président de la société arrive et il remarque qu'il y avait un remboursement d'une très grosse échéance bancaire à honorer dans quelques semaines. Or il n'y avait pas d'argent dans les caisses. Néanmoins il y avait des actifs qui valaient extrêmement cher. Si on avait fait l'approche par l'insolvabilité, il y avait plus d'actif que de passif. C'est pourquoi, le nouveau président de Vivendi a été voir leurs créanciers en disant qu'il n'y avait pas suffisamment d'argent dans la caisse. Ceux-ci ont accordé un peu de temps pour rembourser contre une cession de pas mal d'actifs. 5 ans après, on remarque que l'entreprise n'a quasiment plus de dettes.
On remarque donc que le résultat entre les deux approches n'est pas la même.

La notion de cessation de paiement est donc une notion de trésorerie qui consiste pour une entreprise à ne pas pouvoir faire face à son passif exigible au moyen de son actif disponible. En réalité cela correspond à la question "qu'est-ce que j'ai en banque ?" Dans ce cas, soit l'entreprise a suffisamment en caisse et dans ce cas elle n'est pas en situation de cessation de paiement et inversement.

C'est une notion fondamentale parce que généralement les cinq procédures que nous allons voir s'articulent autour de cette notion. Autrement dit, certaines procédures ne sont ouvertes qu'à certaines entreprises qui ne sont pas en état de cessation de paiement tandis que d'autres sont obligatoires pour les entreprises qui sont en cessation de paiement. Pour une entreprise qui est en difficulté la première question qu'un chef d'entreprise doit se poser est celle de savoir s'il est en cessation de paiement ou pas.

- Le mandat ad hoc et la sauvegarde ne sont ouverts qu'aux entreprises qui ne sont pas en état de cessation de paiement.
- Le redressement et la liquidation judiciaire supposent l'état de cessation des paiements et c'est même une obligation pour le chef d'entreprise d'ouvrir une telle procédure en faisant un dépôt de bilan.
- La procédure de conciliation est ouverte au choix aux entreprises qui sont en état de cessation des paiement depuis peu de temps ou qui ne le sont pas encore. 

Le passif exigible est constitué par les dettes dues dès aujourd'hui.
Il y a eu tout un débat entre le passif exigible et exigé.
Ex : on doit payer le loyer le 28 du mois. On ne paye pas et le propriétaire met un peu de temps à s'énerver. Au moment où il s'énerve on parle de passif exigé, avant on parle de passif exigible.
Ici, on va raisonner sur la notion de passif exigible

L'actif disponible c'est ce qui doit me permettre de payer mes dettes exigibles. Par exemple, c'est ce qu'on a en caisse, en banque, dans les réserves de crédit, ...
Le droit des entreprises en difficultés doit arbitrer entre plusieurs objectifs :
1. Sauver l'entreprise, la redresser pour maintenir son activité. C'est une condition du maintien de l'emploi.
2. La préservation de l'entreprise.
3. Le paiement des créanciers.

Ce dernier est un peu subordonné par rapport aux précédents mais en réalité tout se tient parce que si les créanciers ne sont pas payés ils risquent à leur tour de faire l'objet d'une liquidation judiciaire. C'est ce que l'on appelle les faillites en cascade (notamment en matière de sous-traitance).
Il y a souvent une opposition entre les gouvernements de gauche qui mettent en avant le maintien de l'emploi et des gouvernements de droite qui mettent en avant le paiement des créanciers mais il est évident que l'un ne va  pas sans l'autre.

Néanmoins, il est clair que la nature des procédures va permettre d'ordonner ces objectifs. L'exemple type est la liquidation judiciaire puisque dans ce cas il n'y a plus d'activité à redresser, tous les salariés ont été licenciés donc il reste à liquider au mieux pour payer les créanciers au mieux.

Actuellement nous sommes sous 3 systèmes :
- le système de 1985 applicable jusqu'au 31 décembre 2005 càd aux procédures collectives qui se sont ouvertes jusqu'au 31 décembre 2005 qui ont pu déboucher sur des plans d'une durée de 10 ans.
- la loi du 26 juillet 2005 applicable au 1er janvier 2006 à toutes les procédures collectives ouvertes depuis le 1er janvier 2006.
- l'ordonnance du 18 décembre 2008 applicable au 15 février 2009 càd aux procédures collectives qui se sont ouvertes à partir du 15 février 2009.

On étudiera principalement la loi du 26 juillet 2005 telle qu'elle a été modifiée par l'ordonnance du 18 décembre 2008. Sauf que, depuis 2000, il y a un règlement européen des faillites qui a pour objet de tenter d'unifier le droit européen des procédures collectives. Cet objectif d'unification passe notamment par la possibilité d'ouvrir dans un pays une procédure collective dont les effets seront reconnus par les autres pays européen. Ce règlement permet même d'ouvrir dans un pays une procédure collective au profit d'une société qui est pourtant dans un autre pays au nom de ce qu'on appelle "la théorie du centre des intérêts principaux."

Ceci amène à nous pencher sur l'affaire Eurotunnel. C'est un groupe composé de sociétés jumelles d'un côté et de l'autre de la Manche. Quand le groupe Eurotunnel a commencé à avoir des difficultés il y avait plusieurs manières de traiter ces difficultés du point de vue du droit applicable. On pouvait ouvrir en France des procédures au profit des sociétés françaises et réciproquement. Mais il y avait un risque que les difficultés de ce groupe ne soit pas résolu puisqu'il n'y a pas de cohérence entre ces procédures. D'où l'intérêt du règlement de 2000 qui a permis l'ouverture en France de 12 procédures de sauvegarde dont 6 concernant les sociétés françaises et 6 concernant les sociétés anglaises.




PREMIERE PARTIE. LES PROCEDURES
DE PREVENTION

Chapitre 1. Le mandat ad hoc :

C'est une procédure qui est à peine réglementée par la loi et qui pendant longtemps ne l'a quasiment pas été mais qui l'ai un peu plus aujourd'hui grâce à la loi de 2005 et par l'ordonnance de 2008.
Souvenons-nous la grande crise immobilière du début des années 90. A cette époque, il y avait des banques qui avaient trop prêtées n'importe quoi à n'importe qui. Cette crise de l'immobilier a débouché sur une crise bancaire parce que les banques n'ont pas pu être remboursées de créances très grosses. La question était de savoir si on laissait cette logique économique et juridique aller de l'avant càd liquidation judiciaire de tous les opérateurs de l'immobilier entraînant de grosses difficultés pour les banques voire la faillite de certaines, ou s'il fallait essayer de trouver une autre solution. C'est ce qu'a décidé de faire à l'époque le Président du Tribunal de commerce de Paris car il a préféré les mettre tous autour de la table afin d'essayer de les sauver.

Ex : je suis un promoteur immobilier, je veux acheter un immeuble qui vaut 100. Je vais voir le banquier pour savoir combien il peut me prêter en fonction de mes fonds propres. Sauf que les professionnels de l'immobilier ont demandé aux banquiers petit à petit de tout prêter voire de prêter aussi les frais de notaire etc... Le banquier est rentré dans cette logique de prêter de plus en plus, voire même de prêter par avance la plus-value prévue. Mais un jour le marché s'est bloqué. La banque avait prêté 130 un immeuble qui valait 100 et avait pris une hypothèque sur l'immeuble. Début 90 le marché a baissé en quelques mois de 40%. Le marchand de bien n'arrivait donc plus à le revendre. Le banquier avait donc prêté 130 pour un immeuble qui ne valait plus que 60 donc il avait perdu 70.

Pour éviter ce mécanisme, les présidents du Tribunal de commerce de Paris et de Nanterre se sont dit qu'il fallait mettre autour de la table les prêteurs et les promoteurs afin d'essayer de trouver une solution. Pour promouvoir cette manière de traiter ce dossier, les Présidents ont nommé des mandataires ad hoc. Ce mandataire n'avait que le pouvoir de tenter de convaincre d'un côté le débiteur et d'un autre les banquiers. C'est la naissance de la procédure de mandat ad hoc.

La loi prévoit que le Président du Tribunal peut, à la demande d'un chef d'entreprise, désigner un mandataire ad hoc en lui donnant une mission qui est généralement la mission définie par le chef d'entreprise lui-même. Le plus souvent cette mission est d'aider le débiteur à trouver un accord avec ses créanciers. Le mandataire ad hoc n'a aucun pouvoir coercitif. C'est vraiment une procédure d'assistance à la négociation. Le mandataire est prêté pour une certaine durée. La loi n'encadre pratiquement pas cette procédure.
Néanmoins, l'entreprise qui sollicite la nomination d'un mandataire ad hoc ne doit pas être en état de cessation des paiements. De plus, il y a certaines incompatibilités qui pèsent sur le mandataire ad hoc. Ce mandataire peut être n'importe qui pour peu que cette personne soit nommée par le Tribunal. Pour cela il faut qu'il soit indépendant de l'entreprise et du créancier afin d'éviter tout conflit d'intérêt.

Comment les choses se passent-elles ?
- Le chef d'entreprise présente une requête au Président du Tribunal,
- Cette requête a l'effet de voir désigner un mandataire ad hoc chargé d'une certaine mission.
- Généralement, le Président du Tribunal convoque le chef d'entreprise pour entendre sa requête et lui poser des questions.
- Ensuite, soit le Président accède à sa demande et nomme le mandataire, soit il refuse si toutes les conditions ne sont pas remplies.
- Une fois désigné, le mandataire ad hoc doit accepter sa mission et certifier qu'il ne présente pas d'incompatibilité.
- Puis la mission démarre. C'est une mission de rapprochement. Elle a une durée définie par le Président quand il donne le mandat ad hoc. A l'intérieur de cette durée, des discussions s'engagent entre l'entreprise et ses créanciers et soit elles aboutissent, soit elles n'aboutissent pas.
- Si elles aboutissent, cela prend la forme d'un protocole d'accord qui est un contrat conclu sous l'égide du mandataire ad hoc. Généralement les créanciers font des efforts et ils rallongent la durée de prêts s'il s'agit d'une banque, la durée des paiements s'il s'agit de fournisseurs ou une décision est prise afin de remettre des capitaux propres dans l'entreprise.
- Si elles n'aboutissent pas, à l'issu du mandat ad hoc chacune des parties reprend sa liberté. Mais généralement c'est une autre procédure qui va alors s'enclencher.

Cette procédure est confidentielle donc toute personne qui y concours est tenu à la plus grande confidentialité puisque cette dernière est recherchée par le débiteur puisqu'elle évite que les banquiers ou que les clients, prennent peur. Voilà pourquoi, sauf exceptions, on n'entend jamais parler de ces procédures.

Rappelons que pour engager cette procédure il ne faut pas que l'entreprise soit en état de cessation de paiement même si elle en est toute proche et qu'elle peut en sortir. Néanmoins, si une entreprise a suffisamment pour payer les charges et les salaires mais pas une grosse échéance bancaire la banque peut accorder un moratoire (un délai supplémentaire), et dans ce cas l'entreprise ne sera plus en état de cessation de paiement.

Quand la procédure s'ouvre la première chose à vérifier c'est l'état de cessation de paiement ou non. Il ne faut pas non plus que la société soit en état de cessation de paiement au cours de la procédure de mandat ad hoc. C'est un élément essentiel de la procédure.

Chapitre 2. La conciliation.

C'est la seconde procédure de prévention qui est davantage réglementée que la précédente mais qui n'est toujours pas une procédure collective. Ce qui caractérise la procédure collective c'est en effet le traitement global des créanciers. Ce qui la caractérise c'est son côté coercitif, obligatoire.
Or, ni dans la conciliation, ni dans le mandat ad hoc ce côté coercitif n'existe.

Cette procédure a été créée en 1984 et, à l'époque, on l'appelait soit conciliation soit règlement amiable. Désormais elle n'a qu'un nom depuis 2005, c'est la procédure de conciliation. Elle porte d'ailleurs bien son nom puisqu'un conciliateur va être nommé et sa mission va être de tenter de concilier les parties càd essentiellement d'un côté un débiteur et de l'autre tout ou partie de ses créanciers.

En quoi la conciliation est-elle davantage règlementée que le mandat ad hoc ?
Sa durée est limitée. Les issues sont davantage précisées par la loi. Quand les issues sont positives càd quand il y a un accord, ce dernier est soumis à la juridiction qui a ouvert la procédure en désignant un conciliateur.
L'autre différence c'est le rapport à la notion de cessation de paiements. Une procédure de conciliation est ouverte soit aux entreprises qui ne sont pas en état de cessation de paiement, soit qui le sont mais depuis moins de 45 jours. Ceci est une nouveauté de 2005 sur laquelle l'ordonnance de 2008 n'est pas revenue. A contrario, cela signifie qu'une entreprise qui est en état de cessation de paiement depuis plus de 45 jours, ne peut plus exercer comme procédure que le redressement et la liquidation judiciaire mais elle a l'obligation de déposer le bilan.

A priori, la conciliation était réservée aux entreprises qui n'étaient pas en état de cessation de paiement.

Pourquoi avoir ouvert la conciliation aux entreprises qui sont en état de cessation des paiements puis moins de 45 jours ?
Ceci s'explique par le caractère confidentiel de la procédure tandis que les procédures collectives ne sont pas confidentielles. Donc, pour une entreprise qui est en état de cessation de paiement depuis peu de temps et qui pense qu'elle peut s'en sortir grâce à un accord avec ses créanciers, cet accord doit arriver vite. On veut permettre cet accord rapidement afin de mettre fin à l'état de cessation des paiements et ceci dans le secret de la confidentialité. Voilà pourquoi, en 2005, le législateur a fait ce choix d'ouverture.

Contrairement à la procédure de mandat ad hoc, la procédure de conciliation a eu un vrai succès depuis la loi de 2005.

Tout commence, comme en matière de procédure de mandat ad hoc, par une requête auprès du Président du Tribunal de commerce qui va avoir pour effet de nommer un conciliateur. Comme en matière de mandat ad hoc, le monopole de la demande appartient au chef d'entreprise. Seul lui peut demander l'ouverture de telles procédures. Lorsque le chef d'entreprise demande l'ouverture de cette procédure, il doit prouver qu'il n'est pas en état de cessation de paiement ou qu'il l'est depuis moins de 45 jours.
Comment un chef d'entreprise peut-il prouver qu'il n'est pas en état de cessation de paiements ou qu'il l'est depuis moins de 45 jours ?
Il y a plusieurs moyens. L'entreprise peut avoir des CAC qui peuvent faire une attestation pour prouver qu'elle est dans telle ou telle situation. De plus, quand une entreprise est bien gérée, elle fait des prévisions de trésorerie soit jours après jours ou mois après mois. Ces prévisions vont prévoir le rythme des dépenses et des recettes.

Puis le Président du Tribunal va accéder ou non à sa requête de nomination d'un conciliateur. Il existe néanmoins des voies de recours contre la décision d'un Président qui ne nommerait pas de conciliateur ou qui en nommerait un mais pas celui désigné par l'entreprise.

Le conciliateur est soumis aux mêmes incompatibilités que le mandataire ad hoc mais le conciliateur, encore plus que dans le mandat ad hoc, a pour mission de favoriser un accord qui aura pour effets de mettre fin aux difficultés de l'entreprise. Mais, comme en matière de mandat ad hoc, le conciliateur n'a aucun pouvoir coercitif. Éventuellement le conciliateur peut se faire assister par un expert qui va l'éclairer sur les raisons des difficultés des entreprises et les moyens pour en sortir.
Ce qui va favoriser l'accord c'est la durée de la conciliation. Cette durée est de 5 mois. Cette durée limitée est la meilleure et la pire des choses parce que les parties savent qu'elles ont peu de temps pour trouver un accord et, au bout de cette période, on fait le compte pour voir s'il y eu cet accord ou pas. C'est ce qui explique d'ailleurs que parfois les procédures de mandat ad hoc se succèdent.
5 mois c'est court mais cette brièveté est nécessaire sinon il risque d'être trop tard. La durée d'un mandat ad hoc n'est pas limitée par la loi mais par le Président du Tribunal. De plus, il est possible de passer de la conciliation au mandat ad hoc afin de laisser plus de temps.

Du côté du créancier, rien ne peut lui être imposé, même pas la participation aux réunions.
Ex : une entreprise pour fonctionner, a besoin de ses fournisseurs. Ces derniers peuvent donner des délais de paiement. L'entreprise a aussi besoin de ses banquiers. On pourrait tout à fait imaginer que dans le cadre de la conciliation, le chef d'entreprise ne demande aucun sacrifice à ses fournisseurs mais uniquement à ses banquiers. Ainsi, les fournisseurs ne seront pas conviés à la conciliation.

Le risque c'est que, pendant la durée de la conciliation, les créanciers ne désarment pas càd que, étant titulaires de créances, ils en demandent le paiement.
Ex : ils bloquent les comptes en banque de l'entreprise, ils saisissent les créances dues par l'entreprise, ...
Mais il est clair que si les créanciers ne jouent pas le jeu, la conciliation échouera. C'est pourquoi, la loi prévoit que pendant la conciliation, si un créancier se fait trop pressant, il est possible de lui imposer des délais de grâce (article 1244 et suivants du Code civil). Ces délais ont pour effets que la créance est toujours certaine et liquide mais elle n'est plus exigible.

A la fin soit il y a, soit il n'y a pas d'accord. Ce dernier va être soumis au Tribunal donc la conciliation est davantage réglementée que le mandat ad hoc notamment quand un accord est trouvé.

Hypothèse où aucun accord n'a été trouvé :
Dans ce cas, il est vraisemblable que l'entreprise se retrouvera en procédure collective et cette procédure dépendra de son état de cessation de paiement.
* Si l'entreprise est entrée en procédure de conciliation en état de cessation de paiement, il est probable qu'elle le soit toujours. Dans ce cas, la sauvegarde lui est interdite, elle n'a le choix qu'entre le redressement judiciaire ou la liquidation.

* Si l'entreprise est entrée sans être en cessation de paiement mais que, sans accord, elle en sort en état de cessation de paiement, elle aura le choix entre le redressement et la liquidation.

* En revanche, l'entreprise qui est entrée en conciliation sans être en état de cessation et qui en sort dans le même état est, s'il y a lieu, éligible à la sauvegarde.
Il n'y a aucune automaticité en la matière, c'est au chef d'entreprise qu'il appartiendra de se déterminer en cas d'échec de la conciliation.
Hypothèse où la conciliation a débouché sur un accord :
- Cet accord va faire l'objet d'un document écrit intitulé "protocole d'accord de conciliation" qui réunit d'un côté l'entreprise débitrice et, de l'autre côté, tout ou partie de ses créanciers. Ce protocole est établit sous l'égide du conciliateur. On peut imaginer que d'autres personnes y soit parties comme les actionnaires de l'entreprise s'ils décident de remettre de l'argent dans l'entreprise en procédant par exemple à une augmentation de capital. Cet accord c'est donc, à ce stade, un acte SSP qui n'a rien de judiciaire donc qui n'a pas de force exécutoire. Il n'aurait de force exécutoire que si cet accord avait été conclu par acte authentique. Néanmoins, il très rare qu'un notaire intervienne à ce stade. Or, les parties peuvent souhaiter qu'il ait force exécutoire notamment et surtout du côté des créanciers.
Ex : les actionnaires se sont engagés à augmenter le capital d'1.000.000 d'€ au travers d'un protocole. Ces actionnaires ont pris cet engagement qui profite d'abord à l'entreprise mais également aux créanciers. Si les actionnaires ne tiennent pas leur promesse, les créanciers vont demander en justice la réalisation de cette augmentation afin d'obtenir un jugement qui aura force exécutoire.

La loi prévoit une procédure très simple qui consiste pour toutes les parties au protocole de demander ensemble au Président qui a nommé le conciliateur de constater l'accord pour lui donner force exécutoire. Voilà comment un SSP sera revêtu de la force exécutoire. Ce simple constat fait par le Président s'accompagne d'une vérification càd qu'il faut que l'accord mette fin à un état de cessation de paiement ou confirme que l'entreprise n'a jamais été en état de cessation de paiement. En d'autres termes, la conciliation débouchant sur un accord constaté exclut tout état de cessation de paiement pour l'avenir. Il est intéressant de préciser qu'il s'agit bien d'un constat fait par le Président. Ce dernier reste donc confidentiel car il ne sera pas fait au cours d'une audience publique. Ce constat n'est pas obligatoire mais il intervient très souvent en faveur des créanciers.

- Possibilité de sortie par voie d'homologation de l'accord.
Nous sommes toujours dans l'hypothèse où il y a bien eu un accord. Il va s'agir d'un jugement rendu par le Tribunal lui-même et non pas par le Président au terme d'une procédure qui n'est pas publique mais qui va au-delà de la confidentialité qui jusqu'à présent avait caractérisé la procédure de conciliation.
La demande d'homologation est faite par l'entreprise débitrice. Généralement, le débiteur fait une telle demande à la requête des créanciers parties à l'accord. Concrètement, cela signifie que les créanciers conditionnent leur accord à l'homologation du protocole. Du côté des créanciers, l'accord va être conclu sous la condition suspensive de l'homologation. Le débiteur saisi donc le Tribunal d'une demande d'homologation de l'accord et cette dernière ne va intervenir qu'à l'issue d'une audience à laquelle sont parties l'entreprise débitrice, les créanciers parties à l'accord, le conciliateur, un représentant des salariés et le Ministère public. Jusqu'à présent, dans la procédure de conciliation qui était confidentielle, jamais aucun représentant des salariés n'est intervenu. A l'occasion de cette procédure d'homologation, les représentants des salariés vont peut-être découvrir que leur entreprise a demandé une conciliation et qu'un accord est intervenu.

Au cours de cette procédure, les représentants vont avoir connaissance de cet accord. Il n'est pas dit que la confidentialité va être atteinte mais en tout cas on sort du cercle des parties à l'accord.

Avant que l'audience se tienne, il est demandé au débiteur de déposer au greffe du Tribunal une partie de l'accord pour que, éventuellement, toute personne intéressée puisse en prendre connaissance et, notamment, les créanciers qui ne seraient pas parties à l'accord.

Quelle va être la teneur de cette audience ?
Le tribunal va s'assurer que l'entreprise :
- n'est pas ou plus en état de cessation des paiements,
- que l'accord pérennise l'activité de l'entreprise,
- et surtout il va s'assurer que l'accord ne porte pas atteinte aux droits des créanciers qui n'en sont pas signataires. En effet, le débiteur peut considérer que tous les créanciers n'ont pas à être associés à la conciliation.
Si toutes ces conditions sont remplies, le tribunal va homologuer l'accord.

Jusqu'à maintenant, et en dépit du dépôt au greffe des éléments principaux de l'accord, tout ce qui s'est déroulé jusqu'à ce stade est totalement ou très largement confidentiel et certains créanciers, auxquels il n'a pas été demandé de participer à la conciliation, peuvent être tenus à l'écart de ce processus. Quand le jugement d'homologation est rendu, il fait alors l'objet d'une double publication au BODACC et dans un journal d'annonces légales et, à compter de cette publication, tout intéressé a le droit de faire tierce opposition au jugement d'homologation (= recours exercé par un tiers qui n'était pas présent. Il fait opposition au jugement en soutenant que ce jugement porte atteinte à ses droits et il demande au même tribunal de revenir sur son jugement.) Cette procédure d'homologation, pour qu'elle ait véritablement un sens, a supposé qu'on sorte d'une confidentialité absolue puisque le jugement d'homologation est publié. La procédure devient donc publique. C'est alors que les tiers peuvent faire valoir leurs droits.

Comment des tiers non parties à l'accord et peut-être même pas associés à la négociation, pourraient être atteints ? C'est possible car cela va dépendre des conséquences de l'homologation. Pourquoi faire homologuer l'accord sinon pour protéger les tiers ?

A quoi sert l'homologation ?

Elle a trois objets / trois enjeux :
- D'abord, elle donne force exécutoire à l'accord,
- Ensuite, elle donne le privilège de new money. Dans le cadre de la conciliation, il se peut que l'entreprise ait eu besoin de nouveaux prêts et de nouveaux crédits. Généralement, dans ce cas on se tourne vers les banques. Imaginons la situation d'une banque à qui une entreprise en difficulté a demandé un crédit. Cette banque va vouloir des garanties or, par hypothèse elle ne va pas bien et elle n'a plus d'immeuble sur lesquels elle pourrait poser une garantie sinon elle l'aurait probablement fait au profit de ses créanciers. C'est dans ce cadre là que la loi a créé un nouveau privilège qu'on appelle le privilège de new money. Ainsi, celui qui va prêter à l'entreprise dans le cadre d'une conciliation verra son prêt garanti de plein droit par un privilège légal mais la condition de ce privilège c'est que l'accord qui prévoit ce prêt soit homologué. Il n'y a pas de privilège s'il n'y a pas d'homologation. En pratique, cela signifie que le protocole d'homologation va prévoir que telle banque s'est engagée au profit de telle entreprise. La banque va conditionner son accord à l'homologation parce que si l'accord n'est pas homologué, elle n'aura pas d'accord.

Pourquoi ce privilège est-il très fort ?
Si l'accord est homologué et que ce nouveau prêt est prêté et qu'ensuite l'entreprise fait l'objet d'une procédure de sauvegarde, d'un redressement ou d'une liquidation, le créancier qui a prêté dans le cadre de la conciliation sera remboursé en priorité dans le cadre d'un redressement ou d'une liquidation.

Tant que ce nouveau prêt est en cours et qu'il n'est pas intégralement remboursé, ce nouveau prêteur dispose de ce privilège. On comprend que l'homologation est extrêmement importante pour le créancier qui va faire ce nouveau prêt. De plus, l'homologation va prendre un certain temps, c'est pourquoi l'ordonnance de 2008 prévoit que dans le délai de 5 mois maximum ce n'est que la demande d'homologation qui doit être faite, l'homologation en elle-même pouvant être délivrée après cette période.

Ex : je suis créancier d'une entreprise et ma créance est garantie par une hypothèque. Au cours de ce prêt, l'entreprise demande une conciliation et elle m'associe à cette procédure. Néanmoins, je refuse toute conciliation. La conciliation continue sans moi et débouche sur un accord. Cet accord prévoit qu'un autre banquier fasse un autre prêt sous condition de privilège de new money. La demande d'homologation va donc être faite et je ne serais pas partie à cette audience. Cette audience va faire l'objet d'une annonce dans le BODACC et dans un journal d'annonces légales. Ainsi, je me rend compte que le créancier qui vient de reprêter bénéficie maintenant d'un privilège de new money. A priori je ne suis pas concerné. Pourtant il n'en est rien. En effet, si au bout que quelques années mon client tombe en procédure de liquidation judiciaire, l'autre banquier va bénéficier d'un privilège sur l'immeuble sur lequel j'ai mon hypothèque. J'aurai dû être le premier attributaire du prix de l'immeuble mis aux enchères mais grâce à son privilège c'est l'autre banque qui va en bénéficier. Mon hypothèque ne vaudra que dans l'hypothèse où le créancier privilégié n'aura pas tout prit. C'est pourquoi, au vu de la publication de ce jugement dans le BODACC je vais faire tierce opposition afin de voir si cet accord ne porte pas atteinte à mes droits. Le tribunal va alors devoir arbitrer entre persister dans l'accord mais nuire à mes intérêts ou se dire que ce n'est pas juste de me priver de mon hypothèque et revenir sur l'accord. Voilà en quoi un tiers peut se voir négativement impacter par une homologation.

- Enfin, l'interdiction de remonter de la date de cessation de paiement avant la conciliation de manière à sécuriser la conciliation et ce qui s'est passé avant.
Soit une entreprise qui est en état de cessation de paiement. Dans ce cas, l'entreprise a trois possibilité puisqu'elle peut demander l'ouverture d'un redressement ou d'une liquidation. Mais il peut se passer du temps entre son entrée en état de cessation de paiement et le moment où une procédure collective est engagée. Il y a donc une période qui se situe entre la date de cessation de paiement et la date d'ouverture. Cette période est appelée la "période suspecte".

Ex : nous sommes le 16.02. Au 15.02 au plus tard je devais payer 500.000€ de dettes sociales à l'URSAFF. Or, je n'avais pas d'argent et je me dis qu'il allait se passer des jours avant que l'URSAFF s'en aperçoive. Je poursuis mon activité. Début juin je dépose le bilan. Quand ai-je été en état de cessation de paiement ? C'est le 15.02 puisque je n'avais pas suffisamment de quoi payer une créance certaine, liquide et exigible à l'aide de mes actifs propres. Pendant 4 mois j'étais donc en état de cessation des paiements et je ne faisais pas l'objet d'une procédure de conciliation ou de mandat ad hoc. Pendant ces 4 mois l'entreprise a continué et j'ai donc dû "trafiquer" pour m'en sortir. J'ai donc peut-être été enclin à faire des actes que je n'aurai pas du faire (ex : j'ai vendu une voiture qui valait 50.000€ à 10.000€ pour trouver au moins un peu de fonds, j'ai trouvé quelqu'un qui m'a prêté de l'argent mais à un taux excessif). Ainsi, j'ai pu faire des actes qui ont nuit à l'entreprise. Pendant cette période suspecte ont pu être passé des actes qui pourront être remis en cause par le tribunal.

Nous sommes donc en conciliation et le protocole de conciliation doit exclure tout état de cessation de paiement parce que soit l'entreprise n'était pas dans un tel état et elle ne l'est toujours pas, soit elle était dans cet état et l'accord l'en a fait sortir. Ainsi, un tel accord exclut pour l'avenir tout état de cessation de paiement. L'accord de conciliation n'a de sens que si l'entreprise n'est pas ou plus en état de cessation des paiements. Néanmoins, l'entreprise a pu l'être avant l'accord. Si elle a été en état de cessation de paiement, il y a un risque éventuel de période suspecte. Ceci signifie que tout ce qui est intervenu pendant cette période suspecte est suspect. Si l'entreprise est rattrapée par sa situation et que quelques mois après la procédure de conciliation elle dépose le bilan et qu'à ce moment là on remarque que l'entreprise était en état de cessation de paiement depuis très longtemps alors tout ce qui est dans cette période est suspect, y compris la procédure de conciliation.

Afin d'éviter ces insécurités, la loi prévoit que le jugement d'homologation interdit que la date éventuelle de cessation de paiement soit remontée avant la date de conciliation.  Ainsi, rien de ce qui s'est passé avant et pendant la conciliation ne pourra être remis en cause.

L'accord s'inscrit généralement dans le temps : les créanciers vont donner des délais au débiteur. Soit le protocole est totalement exécuté et chacune des parties respecte ses obligations, soit il ne l'est pas totalement ce qui est généralement l'annonce d'une procédure de liquidation judiciaire.

Si en cours d'exécution du protocole, le débiteur fait l'objet d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation, l'ouverture de cette procédure va rendre "caduque" l'accord intervenu en conciliation. Cet accord va être de fait résolu et les créanciers vont retrouver la plénitude de leurs droits comme s'ils n'y avait pas eu d'accord de conciliation.

Si le protocole est inexécuté sans pour autant que le débiteur fasse l'objet d'une procédure collective on est dans la situation d'un contrat inexécuté donc la victime de cette inexécution va demander au tribunal de prononcer la résolution du protocole pour inexécution. Cette seconde hypothèse est plutôt rare. En effet, qui se rend coupable de l'inexécution du protocole ? Généralement, c'est le débiteur lui-même et souvent cette inexécution consiste à ne pas respecter une échéance de paiement. Un débiteur qui ne respecte pas une échéance de contrat c'est qu'il est vraisemblablement en état de cessation de paiement. L'inexécution du protocole par le débiteur c'est généralement l'antichambre d'une procédure collective et plus souvent de redressement et de liquidation davantage que de sauvegarde.
2 ultimes remarques :
- Il peut y avoir des créanciers qui ne sont pas parties au protocole, soit parce qu'ils n'ont pas été conviés aux négociations, soit parce qu'ils y ont été conviés mais qu'ils ont refusés de faire les efforts qu'on leur demandait. Ces créanciers, malgré la conciliation, gardent la plénitude de leurs droits puisqu'il ne sont pas parties au protocole. Ces créanciers doivent voir leurs droits sauvegardés par le protocole. Pour autant, ces créanciers ne peuvent pas aller au-delà de leurs droits car ils pourraient peut-être mettre en péril le protocole. Il faut donc trouver un point d'équilibre entre l'existence de créanciers non parties au protocole et la nécessité de profiter du protocole qui est censé tirer l'entreprise de difficultés. La loi rappelle alors le bon vieux mécanisme du délai de grâce. Ainsi, les créanciers non parties au protocole peuvent se voir imposer des délais de paiement, notamment par le jugement d'homologation. Mais là, ce n'est que l'application du Code civil (article 1244 du Code civil). Ce délai de grâce peut aller jusqu'à 2 ans.
- Concernant l'enchainement éventuel des procédures, le législateur de l'ordonnance de 2008 a prévu une sorte de délai de viduité. Désormais, une nouvelle conciliation ne peut pas être demandé moins de 3 mois avant la précédente.

CONCLUSION :

En pratique, il est très fréquent que ces deux procédures se succèdent. Généralement, elles se succèdent dans l'ordre suivant :
D'abord, le débiteur va commencer par un mandat ad hoc parce qu'il n'est pas limité dans le temps.
A l'expiration du mandat ad hoc :    
* soit il n'y a pas d'accord et on s'achemine vers une procédure collective,
* soit il n'y a pas d'accord mais le débiteur va faire suivre le mandat par une conciliation pour montrer aux créanciers qu'ils n'ont plus que 5 mois pour trouver un accord,
* soit un accord est intervenu sous le mandat ad hoc. Dans ce cas, très souvent, le mandat est converti en conciliation. L'accord ou le pré-accord conclu en mandat ad hoc devient l'accord en conciliation et la conciliation n'est ouverte que pour permettre la constatation ou l'homologation de l'accord.

On trouve un ordre inverse beaucoup moins fréquent en pratique : tout commence par une conciliation qui a une durée limitée à 5 mois. A l'issu de la conciliation, aucun accord n'est intervenu. Dans ces conditions, le débiteur demande l'ouverture d'un mandat ad hoc pour tenter d'obtenir un accord qu'il n'a pas réussi à avoir au travers de la conciliation.








































DEUXIEME PARTIE. LA PROCEDURE DE SAUVEGARDE


C'est la procédure emblématique de la loi de 2005. Néanmoins, il y a une série d'idées reçues qui circulent sur la procédure de sauvegarde. Déjà, jusqu'à l'ordonnance de 2008, la procédure de sauvegarde est un échec et on est loin de l'objectif que s'était fixé le législateur de 2005.

Pourquoi est-ce un échec ?
- C'est quand même une procédure collective voire même de pré-faillite qui ne dit pas son nom.
- Peut-être que les conditions d'entrée en sauvegarde étaient trop restrictives d'où l'ordonnance de 2008 qui assouplit ses conditions.
- L'attractivité de la procédure de conciliation.
- La procédure de conciliation est confidentielle alors que la procédure de sauvegarde est une procédure publique. Ainsi les créanciers, clients, salariés, savent que l'entreprise est en sauvegarde. C'est une procédure de pré-faillite qui a pour premier effet de "planter" les créanciers car ces derniers ne sont pas payés tandis que dans la conciliation, les créanciers gardent tous leurs droits. Tout ceci explique que l'ordonnance de décembre 2008 soit destinée à rendre plus attractive la procédure de sauvegarde.

On trouve aujourd'hui deux exemples de réussite de cette procédure de sauvegarde au travers de la société Eurotunnel et de la société Libération.

Une autre idée reçue concernant cette procédure est à combattre. En effet, on l'appelle parfois le "chapitre 11 à la française", ce chapitre 11 étant le chapitre d'une des lois américaines qui gouverne une des procédures dont s'est inspirée la sauvegarde.
Ex : application du chapitre 11 pour Lehman Brother. Dans cette procédure américaine, les créanciers vont prendre le contrôle de la société et vont gérer eux-mêmes comment reprendre leurs créances. Or, en droit français, c'est tout l'inverse puisque la procédure de sauvegarde va avoir pour premier effet de "planter les créanciers". La procédure de sauvegarde est tout sauf favorable aux créanciers.

Concernant la notion de cessation de paiement dans la procédure de sauvegarde :
(Rappel : cessation de paiement = ne pas pouvoir faire face à son passif exigible au moyen de son actif disponible.)
Il ne faut pas que l'entreprise soit en état de cessation de paiement. Mais, jusqu'à 2008, l'entreprise qui sollicitait cette procédure devait faire état de difficultés qui étaient de nature à la conduire à un état de cessation de paiement. Il devait y avoir une certaine perspective de cessation de paiement. Avec l'ordonnance de 2008, cette condition a disparu puisqu'il faut et qu'il suffit que l'entreprise fasse l'objet de difficultés. C'est notamment de cette manière qu'on a cru rendre plus attractive cette procédure. Néanmoins, ce n'est pas sur qu'on ait fait le bon choix.
En effet, n'y a-t-il pas un risque que cette procédure soit instrumentalisée à l'encontre des créanciers ?
Ex : je suis chef d'entreprise et à la fin du mois je dois faire les salaires, je dois le 1er jour du mois payer mon bail et le 15 je dois payer des charges à l'URSAFF. Si je ne paye pas une de ces créances, je suis en état de cessation de paiement. Si j'ai payé mes salariés et que j'ai payé mon bail, je dépose le 4 une demande de procédure de sauvegarde et à cette date je ne suis donc pas en état de cessation de paiement. Or le 15, je suis en sauvegarde donc je ne peux plus payer l'URSAFF.

Mais si je dépose la demande le 5, que l'audience est tenue le 16 et que le jugement est rendu le 18,  si je n'ai pas payé l'URSAFF, je suis en état de cessation de paiements.

Chacune des trois procédures collectives est gouvernée par un certain nombre de règles mais le droit commun des procédures collectives est désormais constitué par le droit applicable à la sauvegarde. Ensuite, le droit du redressement judiciaire et de la liquidation renvoient, sauf exception, au droit applicable à la sauvegarde.

La procédure de sauvegarde est une procédure collective, d'insolvabilité, de faillite ou de pré-faillite mais elle a tout de même des avantages.

- Le premier de ces avantages c'est qu'elle est quand même faite pour ne pas effrayer les partenaires de l'entreprise. Ces derniers connaissent l'existence de la procédure mais, par son intitulé même, cette procédure ne doit pas effrayer les partenaires. Ainsi, les clients de l'Eurostar ont continué à prendre l'Eurostar même pendant la procédure.

- Le deuxième c'est que cette procédure est à l'initiative exclusive du chef d'entreprise. C'est lui qui a le monopole d'aller en sauvegarde ou non.

- Le troisième c'est que c'est une procédure "anti-raiders". En principe, mon entreprise, quand elle est en sauvegarde, est à l'abri de tous les prédateurs càd que j'ai le monopole de demander l'ouverture d'une procédure de sauvegarde et j'ai le monopole de proposer à mes partenaires un plan de sauvegarde.
A l'inverse, quand je dépose le bilan, je n'ai pas ces deux monopoles puisque les créanciers ou le tribunal peuvent prononcer eux-même l'ouverture d'une telle procédure. De plus, il existe des risques que des tiers se présentent au tribunal afin de proposer de reprendre l'entreprise pour la redresser. Il y a alors un risque que des tiers présentent des offres au tribunal qui vont venir en concurrence avec les offres de l'entreprise elle-même. Or ce risque n'existe pas en sauvegarde.































TITRE 1. LES ENTREPRISES CONCERNEES


Chapitre 1. L'entreprise isolée
   Section 1. Constituée par une PP
   Section 2. Constituée par une PM
Chapitre 2. Le groupe d'entreprise


Chapitre 1. L'entreprise isolée

   Section 1. Constituée par une PP


Ce peut être un commerçant, un artisan, un agriculteur ou une personne qui exerce une profession libérale.
Progressivement, la loi a étendu le champ des personnes pouvant faire une procédure collective. Au départ, seuls les commerçants PP étaient concernés. Puis, on y a ajouté les artisans et les agriculteurs. Depuis 2005, on y a ajouté les personnes exerçant des professions libérales. Depuis, des dizaine d'avocats sont en procédure de sauvegarde. 

Qui y a-t-il comme loi pour les autres PP ?
On trouve les lois successives sur le surendettement. Si on met bout-à-bout ces législations, toutes PP peut bénéficier d'une procédure collective. Le salarié peut bénéficier de la loi sur le surendettement tandis que l'artisan peut bénéficier de la procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation. Dans les deux cas, on a des PP qui ne peuvent pas payer leurs dettes et dans les 2 cas, elles vont donc bénéficier d'une procédure qui aura pour effet que les dettes impayées resteront impayées.

Ex : un commerçant PP qui a des difficultés. Comme il est commerçant PP, tous ses biens sont engagés et si vraiment il va mal tout ceci va se finir par une procédure de liquidation judiciaire. Dans ce cas, un liquidateur va tout vendre pour tenter de payer au mieux toutes les dettes. Mais généralement, il n'y a pas assez d'argent pour payer tous les créanciers. Il y a donc un différentiel et des créanciers chirographaires resteront impayées. Cela voudrait-il dire que ces restes de dettes le suivront toute sa vie ? Non. Dans une telle procédure, certains créanciers ne sont pas payés et vont restés impayés. Une fois la liquidation judiciaire finie on la clôture pour insuffisance d'actif et le commerçant peut recommencer une activité sans avoir à apurer des dettes restantes de son ancienne activité. Ce n'est pas la même chose pour une PM. Cette différence s'explique parce que la PP survit à la procédure collective et pas la PM.

   Section 2. Constituée par des PM

Ce sont toutes les PM de droit privé càd les sociétés, les associations et les GIE. Il n'y a pas à distinguer selon qu'elles sont civiles ou commerciales. Néanmoins, il y a des fois où on peut s'interroger.
Ex : La Poste est aujourd'hui une PM de droit public. Aujourd'hui, il y a un projet de transformer La Poste en SA. Dans ce cas, elle deviendra une PM de droit privé même si c'est l'Etat qui possède toutes les actions.


Dans les deux cas il y a un problème de preuve, tant pour les PP que pour les PM et notamment parce qu'une PM a fait l'objet de certaines formalités afin d'obtenir cette personnalité morale. En effet, dans la quasi-totalité des cas il faut qu'une formalité soit accomplit pour qu'un groupement bénéficie de la PM.
Pour les PP c'est plus compliqué parce qu'elles peuvent avoir une activité commerciale sans s'immatriculer.
Ex : une personne qui achète et vend tout les jours sur Ebay n'est-elle pas un commerçant ?


Chapitre 2. Les groupes d'entreprise


En principe, même au sein d'un groupe, les entreprises sont considérées individuellement. Ce sont des PP ou des PM. Au sein d'un groupe, une ou plusieurs entités juridiques peuvent avoir des difficultés et pas les autres. La procédure sera donc demandée par les unes et pas par les autres. L'activité du groupe étant répartie entité par entité cette organisation n'est pas frauduleuse.
Néanmoins, on trouve deux correctifs à ce principe :

   Section 1. La confusion des patrimoines

Quand les patrimoines sont imbriqués et dépendants, la procédure de sauvegarde concerne les deux entités. En vérité, la confusion des patrimoines concerne davantage les PM. En effet, une jurisprudence historique confirmée par la loi de sauvegarde de 2005, fait de la confusion des patrimoines un cas d'extension de la procédure de sauvegarde. Progressivement, la jurisprudence a précisé les critères de la confusion des patrimoines. Au nombre de ces critères elle a mis l'identité des dirigeants, l'identité d'actionnaires ou d'associés, l'identité de siège social, éventuellement de comptabilité unique et, en réalité, le critère qui transcende ceci c'est le critère des relations financières anormales. Ces relations financières anormales entre deux ou plusieurs sociétés contribue à la confusion des patrimoines.

Ex : une PME industrielle a besoin d'un terrain pour exercer son activité industrielle. On peut imaginer qu'à la fois les immeubles et le FDC de cette entreprise appartiennent à une seule société sauf que, de plus en plus au sein des sociétés, il est classique de mettre l'immobilier dans une société à part et de mettre l'exploitation industrielle dans une autre société. Ceci s'explique pour plusieurs raisons :
* La première explication c'est que parfois les banques qui financent l'achat et la construction de l'immeuble ne veulent pas prêter à une société qui a également une activité industrielle parce que cette dernière est souvent à risque.

* La deuxième explication c'est que, de plus en plus, les sociétés vendent leurs immobiliers à des sociétés d'immobiliers et, après l'avoir vendu, elle le prenne en location.

* La troisième explication c'est que, lorsque le fondateur va prendre sa retraite, il se peut que certains soient intéressés par l'activité professionnelle et d'autres pas. Très souvent, le ou les enfants qui veulent poursuivre l'activité vont héritier de la partie industrielle, exploitation, FDC, tandis que les autres vont hériter de la partie immobilière.

Bref, tout ceci débouche sur une dissociation de l'immeuble et de l'exploitation qu'on va loger dans deux sociétés différentes avec d'un côté une société immobilière et de l'autre une société industrielle. Mais, sachant que l'une a besoin de l'autre pour vivre, il y aura donc un bail commercial entre ces deux sociétés. Qui dit bail, dit loyer et ce n'est pas parce qu'on est au sein du même groupe que le loyer ne doit pas être un loyer normal de marché. Il n'est donc pas question pour la société immobilière de facturer un loyer trop important à la société industrielle. Imaginons que tel ne soit pas le cas et que la société immobilière facture un loyer trop important à la société industrielle et qu'il y a finalement des difficultés.

Celle qui va avoir le plus de difficultés c'est la société industrielle. Imaginons que cette dernière demande l'ouverture d'une sauvegarde. Quand le tribunal va s'intéresser à la cause de ses difficultés, il va regarder si elle est ou non propriétaire de ses immeubles. Il va voir que non donc il va regarder le propriétaire, le montant des loyers. Si ce dernier est trop élevé c'est peut-être de là que vienne les difficultés. Il y a là une relation financière anormale entre les deux sociétés.

   Section 2. La fictivité d'une société

Une société fait l'objet d'une sauvegarde mais cette dernière n'est que le "faux-né" d'une autre société. Cette société est presque fictive. Le juge va dépasser l'apparence et la fictivité pour mettre en sauvegarde également la vraie société. Il va donc montrer que la société qui est en sauvegarde n'est là que pour dissimuler les difficultés de la vraie société.

   Section 3. L'extension de la procédure de sauvegarde

Dans les deux cas, la procédure de sauvegarde va être étendue d'une société à une ou plusieurs autres sociétés qui n'ont pas besoin de remplir les conditions de la sauvegarde. Les difficultés vont s'apprécier par rapport à la société qui a demandé l'ouverture de la sauvegarde mais, par le jeu de l'extension, une ou plusieurs autres vont être attraites dans cette procédure de sauvegarde, sans avoir besoin de remplir les conditions. Il y aura néanmoins une procédure unique. Il n'y aura pas autant de procédures de sauvegarde que de sociétés concernées. Il n'y en aura qu'une qui va attraite à elle d'autres sociétés.

Pourquoi cette extension ?
Dans les deux cas d'extension (confusion des patrimoines et fictivité), la fraude n'est pas loin et notamment dans le cas de la société fictive. Dans les deux cas, il s'agit en quelque sorte de "faire coïncider l'apparence et la réalité. Il s'agit de sanctionner la fraude.

Les enjeux sont importants. En effet, si on reprend l'exemple de la société immobilière d'un côté et de la société industrielle de l'autre, celle qui va avoir des difficultés c'est la société industrielle. Ainsi, la société immobilière ne devrait pas avoir de difficultés donc elle va pouvoir garder ses actifs, ses immeubles. D'un côté on a donc une société qui a un patrimoine immobilier et de l'autre on a une société qui va tant bien que mal. Si les deux sociétés font l'objet d'une même procédure, l'effet de cette attraction c'est que les immeubles de la société immobilière vont venir enrichir les biens de la société industrielle. On fait donc revenir des immeubles dans le giron de la société industrielle.

Cette extension de procédure c'est une "extension-sanction". Mais encore faut-il qu'il y ait matière à sanction. Avant 2005, la loi avait restreint les conditions de l'extension. Il ne peut pas y avoir extension dans n'importe quelle extension, il faut que les juges argumentent pour administrer la preuve qu'il y a bien en l'espèce confusion des patrimoines ou fictivité. La jurisprudence est venue confirmer qu'il n'était pas illégale d'avoir plusieurs filiales, de mettre les immeubles d'un côté et l'industrie de l'autre, mais pour étendre la procédure de sauvegarde encore faut-il qu'il y ait entre elles des relations financière normales ou une fictivité d'une société.
A ce propos, on trouve 2 exemples :
- Métaleurope : il y a eu une demande d'extension de la liquidation de la société Métaleurope à sa société mère et à une ou plusieurs sociétés soeurs au motif qu'il y avait tout à la fois fictivité et confusion des patrimoines. Il faut voir quels étaient les enjeux. La société Métaleurope avait dû faire des centaines de licenciements. La procédure de liquidation attirait à elle d'autres sociétés qui allaient finir par licencier elles aussi. Certes, par cette extension, les actifs de ces autres sociétés venaient mais il y avait une "casse" sociale supplémentaire. En 1ère instance, l'extension avait été acceptée mais cette décision a été cassée au motif que les conditions de l'extension n'étaient pas réunies puisqu'il est normal qu'une société mère puisse avoir des filiales.
- Air lib : Cette société avait été reprise par une pilote d'Air France très largement fourni par le Ministre de l'Economie. Cette reprise se fait avec un empilement de sociétés. Cela a duré quelques mois avant qu'il fasse faillite à son tour.  On s'est alors interrogés sur les responsabilités et on s'est aperçu que dans le montage, il y avait une superpositions de sociétés. La société mère avait des difficultés mais les autres avaient beaucoup d'actifs et pas de dettes. Qu'ont fait les liquidateurs judiciaires d'Air lib ? Ils ont voulu demander l'extension de la liquidation aux autre sociétés mais, comme dans le dossier Métaleurope, cette extension leur a été refusée parce qu'il n'y avait en l'espèce ni confusion des patrimoines ni fictivité et donc il n'y avait aucune raison d'enlever des actifs appartenant à aux autres sociétés de l'organigramme. Ces autres sociétés sont donc restées en plein exercice.

Ces deux mouvements jurisprudentiels montrent que ce n'est que s'il y a vraiment confusion des patrimoines et/ou fictivité qu'il peut y avoir extension.

Ainsi, en principe, une procédure de sauvegarde concerne une entreprise isolée PP ou PM mais dans deux cas, cette procédure peut être étendue à une ou plusieurs autres société au profit d'une procédure unique.


TITRE 2. LES ASPECTS JUDICIAIRES DE LA PROCEDURE DE SAUVEGARDE


Chapitre 1. Un jugement d'ouverture


   Section 1. La compétence


    I. La compétence d'attribution

- Tout ce qui est commercial ou artisanal relève du tribunal de commerce.
Commerçant PP, artisan PP, sociétés ou, plus généralement groupements commerciaux, relèvent du tribunal de commerce.

- Tout les autres (agriculteurs, membres de profession libérale, associations non commerçantes, société civile) ne relèvent pas du tribunal de commerce mais du TGI.

La majorité des procédures se fait devant le tribunal de commerce. Le tribunal compétent l'est pour toute la procédure càd de l'ouverture jusqu'au jugement qui va décider du sort de l'entreprise. Il est également compétent pour toutes les actions en responsabilités engagées à l'occasion de la procédure collective.

En revanche, il n'est pas compétent pour tout ce qui relève des aspects pénaux de la procédure, ni pour tout ce qui relève des aspects prudhommaux, ni pour tout les contentieux qui ont été engagés avant l'ouverture de la procédure et qui, d'une manière ou d'une autre, se poursuivent même s'ils sont souvent suspendus. Dans ce cas, les tribunaux précédemment saisis restent compétents.


    II. La compétence territoriale

Ce sont les règles du droit commun qui s'appliquent : c'est le siège de l'entreprise qui définit la compétence du tribunal. En principe, le siège est le siège social statutaire qui figure au RCS mais si ce siège social est fictif, le tribunal compétent sera celui du siège social réel.

Est-il possible d'ouvrir en France une procédure collective relative à une société étrangère ?
La réponse est oui, notamment en application du Règlement européen de 2000, qui précise qu'il faut mais qu'il suffit que le centre des intérêts principaux de l'entreprise étrangère soit en France. C'est la "problématique du COMI". Ceci explique pourquoi les sociétés anglaises d'Eurotunnel se sont vues ouvrir une sauvegarde à Paris parce que leur COMI (centre des intérêts principaux) a été reconnu comme étant situé en France en général et à Paris en particulier.

Il y a avant tout un intérêt économique à cela : l'idée c'est qu'il faut le moins de voies de recours possibles pour que la décision du tribunal destinée à mettre fin aux difficultés de l'entreprise soit prise le plus rapidement possible et qu'elle soit exécutoire le plus vite possible. Il est clair que si un plan de sauvegarde est décidé par le tribunal et qu'un appel contre le jugement homologuant le plan est recevable et si ensuite l'est tout autant un pourvoi en cassation, lorsque le jugement sera définitivement confirmé, il se sera passé entre 2 et 4 ans et l'entreprise sera définitivement morte.

   Section 2. La saisine même du tribunal

En matière de sauvegarde, le débiteur a le monopole de la demande d'ouverture. Il n'y a pas de concurrence de la part des créanciers, du tribunal, du procureur, ...
Si l'entreprise est une PP, c'est cette dernière qui demande l'ouverture. Si c'est une PM, c'est le représentant de cette entreprise qui la demande.

On verra que dans les autres procédures que sont le redressement et la liquidation, le débiteur n'a pas le monopole puisque d'autres personnes reçoivent ce même droit.

Comment les choses se passent-elles pour une demande d'ouverture de sauvegarde ?
1. Il y a dépôt de cette demande au greffe du tribunal. Judiciairement parlant, il s'agit d'une requête càd d'une demande unilatérale sans contradicteur. Cette requête expose les difficultés auxquelles l'entreprise est confrontée et, plus généralement, les raisons pour lesquelles elle demande l'ouverture d'une procédure de sauvegarde. Cette demande doit être accompagnée d'un grand nombre d'éléments notamment économiques, comptables et financiers.

Les éléments suivants sont les plus importants : l'entreprise qui demande l'ouverture de sauvegarde ne doit pas être en état de cessation de paiement donc les documents annexés à la requête doivent notamment montrer que la société n'est pas en état de cessation de paiement et, qu'en principe, elle ne se trouvera pas dans cet état après l'ouverture de la procédure.

2. Le dépôt de cette requête au greffe est suivi d'une audience en Chambre du conseil c’est à dire à huit-clos.
A l'audience sont présents :    
- l'entreprise et ses dirigeants sont présents
        - le procureur de la République,
        - et, dans certaines conditions, les représentants des salariés,

3. Cette audience débouche sur un jugement.

Que peut décider le tribunal ainsi saisi ?
Il a plusieurs possibilités :
- il accède à la demande de sauvegarde en ouvrant une procédure de sauvegarde. Les jugements d'ouverture sont exécutoires de plein droit le jour de leur prononcé, à 00h,
- il rejette la demande au motif que :
    * l'entreprise ne relève plus de la sauvegarde parce qu'elle est déjà en état de cessation de        paiement,
    * l'entreprise qui a fait état de difficultés ne va pas finalement pas si mal que ça et n'a pas de       raisons de bénéficier d'une telle procédure.
Cette seconde raison est néanmoins moins crédible car ce n'est jamais de gaîté de cœur qu'un dirigeant demande l'ouverture d'une procédure de sauvegarde donc il est très rare que le tribunal refuse pour ce motif.

Néanmoins, quand une procédure collective est ouverte, il y a un effet automatique qui est l'interdiction de payer ses créanciers. La procédure de sauvegarde est faite pour permettre au débiteur de trouver une solution à ses difficultés et cela va passer dans un premier temps par un arrêt des paiements des créanciers. Or, c'est peut-être une des perversités de l'ordonnance de 2008 applicable au 15 janvier 2009. Avant cette date, la condition d'ouverture de cette procédure était d'avoir des difficultés de nature à conduire l'entreprise à un état de cessation de paiement. Qu'a voulu le gouvernement ? Il a voulu que la procédure de sauvegarde soit plus largement ouverte aux entreprises, qu'elles en bénéficient et qu'elles la demande davantage. Désormais, la seule condition pour être éligible à la sauvegarde c'est d'avoir des difficultés, sans faire référence à un éventuel état de cessation de paiement. Il n'est donc plus nécessaire que l'entreprise explique que ses difficultés sont de nature à ce que tôt ou tard elle soit en état de cessation des paiements. On a donc ouvert le risque que cette procédure soit instrumentalisée pour nuire aux créanciers.

- le tribunal peut désigner un expert à charge de lui fournir un rapport avant de se prononcer sur l'ouverture de la sauvegarde.

La sauvegarde est donc désormais décorélée de la notion de cessation de paiement. Il n'en demeure pas moins que le tribunal pourrait s'être trompé càd avoir ouvert une sauvegarde et s'apercevoir par la suite que l'entreprise était déjà en état de cessation de paiement. Dans ce cas, le tribunal va convertir la procédure de sauvegarde en procédure de redressement ou de liquidation. De même, si l'entreprise tombe en état de cessation de paiement pendant la période d'observation (càd la période qui suit le jugement d'ouverture), il pourra y avoir une conversion.

Une entreprise ne peut être soumise à une seule procédure collective à la fois. Il faut donc connaitre la situation procédurale de l'entreprise par rapport à une précédente procédure collective. Soit elle n'a pas fait l'objet antérieurement d'une procédure collective, soit elle a déjà fait l'objet d'une telle procédure et elle doit en être sorti. Ainsi :
-  si elle fait l'objet d'une sauvegarde, elle doit avoir exécuté son plan de sauvegarde,
- si elle a fait l'objet d'un redressement, elle doit avoir exécuter son plan de redressement,
- si elle a fait l'objet d'une liquidation, celle-ci doit avoir été clôturée.
03.03.09


Chapitre 2. Les organes de la procédure


Le tribunal va être au moins saisi à deux reprises : lorsqu'il ouvre la procédure et lorsqu'il se prononce sur les solutions au regard des difficultés de l'entreprise càd lorsqu'il va se prononcer sur le plan de sauvegarde. Entre ces deux temps, il existe une période d'observation. Dans cet entretemps, un travail important va se faire sous l'égide du tribunal. Ce dernier va déléguer un de ses membres pour participer, contrôler, surveiller ce travail. On l'appelle le "juge-commissaire". Par ailleurs, le tribunal va nommer des professionnels des difficultés de l'entreprise qu'on appelle selon les cas "administrateurs judiciaires" ou "mandataires judiciaires".


   Section 1. La fonction du juge-commissaire.

C'est un juge du tribunal. Il est en charge de la procédure pendant toute la période de la procédure. C'est l'interlocuteur de l'entreprise. Il va guider l'entreprise en sauvegarde. Aucune décision n'est prise par le tribunal sans un rapport préalable du juge-commissaire. Au-delà de ce rôle général, il a des fonctions juridictionnelles. Il statut par ordonnance après avoir été saisi sur requête. L'administrateur judiciaire va saisir sur requête le juge-commissaire qui va rendre une ordonnance qui est une véritable décision de justice, ordonnance selon les cas, insusceptible d'appel et plus généralement insusceptible de recours ou à l'inverse, susceptible de recours selon les cas devant le tribunal lui-même ou devant la CA. Les contrôleurs sont nommés par ordonnance du juge-commissaire.

Sur quels points le juge-commissaire se prononce-t-il par ordonnance ?
- Il se prononce sur les créances déclarées par les créanciers antérieurs. Lorsqu'une société fait l'objet d'une procédure collective, pour sauvegarder leurs droits, les créanciers des entreprises doivent déclarer leurs créances dans certaines conditions notamment de délais. Cependant, il y a des personnes qui se prétendent créanciers alors qu'elles ne le sont pas. Il va donc y avoir un contrôle sur les déclarations de créances. Ce contrôle est en quelque sorte l'oeuvre du juge-commissaire qui va se prononcer créancier par créancier sur l'existence des créances. Il contribue à la photographie du passif de l'entreprise.
- Si des licenciements sont nécessaires pendant la période d'observation, ceux-ci sont proposés par l'administrateur judiciaire et autorisés par le juge-commissaire.

On reconnaît donc 2 types de fonctions : une fonction très générale de surveillance, d'interface entre l'entreprise et le tribunal, d'interface entre les autres organes de la procédure et le tribunal et une fonction juridictionnelle.

   Section 2. L'administrateur judiciaire

Jusqu'en 1985, il existait des professionnels qu'on appelait des "syndics de faillite" qui géraient les entreprises en difficulté et, s'il y a lieu, les liquidaient, ... En 1985, la profession de syndics de faillite a été éclatée en deux professions et une des professions héritière c'est la profession d'administrateur judiciaire.

On l'appelle "administrateur" parce qu'il va contribuer à l'administration de l'entreprise qui a des difficultés et on dit qu'il est "judiciaire" parce qu'il est désigné par la loi.

Un administrateur judiciaire est quelqu'un qui exerce une profession règlementée et qui à ce titre est inscrit sur une liste nationale d'aptitude, qui a en principe une vocation nationale mais dont on constate qu'il exerce essentiellement ses fonctions auprès d'un ou plusieurs tribunaux plus ou moins proches.

Sa désignation par le tribunal n'est obligatoire que lorsque l'entreprise atteint certains seuils (au moins 3.000.000 € de chiffre d'affaires et au moins 20 salariés). A ce propos, il arrive que pour les grandes entreprises, plusieurs administrateurs judiciaires puissent être nommés. De même, si les seuils ne sont pas atteints, un administrateur peut être nommé même si ce n'est pas obligatoire.

A quoi sert sa nomination ?
Cela sert à une certaine administration de l'entreprise. Il peut se voir confier 3 types de missions :
- une mission de surveillance. Dans certains cas, il se contente de surveiller la gestion de l'entreprise. Celle-ci reste donc aux mains de ses dirigeants de droit. Ce sont les dirigeants de droit qui continuent de gérer l'entreprise. Ils ne sont pas dépossédés de leurs pouvoirs, l'administrateur judiciaire se contentant de surveiller la gestion.

- une mission d'assistance. Cela signifie que l'entreprise est de fait dirigée par ses dirigeants normaux mais un système de double signature se met en place pour les actes les plus graves.

- une mission de représentation. Cela revient à dire que l'administrateur judiciaire devient en quelque sorte le nouveau mandataire social de l'entreprise à la place des anciens dirigeants.

En matière de sauvegarde, la mission de l'administrateur est en principe une simple mission de surveillance. Cela va de paire avec sa mission anti-raider. En effet, il y a une réticence de certaines entreprises à aller au tribunal pour demander l'ouverture d'une procédure de sauvegarde. Donc, pour qu'un chef d'entreprise ne craigne pas d'aller en justice, trois protections ont été mise en place pour le rassurer :
* le chef d'entreprise a seul le pouvoir de demander l'ouverture d'une procédure.
* il n'a pas à craindre de raid de la part de concurrent.
* il conserve tous ses pouvoirs. Il met donc son entreprise sous couvert du tribunal mais globalement c'est toujours son entreprise.

Mais, comme le juge-commissaire, l'administrateur a également des pouvoirs propres qui sont des pouvoirs énumérés, qui n'appartiennent qu'à lui, qu'il exerce selon les cas soit seul, soit sous le contrôle du juge-commissaire ou du tribunal. Il s'agit de pouvoirs propres càd de pouvoirs définis par la loi, qui sont relatifs à des actes graves qui vont échapper aux pouvoirs des dirigeants de l'entreprise. Parce qu'il s'agit d'actes graves, ces pouvoirs sont transmis à l'administrateur judiciaire.
Ainsi, lorsqu'une procédure collective est ouverte, les créanciers antérieurs ne peuvent plus être payés. Il y a une interdiction de payer les créanciers antérieurs.

Pourtant, dans certaines circonstances, il faut payer certains créanciers antérieurs parce qu'il en va de la santé de l'entreprise. Pour cet acte grave, c'est l'administrateur qui va avoir le droit de payer les créanciers.

Ex : j'ai une entreprise de transport d'urgence. J'ai deux ambulances au garage. L'entreprise n'a pas le droit de payer puisqu'elle est en sauvegarde. Mais, comme le garagiste a un droit de rétention, il va décider de retenir les ambulances. Lors d'une procédure de sauvegarde, l'entreprise continue son exploitation mais elle ne peut pas le faire totalement puisque des ambulances sont au garage. Ainsi, pour le bien de l'entreprise, il va falloir payer le garagiste pour que l'activité puisse continuer au mieux. C'est l'administrateur judiciaire qui va donc user de son pouvoir exceptionnel pour payer ce créancier antérieur.

Il n'y a matière à administrateur judiciaire que si l'activité continue ce qui est le cas dans la procédure de sauvegarde.

   Section 3. Le mandataire judiciaire

C'est lui aussi un des héritiers de la profession de syndics. D'ailleurs ce syndic a progressivement changé de nom puisque, sous la loi de 1985 il a été appelé le "représentant des salariés" et, aujourd'hui, on l'appelle le mandataire judiciaire.

Quel est son rôle ?
L'appellation antérieure était très parlante. Ce mandataire a en effet la mission de représenter les créanciers du débiteur et l'expression de "procédure collective" prend de nouveau tout son sens. En effet, une procédure collective envisage globalement la problématique des créanciers. Chaque créancier conserve ses droits, mais ils n'ont plus le droit de l'exercer.

Il a donc un rôle déterminant par rapport aux créanciers de l'entreprise et c'est notamment entre les mains du mandataire judiciaire que les créanciers doivent déclarer leurs créances.
Ex : un fabriquant de téléviseur fait l'objet d'une procédure de sauvegarde. J'ai acheté un téléviseur il y a quelques mois qui est toujours sous garantie. A titre conservatoire, je dois déclarer ma créance potentielle à l'égard du fabriquant.

Ainsi, on voit bien qu'un mandataire peut recevoir des centaines, voire plusieurs milliers de demande et vérifier par la suite que ces créances existent bien.

Au stade de la sauvegarde est nommé un mandataire judiciaire chargé de représenter les créanciers. On va également le trouver dans les mêmes termes en cas de redressement judiciaire et c'est d'ailleurs cette même personne qui, en liquidation judiciaire, tiendra lieu de liquidateur.

Il y a toujours un mandataire judiciaire.

   Section 4. Le ou les représentants des salariés

Ce représentant est élu ou nommé soit par le comité d'entreprises soit par les délégués du personnel. C'est généralement le premier organe nommé. En effet, les organismes représentatifs du personnel doivent être informés en premier. Ainsi, avant d'aller déposer la demande de sauvegarde, le chef d'entreprise va réunir les représentants du personnels pour leur annoncer sa décision. D'ailleurs, souvent à l'audience d'ouverture d'une procédure de sauvegarde le représentant des salariés est présents. Ils sont présents à toutes les étapes de la procédure. Ils ont à titre principal un rôle d'avis et ils ont même dans certains cas le droit de faire des recours.


   Section 5. Le Ministère public


L'histoire du droit des entreprises en difficultés c'est l'histoire d'un rôle progressivement accru du parquet à l'occasion des procédures collectives devenu, au fil des années, de plus en plus important. En effet, le Ministère public est garant de l'ordre public. Son rôle s'explique parce qu'une partie de l'économie se joue pendant les procédures collectives.
La grande majorité des procédures collectives est traitée par les tribunaux de commerce. Or, ces derniers sont rendus par des juges non professionnels mais qui sont élus par leurs pairs et qui siègent bénévolement dans les tribunaux de commerce. Le grand avantage de ce mode de recrutement et de fonctionnement c'est que les juges de ces tribunaux sont très proches du milieu des affaires et toutes ces problématiques leurs sont très familières ce qui est moins le cas des juges judiciaires.

Ces justices consulaires sont souvent critiqués parce qu'il est arrivé, dans un passé révolu, qu'il y ait des dérives dues à leur trop grande proximité avec ce monde des affaires. De ce fait, un échevinage avait été envisagée càd de faire des tribunaux composé pour partie de juges élus et pour une autre partie de juges consulaires. La contrepartie c'est que si les tribunaux de commerce ont continué à fonctionner avec des juges consulaires, le Ministère public a vu son rôle renforcé.  Le procureur de la République et son représentant ont donc de plus en plus de pouvoirs.
Lui aussi a un pouvoir d'avis à chaque étape de la procédure. Ce n'est qu'un avis du parquet mais le tribunal doit lui demander son avis.

De plus, outre son pouvoir d'avis général, le Ministère public a des pouvoirs propres :
- Le pouvoir d'exercer des voies de recours. En effet, certains recours ne sont ouverts qu'au parquet. C'est l'organe de la procédure qui a le maximum de voies de recours à sa disposition.
- La période d'observation a en principe une durée maximum de 12 mois mais parfois il peut y avoir une prolongation de 6 ultimes mois à la demande exclusive du parquet. Ainsi, si le parquet ne les demande pas, l'entreprise ne pourra pas en bénéficier. Néanmoins, si le parquet les demande, le tribunal ne va pas forcément les accorder.
- De plus, l'entreprise peut avoir fait l'objet d'une autre procédure de prévention (mandat ah hoc ou conciliation). Il est alors possible que le mandataire ad hoc ou le conciliateur continu le dossier. A l'inverse, on peut estimer que si les procédures précédentes n'ont pas abouties, c'est peut-être parce que le mandataire ad hoc ou le conciliateur n'a pas réussi. A ce propos, le Ministère public peut exercer un droit de véto à l'égard des anciens mandataires ad hoc ou conciliateurs.


   Section 6. Les contrôleurs

Il s'agit de personnes, créanciers de l'entreprise qui vont être nommées au fonction de contrôleur pour contrôler la procédure collective, en qualité de créancier. Ces créanciers doivent en faire la demande. C'est le juge-commissaire qui les désigne. Généralement, parmi les demandes qui lui sont faite, il sélectionne des créanciers chirographaires, privilégiés, des banquiers, des fournisseurs, l'URSAFF, ... Bref, le juge-commissaire nomme parmi les créanciers de 1 à 5 contrôleurs. Les contrôleurs ne peuvent pas être contrôleurs et avoir un intérêt indirect à la difficulté de l'entreprise càd que le contrôleur ne pourra pas être repreneur de l'entreprise même si cette solution n'est pas possible en matière de procédure de sauvegarde. En effet, il y aurait un risque de conflit d'intérêt. A chacune des étapes de la procédure, une série de personnes doit donner son avis et c'est le cas des contrôleurs.



TITRE 2. LA PERIODE D'OBSERVATION


La période d'observation c'est la période qui va se situer entre le jugement d'ouverture et le jugement qui tentera de donner une solution aux difficultés de l'entreprise. Une période va s'écouler entre le moment d'ouverture de la procédure et le moment de présentation du plan de sauvegarde.
Cette période a une durée initiale de 6 mois, susceptible d'être prolongée une nouvelle fois de 6 mois et, à la demande du procureur, une nouvelle période de 6 mois peut être accordée.

Cette période de 6+6+6 s'applique à la procédure de sauvegarde et de redressement mais pas à la procédure de liquidation.

Il va s'agir de mettre à profit ce délai pour bâtir un plan de sauvegarde mais, dans le même temps "la vie continue", l'entreprise continue son activité.


Chapitre 1. La poursuite de l'activité


L'entreprise a des difficultés mais elle n'est pas en état de cessation de paiement. Elle a donc une activité et cette activité n'est surtout pas interrompue par l'ouverture de la procédure de sauvegarde.
Juridiquement, l'activité n'est pas stoppée mais il n'est pas certain que les clients ni même que les fournisseurs gardent leur confiance dans l'entreprise.
Ex : si Eurotunnel n'a pas payé son électricité, est-ce que EDF va vouloir continuer à fournir de l'électricité dans le tunnel ?

Précisément, parce que les créanciers antérieurs sont interdits de paiement, il est clair que les créanciers, et notamment les fournisseurs, n'accepteront de continuer à travailler avec l'entreprise que s'ils sont sur d'être payés.
Ex : paiement au "cul du camion" (càd à la livraison) ou à la commande.
L'activité doit se poursuivre malgré ces blocages liés à l'interdiction des paiements.

Autres observations :
- Par hypothèse, l'entreprise a des difficultés et surtout des difficultés de trésorerie. Comment va-t-elle faire pour poursuivre son activité par résolution de ses difficultés de trésorerie ? L'argent dû à l'entreprise doit lui être payé, et comme ses débiteurs doivent payer elle va pouvoir obtenir des paiements. C'est donc un bon moyen pour reconstituer une trésorerie puisque je vais vendre des marchandises que je n'ai pas payé, mais je vais les facturer à mes clients.

- Il faut continuer son activité mais cette activité ne doit pas être déficitaire ! Je n'ouvre pas une procédure collective pour rajouter des dettes. Va donc se poser la question du financement de la période d'observation. Il n'est pas question que la société se crée de nouvelles dettes, elle doit équilibrer son exploitation, sinon elle part en liquidation.
09.03.09

   Section 1. Les aspects administratifs de la période d'observation


    I. La gestion de l'entreprise elle-même

Les dirigeants de l'entreprise en sauvegarde conservent leurs pouvoirs sauf pour certains actes qui leur sont soit interdits soit qui relèvent désormais de l'administrateur judiciaire et/ou du juge-commissaire. Généralement, l'administrateur n'a qu'une mission de surveillance.

Parmi les actes interdits, on trouve le paiement des créanciers antérieurs. Ces derniers ne peuvent plus être payés par le débiteur. Cette interdiction est pénalement sanctionnée. Pour le reste, ils conservent toutes leurs prérogatives dans la limite des pouvoirs donnés aux autres organes de la procédure (ex : le droit de licencier). Ces autres pouvoirs ne sont plus de la seule responsabilité du chef d'entreprise suite à une décision du juge-commissaire à la demande de l'administrateur.

De la même manière, le jugement d'ouverture va "figer" la composition du patrimoine de l'entreprise. Ainsi, le chef d'entreprise ne peut plus vendre, en principe, les actifs de l'entreprise. Ici, nous ne parlons pas des "actifs circulant" car il est évident que si, par exemple, un débiteur de boissons ne pouvait plus vendre de boissons sans l'accord du juge-commissaire, de l'administrateur judiciaire, ... la poursuite de l'activité serait grandement compromise.

A retenir : le chef d'entreprise garde quasiment tous ses pouvoirs.


    II. La problématique des contrats en cours

Une entreprise est partie à un grand nombre de contrats : contrats conclus avec des fournisseurs, des prestataires, des clients, des contrats de bail, ...
Quand le jugement d'ouverture va être rendu, il va l'être à un moment où l'entreprise est partie à un grand nombre de contrats. Certains peuvent avoir pris fin avant l'ouverture de la procédure, que cette fin soit naturelle ou pas (ex : l'entreprise n'ayant pas payé toutes ses dettes, le fournisseur a demandé la résiliation du contrat).

La question est de savoir ce que deviennent ces contrats par l'effet du jugement d'ouverture ?
Dans la mesure où l'activité continue et doit continuer, on comprend que le principe est celui du maintien des contrats en cours nonobstant le jugement d'ouverture. La loi va même plus loin puisqu'elle répute non écrite toute clause qui prévoirait la résolution ou la résiliation du contrat en cas d'ouverture de procédure collective. On comprend l'existence de telles clauses. On peut même dire qu'il s'agit d'une stipulation d'ordre public qui s'applique même si le contrat est soumis à un droit étranger.

Si on se met à la place du cocontractant :
Ex : le bailleur n'a pas été payé de tous ses loyers parce que, comme l'entreprise a des difficultés, elle a demandé des délais de paiement à ce bailleur (il ne faut jamais oublié que l'entreprise ne doit pas être en état de cessation des paiements, c'est pour cela qu'on dit qu'un délai a été accordé). Le bailleur est "planté" càd qu'il ne peut plus être payé de ce qui lui est dû antérieurement. La clause qui prévoirait que le bail est résilié ou résolu du fait de l'ouverture d'une procédure collective est nulle. En effet, l'important c'est que l'activité continue et pour cela il faut que les contrats continuent.

Qu'appelle-t-on un contrat en cours ?
C'est un contrat qui n'a pas totalement pris fin avant le jugement d'ouverture. Ce contrat peut avoir pris fin par l'arrivée du terme (c'était un contrat à durée déterminée), ou par une décision de justice qui en prononce la fin. Ces derniers contrats sont écartés car, par définition, ils ne sont pas en cours.

Pour ce qui est des contrats en cours :
Ex : l'entreprise avait emprunté auprès de son banquier 1.000.000€ et elle remboursait 20.000€ par mois sur la durée. En cours de remboursement, l'emprunteur fait l'objet d'une procédure de sauvegarde. S'agit-il ou non d'un contrat en cours ? Ce contrat avait-il pris fin avant le jugement d'ouverture ? Non, il aurait pris fin si le débiteur avait payé toutes les échéances. Dans cet exemple, si ce contrat en cours se poursuit, càd si l'emprunteur qui est en procédure de sauvegarde doit continuer à payer son banquier, on pourrait se demander à quoi sert la sauvegarde car cela signifierait que le débiteur doit continuer à payer ses dettes.

Ainsi, on voit qu'il y a plusieurs types de contrats en cours. Ici, ce qui va nous intéresser ce sont les contrats dont le cocontractant du débiteur n'a pas totalement exécuté ses obligations. Ceci exclut le contrat de prêt de cette notion spécifique de contrat en cours. En effet, dans cette hypothèse, le cocontractant du débiteur a intégralement versé les sommes qu'il s'était engagé à prêter, donc il a effectué l'intégralité de ses obligations et c'est alors au débiteur d'exécuter les siennes puisqu'il doit rembourser.

A l'inverse, le contrat de bail est un contrat en cours mais le bailleur n'a pas encore intégralement exécuté ses obligations puisqu'elles consistent à mettre les lieux à la disposition du locataire. Ainsi, ses obligations vont durer autant de temps que va durée la location.

Il y a bien deux catégories de contrats en cours :
- ceux où le cocontractant a exécuté l'intégralité de ses obligations contractuelles. Ces contrats ne nous intéressent pas.
- ceux où le cocontractant n'a pas exécuté l'intégralité de ses obligations contractuelles. Dans ce cas, l'entreprise peut toujours avoir besoin de son contrat.
Ex : je suis locataire, je rentre en sauvegarde, j'ai besoin de conserver l'immeuble pour continuer mon activité donc il est important que ce contrat ne soit pas résolu de plein-droit parce que j'en ai besoin.

Ces contrats se poursuivent en principe de plein droit malgré le jugement d'ouverture d'une sauvegarde parce qu'a priori l'entreprise a besoin de la poursuite de ces contrats.

Néanmoins, l'ouverture de la procédure collective est d'abord une espèce d'électrochoc pour le cocontractant qui se demande ce qu'il va devenir du contrat et, d'autre part, il n'est pas certain que l'entreprise qui est en sauvegarde ait besoin à l'avenir de tous ses contrats en cours. Peut-être que l'ouverture d'une telle procédure est l'occasion de faire le tri parmi les contrats. Or, ce tri ne peut se faire que si est posé le principe de la poursuite des contrats.

A retenir : le principe de la poursuite des contrats, et un tri peut être effectué entre ces derniers.
Comment combiner tout cela càd l'intérêt de l'entreprise et l'intérêt des cocontractants ?
- D'un côté, le cocontractant d'un contrat en cours a le droit de mettre en demeure l'administrateur judiciaire de se prononcer sur la poursuite ou non du contrat. L'administrateur judiciaire a un délai d'un mois pour se prononcer.
Dans ce délai, soit :
- l'administrateur se prononce explicitement pour la poursuite du contrat,
- l'administrateur se prononce pour la fin du contrat,
- l'administrateur ne répond pas et il est présumé avoir renoncé à la poursuite du contrat.

Dans cette hypothèse c'est le cocontractant qui prend l'initiative d'interroger la procédure collective sur la poursuite ou non du contrat. On ménage ses intérêts, l'incertitude ne peut pas durer trop longtemps.

- D'un autre côté, l'entreprise qui est en sauvegarde va en profiter pour faire le tri parmi les contrats en cours. Il y a peut-être, en effet, des contrats conclus et toujours en cours qui ne sont plus utiles pour l'entreprise ou qui, par exemple, sont trop onéreux pour l'entreprise. Dans ce cas, c'est l'administrateur judiciaire qui va prendre l'initiative de demander au juge-commissaire de prononcer la résiliation des contrats.

Si aucune initiative n'est prise ni par le cocontractant ni par l'administrateur judiciaire, le contrat en cours se poursuit.

Que veut dire "le contrat se poursuit" ?
Un contrat en cours est un contrat dont le cocontractant du débiteur n'a pas effectué l'intégralité de ses obligations. Quel est le régime juridique des contrats en cours après l'ouverture d'une procédure collective ?
Ex : si le contrat de bail se poursuit, la principale question qui se pose est de savoir ce qu'il en est des loyers postérieurs. Puisque le bailleur continue de mettre à la disposition les locaux, l'entreprise doit continuer à exécuter ses obligations càd qu'elle doit continuer de payer ses nouveaux loyers.

Ex 2 : A l'inverse, dans le contrat de prêt qui ne correspond pas à la définition de contrat en cours comme nous l'avons définit, l'entreprise arrête de rembourser la banque.

Ainsi, quand l'administrateur va se prononcer sur la poursuite des contrats, la première question qui va se poser est de savoir si le contrat est toujours utile pour l'entreprise et la deuxième question est celle de savoir si l'entreprise a les moyens de continuer le paiement du contrat.
Ex : les loyers qui continuent constituent pour le bailleur des créances postérieures qui doivent être payées par le débiteur. Alors que, à l'inverse, les créances antérieures qui sont nées avant l'ouverture de la procédure de sauvegarde ne peuvent pas être payées en vertu du principe de l'interdiction de paiement des créanciers antérieurs.

Ex : une entreprise est locataire, elle n'a pas payé les 3 derniers loyers, elle fait l'objet d'une procédure de sauvegarde. S'agit-il d'un contrat en cours ? Oui. Correspond-il à la définition des contrats en cours que nous avons retenu ? Oui. Donc, si le contrat continu, c'est que l'administrateur judiciaire a jugé que le contrat était nécessaire à la poursuite de l'activité et que le locataire était capable de payer les futurs loyers.
Le bailleur peut-il être payé des loyers des 3 derniers mois ? Non, car c'est une créance antérieure. Mais, si le contrat est poursuivi, le propriétaire va percevoir de nouveau les loyers dus après le jugement d'ouverture.

A retenir : le contrat qui est poursuivi se continu dans toutes ses dispositions ce qui signifie que, pour les sommes dues après le jugement d'ouverture, celles-ci doivent être payées. Pendant la période d'observation l'entreprise doit être capable d'assumer ses charges de gestion, c'est pourquoi elle doit être capable de payer ses nouveaux fournisseurs, ses salariés, etc. L'entreprise doit être capable de payer toutes ses charges d'exploitation de la période d'observation et non pas ses charges antérieures.

En revanche, tous les créanciers antérieurs, dans un premier temps, ne peuvent plus être payés.
Ceci constitue le régime de principe de droit commun. Certains contrats ont néanmoins un sort particulier comme c'est le cas des contrats de travail qui, plus que tous autres, vont se poursuivre. Le contrat de bail connaît néanmoins certains détails spécifiques car le bail est très important pour la poursuite de l'activité.


   Section 2. Les aspects patrimoniaux de la période d'observation


Qu'en est-il de l'argent, des flux financiers, pendant la période d'observation ?
Pendant la période d'observation, l'entreprise doit être capable de payer ses charges d'exploitation. L'entreprise ne peut pas créer de nouveaux passifs mais, en principe, elle devrait y arriver en application du principe selon lequel les anciens créanciers ne sont plus payés.


    I. Le financement de la période d'observation


Ex : un fournisseur d'entreprise qui, compte tenu de la qualité et/ou de l'ancienneté de la relation a accepté de n'être payé qu'à 90 jours (c'est ce qu'on appelle un "crédit-fournisseur"). Ce client fait l'objet d'une procédure de sauvegarde mais le client a besoin de ce fournisseur pour continuer son activité donc il faut concilier le fait de ne pas payer les créanciers antérieurs avec le fait de permettre à l'activité de continuer.

Pour cela, la loi a créé un privilège pour les créanciers postérieurs. C'est un nouveau privilège légal. Pour éviter à l'entreprise de créer de nouveaux passifs pendant la période d'observation, donc pour donner l'assurance aux partenaires de l'entreprise qu'ils seront bien payés, la loi pose par principe que les créanciers postérieurs doivent être payés au comptant. Cela signifie qu'un fournisseur, s'il accepte de continuer de faire affaire avec l'entreprise malgré la procédure et malgré les précédant impayés, il ne doit avoir aucun problème de paiement par la suite puisqu'il sera payé au comptant. Néanmoins, l'entreprise peut avoir besoin de certains délais de paiement et notamment de la part des fournisseurs. D'abord, rien ne peut être imposé aux créanciers postérieurs. Si ce dernier accepte un délai de paiement, alors le privilège prend tout son sens. En effet, que se passe-t-il si ce créancier postérieur qu'est le fournisseur livre la marchandise le 1er janvier mais qu'il n'est payé que le 28 février ? Pour ces entreprises qui font crédit pendant cette période d'observation, la loi a créé ce nouveau privilège.

De même, si l'entreprise a besoin de s'endetter pendant la période d'observation et qu'elle trouve une banque qui accepte de lui prêter alors qu'elle fait l'objet d'une procédure collective, quelle garantie a la banque d'être remboursée ? Aucune, sauf que le législateur a créé ce privilège.

Ce privilège, entre 1985 et 2005 était appelé "le privilège de l'article 40" et que l'on appelle désormais le "privilège de l'article L.622-17".

Cela signifie que le créancier postérieur qui consent des délais de paiement ou qui prête de l'argent à l'entreprise, voit sa créance garantie par ce nouveau privilège. Ces créanciers postérieurs seront, en effet, payés en priorité. Ils ne sont néanmoins pas au premier rang puisqu'ils passent après le super privilège des salariés, après le privilège de new money, ... Ce privilège s'exercera principalement dans le cadre d'une liquidation. Ainsi, ils ont quand même plus de chances d'être payés même s'ils n'ont pas la certitude absolue de l'être.

Est-ce que tous les créanciers postérieurs ont le droit à ce privilège ?
Non, car la loi est venue définir ce bénéfice.  Les créances doivent être :
    - nées postérieurement à l'ouverture de la procédure,
    - nécessaires aux besoins de celle-ci,
    - créées en contrepartie d'une prestation fournie à l'entreprise en procédure collective.

Cela repose une nouvelle fois la question de faire un vrai clivage entre créances antérieures et créances postérieures.
Ex : le contrat de bail commercial de 9 ans ferme. Au cours de la 3ème année, le locataire a des difficultés et il fait l'objet d'une procédure collective. Les 3 loyers impayés constituent des créances antérieures. Le contrat de bail se poursuit et les loyers postérieurs doivent désormais être payés si le contrat de bail se poursuit. Ceci signifie que si par hasard un des loyers postérieurs n'était pas payé, il bénéficierait du privilège de l'article L.622-17. Cela étant, il s'agit bien de créances postérieures. Pourtant, ces créances sont issues d'un bail conclu antérieurement donc ne pourrait-on pas dire que toutes ces créances sont antérieures puisque la source des nouveaux loyers reste antérieure ?

Imaginons que le contrat de bail se poursuive pendant 1 an après l'ouverture de la procédure collective et qu'on se rende compte que le loyer est trop cher. Le juge-commissaire et l'administrateur judiciaire sont d'accord pour mettre fin à ce contrat. Néanmoins, le propriétaire s'était engagé pour 9 ans ferme, il aurait donc droit à titre de dommages-intérêts à 5 ans de loyers. D'un côté, on pourrait dire que cette créance de dommages-intérêts naît au bout de 5 ans après le début du bail, mais d'un autre côté, on pourrait également dire que cette créance est née dès la conclusion du bail 5 ans plus tôt.
S'il s'agit d'une créance antérieure, elle ne peut pas être payée, mais s'il s'agit d'une créance postérieure, cette dernière ne doit-elle pas être payée et bénéficier du privilège de l'article L.622-17 ?
Dans ce cas, la loi vient dire que cette créance de dommages-intérêts est traitée comme une créance antérieure càd qu'elle ne peut en principe pas être payée ni bénéficier du privilège.

A retenir : les créanciers postérieurs sont en principe payés au comptant et, si ce n'est pas le cas, ils bénéficient du privilège de l'article L622-17. C'est ce qui permet à l'entreprise de continuer son activité avec la confiance de ses fournisseurs.

10.03.09

    II. Les créanciers antérieurs

Par l'effet du jugement d'ouverture, les créanciers antérieurs n'ont plus le droit de recevoir de paiements, le débiteur n'a pas le droit de les payer. Cette interdiction est pénalement sanctionnée. Cette interdiction s'explique pour plusieurs raisons.
D'abord, si une procédure de sauvegarde est ouverte c'est que le débiteur a des difficultés. S'il doit continuer à payer tout ce qu'il doit, ses difficultés vont empirer.
Ensuite, l'interdiction des paiements des créances antérieures permet à la trésorerie de se reconstituer.
Enfin, cette interdiction souligne l'aspect collectif de la procédure.

Ainsi, en premier lieu, l'ouverture d'une procédure marque une interdiction de paiement des créanciers antérieurs. Cependant, ces créanciers antérieurs devront être tôt ou tard payés, notamment dans une procédure qui a pour objectif la sauvegarde ou le redressement de l'entreprise. Il y a donc le préalable de savoir quel est l'exact état du passif antérieur. Pour cela, tout va commencer par un établissement de l'état du passif antérieur.

    A. L'état du passif antérieur

Le principe c'est que les créanciers antérieurs doivent déclarer leurs créances auprès du mandataire judiciaire dans un certain délai légal, faute de quoi ils ne perdent pas leurs droits mais ils passeront après ceux qui ont régulièrement déclarés leurs créances. Ceci débouche sur le fait que, puisqu'un plan de sauvegarde peut durer 10 ans, certains créanciers peuvent n'être payés que 10 ans plus tard càd après tous les créanciers qui ont déclarés leurs créances.

Qui doit déclarer ?
Tous les créanciers antérieurs sauf les salariés.

Qu'est-ce qu'un créancier antérieur ?
Celui dont le droit est né avant le jugement d'ouverture a tout intérêt à déclarer sa créance même si un jour elle pourrait être vue comme une créance postérieure. Il faut donc mieux trop déclarer que pas du tout. Donc, tous les créanciers dont le titre de créance se situe avant le jugement d'ouverture doivent déclarer leurs créances. Il faut, mais il suffit, que le titre de créance du créancier soit antérieur au jugement d'ouverture.

Ex : le cas du bailleur d'immeuble qui a conclu un bail commercial de 9 ans. C'est assurément un créancier antérieur puisque le bail a été conclu avant le jugement d'ouverture. Ainsi, s'il y a des loyers impayés à la date du jugement d'ouverture, c'est une créance antérieure. Néanmoins, le bailleur a d'autres créances puisqu'il peut comprendre tous les autres loyers jusqu'à la fin des 9 ans qui constituent le terme du bail. 

C'est une sécurité que de tout déclarer que les créances soit à terme, exigibles, civiles, commerciales, ... toutes doivent être déclarées y compris les créances contestées, indéterminées ou en germe. Mais il faut tout de même qu'il s'agisse bien de créances d'un créancier antérieur sur le débiteur lui-même et non pas sur un tiers.

Ex : Si une banque a un emprunteur qui est garanti par le cautionnement d'un tiers et que cet emprunteur fait l'objet d'une procédure collective, il y aura une créance de la banque sur le débiteur. Néanmoins, dans ce cas, même si la banque a une créance contre la caution, elle n'a pas à être déclarée puisque la caution n'est pas en procédure collective. En revanche, si la caution fait l'objet d'une procédure collective, la banque a une créance potentielle contre elle donc elle devra déclarer sa créance.
Dans le cadre d'un cautionnement, la caution, à titre conservatoire, pourrait déclarer la créance potentielle qu'elle a contre le débiteur. Ainsi, il faudra tout déclarer et distinguer le principal, les intérêts du principal, les intérêts de retard, les sûretés qui garantissent la créance càd les sûretés réelles prisent sur le patrimoine du débiteur, ...
Ex : une entreprise a demandé un prêt à la banque. La banque accepte et prend une hypothèque sur un immeuble de la société. Elle devra déclarer l'hypothèque. Mais est-ce que le cautionnement impacte sur le patrimoine du débiteur ? Non, cela impacte sur le patrimoine d'un tiers. Donc, le fait que la banque dispose d'un cautionnement souscrit sur le patrimoine de l'entreprise, n'impacte pas le patrimoine du débiteur. En revanche une hypothèque ou un nantissement doit être déclaré.

Qu'est-ce qu'une sûreté qui doit être déclarée ?
Il y a les sûretés classiques, les sûretés réelles immobilières et les privilèges que la loi donne de plein droit à son créancier. Mais d'autres techniques de garanties, qui ne sont pas à proprement parler des sûretés, peuvent être déclarées. Ainsi, il y a par exemple des droits de rétention qui, par précaution, doivent être déclarées.

Quand doit-on déclarer ?
La loi prévoit un délai de 2 mois au créancier à compter de la publication de l'ouverture de la procédure au BODACC entre les mains du mandataire judiciaire.

Certains créanciers doivent être prévenus par le mandataire judiciaire et il a même l'obligation de prévenir les créanciers dont il connait l'existence (essentiellement les créances qui ont fait l'objet d'une publicité).

Si les créanciers sont domiciliés à l'étranger, le délai est rallongé.

Le créancier qui aurait laissé passer le délai peut être autorisé par le juge-commissaire à ne pas être déclaré hors délai afin qu'il ne soit pas forclos.
Qui doit déclarer ?
Souvent les déclarations de créances sont faites par les avocats du créancier. Il y a quelques années, une CA avait contesté qu'une déclaration de créance d'une banque puisse être signée par un salarié de la banque pourtant bénéficiant d'une chaîne de délégation de pouvoir parce que seuls les représentant légaux de la banque pouvaient engager une action en justice. Cette jurisprudence avait en effet assimilé l'action en créance à l'action en justice et, par conséquent, l'employé de la banque ne pouvait pas déclarer la créance.
Y a-t-il des formes pour déclarer ?
Non mais elle se fait évidemment par écrit. La précaution c'est que cet envoi soit fait en RAR. Afin de procéder à cette déclaration, il y a une espèce de nomenclature dans laquelle on met :
- le nom du créancier,
- le nom du débiteur,
- tout ce qui permet d'identifier la créance.

Puis le créancier arrête ou propose des montants. Il y a ensuite la rubrique sûretés et garanties et se finit par "en définitif, le créancier estime sa créance envers X de 10 000 €". Cette demande doit être certifiée et accompagnée de tous les documents justificatifs.
Même le Trésor doit déclarer ses créances.

        B. La vérification des créances antérieures

La déclaration de créances est faite entre les mains du mandataire judiciaire qui joue le rôle de représentant des créanciers. Il centralise toutes les déclarations de créances. Il va les analyser, dire que telle créance est arrivée dans le délai et pas telle autre. Mais surtout, il va étudier avec le débiteur les réponses qu'il convient d'apporter. Il se rapproche alors du débiteur, ils travaillent ensemble, ...

Cette seconde étape n'est pas encadrée dans un certain délai mais elle débouche généralement par l'envoi au créancier par le mandataire judiciaire d'un courrier par lequel ce mandataire déclare accepter en tout ou partie la déclaration de créance ou éventuellement la rejeter en tout ou partie.
A partir de là, s'il y a une contestation, même partielle par le mandataire judiciaire, le créancier à 30 jours pour contester la contestation. S'il ne le fait pas, cette contestation de sa créance est réputée avoir été acceptée par le créancier antérieur.

Donc :   
- soit la créance est acceptée et n'est pas contestée, même partiellement,
    - soit la créance est contestée même partiellement et il y a donc un contentieux.

Ce contentieux va être réglé par le juge-commissaire qui va rendre une ordonnance par laquelle il se prononce sur l'existence, le montant de la créance, les sûretés qui la garantissent et si cela ne satisfait pas une partie, il va être interjeté appel.

En définitive, tout ceci débouche sur l'état du passif antérieur qui est un tableau faisant apparaître :
- le nom de tous les créanciers qui ont déclaré une créance,
- le montant déclaré,
- le montant des contestations en créance,
- le montant définitivement admis soit par les parties, soit par le juge-commissaire, soit par la CA.

Ceci donne une photographie définitive du passif antérieur et c'est cet état qui va permettre l'apurement de ce passif antérieur dans le cadre d'un plan de sauvegarde.

        C. L'interdiction de paiement des créanciers antérieurs

L'interdiction de paiement ne concerne pas les tiers (ex : la caution). Ainsi, si le débiteur principal n'a plus le droit de payer son créancier, la caution qui n'est pas en procédure collective doit s'acquitter de sa dette en qualité de caution. Cette interdiction ne s'applique qu'entre le débiteur et le créancier.

De même, dans l'hypothèse où il y a deux codébiteurs solidaires et que l'un d'eux ne peux plus payer son créancier puisqu'il est en procédure collective, le codébiteur solidaire garde l'obligation de payer le créance.
Ce principe est tellement important que le paiement qui interviendrait en dépit de cette interdiction est nul et donc le créancier aurait à rembourser la somme. La sanction s'applique à la fois côté débiteur mais surtout du côté du créancier.
Ce principe est-il absolu ?
Non. En effet, on trouve certaines exceptions à ce principe comme la levée d'une clause de rétention ou de propriété ou l'exception de compensation.

    - Concernant la levée d'une clause de rétention

Ex : le garagiste a le droit d'appliquer un droit de rétention sur la voiture qu'il a réparé. Dans ce cas, le juge-commissaire peut autoriser le débiteur et l'administrateur judiciaire à payer ce créancier antérieur afin de lever le droit de rétention parce qu'il est de l'intérêt de l'entreprise de récupérer le véhicule pour qu'elle puisse poursuivre correctement son activité.

    - Concernant la clause de réserve de propriété 

En cas de clause de réserve de propriété, le vendeur reste propriétaire jusqu'à complet paiement du prix par l'acheteur. Imaginons que l'acheteur ait payé 90% du prix. Il ne lui reste plus que 10% à payer mais avant cela, il fait l'objet d'une procédure collective. Il n'a donc plus droit de payer ces 10% et le vendeur conserve la chose puisqu'il en est resté propriétaire. Il est alors dommage de rester bloqué alors qu'une grande partie du prix a déjà été payée.
Là encore, il faut arbitrer entre l'enrichissement du patrimoine du débiteur et la récupération de biens nécessaires à son activité avec le principe de l'interdiction de paiement des créanciers antérieurs.

    - Concernant l'exception de compensation

Ex : un créancier antérieur, qui n'a plus le droit d'être payé, est simultanément le débiteur du débiteur. On a donc des créances et des dettes réciproques. Il se peut que, avant le jugement d'ouverture, ces créances et ces dettes se soient compensées soit par l'effet d'une compensation légale (puisqu'il faut et qu'il suffit que les créances soient certaines, liquides et exigibles pour que la compensation légale intervienne de plein droit au jour où ces conditions sont remplies), ou par l'effet d'une compensation conventionnelle (si les parties ont décidé conventionnellement de faire un solde de leurs dettes). Ces compensation peuvent être intervenues avant le jugement d'ouverture auquel cas il y a un solde et ce dernier est soit en faveur du créancier antérieur qui devra déclarer sa créance après compensation ou qui sera en défaveur du créancier antérieur le plaçant en situation de débiteur de l'entreprise qui ferra l'objet d'une procédure collective.
Si le solde est en faveur du créancier, que va-t-il déclarer comme créance ?
Il va déclarer sa créance initiale, signaler qu'une compensation est intervenue et demander le paiement du solde final.
Que se passe-t-il s'il y a des créances non compensables au moment du jugement d'ouverture ?
Dans ce cas, les 3 conditions ne sont pas réunies pour effectuer une compensation légale et les parties n'ont pas décidé de compenser conventionnellement leurs dettes et leurs créances.
Ex : j'ai un compte chez un bistrot où je vais régulièrement manger et, comme il est devenu un ami, je lui ai prêté de l'argent. J'ai donc une dette à son égard mais j'ai également une créance. Ici, chacun est créancier et débiteur de l'autre mais ces créances et ces dettes n'ont pas de liens. Le bistrot fait l'objet d'une procédure collective. Peut-être que la créance sur le bistrot n'était pas exigible alors que je lui devais le montant des repas. Donc il n'y eu ni compensation légale ni conventionnelle.
Quelles sont les positions en présence ?
Je suis créancier du débiteur de boissons. Je fais ma déclaration de créance mais, dans le même temps, je lui dois de l'argent. Comme il est en procédure de redressement, je n'ai plus le droit d'être payé par lui (= principe d'interdiction des créances antérieures). En revanche, je suis son client, je lui dois de l'argent, je dois le payer. Ainsi, l'interdiction des paiement joue dans un sens mais pas dans l'autre. Ici, on voit bien qu'on est dans une hypothèse de reconstitution de la trésorerie.
Ce système est assez injuste qu'on doive lui payer les 1000€ alors que lui ne me paiera pas mes 10.000€.
Dans ce cas, la loi a permis la compensation de dettes et de créances réciproques, même si les conditions de la compensation légale ne sont pas réunies. Néanmoins, pour cela il faut qu'il y ait entre ces dettes et ces créances réciproques un lien de connexité.

Pour reprendre l'exemple, cela voudrait dire que si les créances et les dettes sont réciproques, je ne vais pas rembourser les 1 000 que je lui doit mais on va dire qu'il va y avoir une compensation sur les 10 000 afin qu'il ne me doive plus que 9 000. Je réduis donc mon risque de ne pas être payé.

Dans notre cas y a-t-il connexité ? A priori non. Il y en a généralement un dans les relations d'affaires entre les prix dus et les ristournes de fin d'année accordée.

Néanmoins, si on suppose qu'il y a connexité, cela signifie que lorsque je vais déclarer ma créance de 10 000, je vais le faire en en retraçant l'origine et, dans la suite de la déclaration de créance, je vais dire "oui il a une créance mais dans le même temps, je suis débiteur pour tel montant, à tel titre, etc, et je considère qu'il y a un lien de connexité". Je fais la compensation pour finir par dire "je ne suis plus créancier que de 9 000€". Ainsi, le mandataire judiciaire va s'entretenir avec le débiteur pour voir s'ils acceptent ou non cette proposition de connexité.

La déclaration de créances est le lieu pour les créanciers de déterminer leurs droits, leurs sûretés et de faire application de la compensation des créances connexes.

A retenir :
- Principe     : interdiction de paiement des créanciers antérieurs
- Exception     : soit par levée d'une clause de rétention, de propriété, soit par application de  l'exception de compensation.

III. L'arrêt des poursuites individuelles et du cours des inscriptions

        A. L'arrêt des poursuites individuelles

C'est un principe corolaire du précédent. Le créancier ne peut plus être payé et il n'a plus le droit de poursuivre le paiement ni de prendre des mesures d'exécution ou de nouvelles sûretés. Ce sont tous ces droits qui sont notamment paralysés. Le créancier n'a plus le droit d'agir en justice pour être payé, pour prendre des mesures conservatoires ou pour mettre en oeuvre de nouvelles sûretés au titre des créances antérieures. C'est le principe collectif de ces procédures.

Ainsi, le créancier hypothécaire garde son hypothèque mais il n'a plus le droit de rien faire, il ne peux plus l'exercer. Le créancier, surtout titulaire de sûretés, ne peut plus poursuivre la mise en oeuvre de ses poursuites.
Le premier principe est donc que le créancier doit arrêter ses poursuites individuelles et ses voies d'exécution. En revanche, il continu à pouvoir faire établir sa créance par une décision de justice ou il peut continuer et engager des contentieux qui n'ont pas pour objet une somme d'argent (ex : concernant la résolution d'un contrat).
Ex : je suis un concurrent d'une entreprise qui fait l'objet d'une procédure collective et je considère que dans les mois précédant sa procédure collective, il m'a fait de la concurrence déloyale. Ici, par précaution, je déclare ma créance éventuelle. Pour l'instant, elle n'est établit par aucun titre. Mais si, avant que mon concurrent déloyal fasse l'objet d'une procédure collective, j'avais engagée une action en justice pour qu'il me paye des dommages-intérêts, cette procédure pourra continuer mais elle ne pourra plus déboucher sur le paiement d'une somme d'argent. Je ne pourrais obtenir que la reconnaissance d'une créance. Ainsi, ma créance déclarée antérieurement est confirmée par un titre mais je ne pourrais pas en obtenir le paiement parce que c'est une créance antérieure.
Il s'agit de figer le passif au jour du jugement d'ouverture de sauvegarde, de protéger autant que faire se peut les partenaires du débiteur et d'assurer une égalité entre les créanciers.
Cette interdiction de payer les créanciers antérieurs concerne aussi bien les chirographaires que les privilégiés. Une action en justice qui tend à faire établir un droit, même pécuniaire, par un créancier, peut se poursuivre mais ne peut plus tendre désormais qu'à fixer le droit dans son principe, dans son quantum.
Si l'action en justice a été engagée avant le jugement d'ouverture par le créancier, elle va être suspendue par l'effet du jugement d'ouverture. Le créancier, ou celui qui se prétend créancier, va alors déclarer sa créance à titre conservatoire entre les mains du créancier et il va ensuite pouvoir reprendre son action en justice mais il devra mettre dans la cause les organes de la procédure que sont le mandataire judiciaire et l'administrateur judiciairement. Ainsi suspendue puis reprise, l'action va aller jusqu'à son terme càd jusqu'à ce qu'un jugement se prononce sur le principe et sur le montant de la créance. C'est ce jugement qui sera ensuite "entériné" par le juge-commissaire dans le cadre de la procédure de vérification des créances antérieures.

Les actions en justice sont soit interdites soit suspendues puis reprises. On parle ici bien des actions en justice engagées contre le débiteur. En revanche, les actions engagées ou à engager à l'égard des tiers restent possibles.
Ex : Le créancier ne peut plus agir contre le codébiteur qui fait l'objet d'une procédure collective. En revanche, il va pouvoir continuer à poursuivre son action contre le codébiteur solidaire in bonis.

Ex 2 : On pense également au cas particulier de la caution. En effet, il est normal qu'elle soit tenue de payer dès lors que le débiteur principal ne le peut plus.
Le principe c'est bien que le créancier antérieur garde ses droits contre les cautions qui sont des tiers mais la loi va protéger, en tout cas temporairement, les cautions PP parce que généralement ce sont les amis, les parents du débiteur ou, lorsque le débiteur est une PM, le dirigeant ou tel actionnaire sera la caution. En effet, il existe des PM qui font profession d'être caution.

Ainsi, les actions contre les tiers sont toujours possibles pour les créanciers. En revanche, les actions contre les cautions PP vont être suspendues jusqu'au jugement qui arrêtera le plan de sauvegarde.

        B. L'arrêt du cours des inscriptions

Les créanciers antérieurs n'ont plus le droit de prendre des sûretés nouvelles sur le débiteur. Celui qui avait une sûreté la conserve. Il ne peut plus l'exercer. Si sa sûreté vient à échéance, il a le droit de la renouveler mais celui qui n'en avait pas n'a plus le droit d'en prendre au nom du principe d'égalité entre les créanciers et de préservation du patrimoine des débiteurs.

        C. L'arrêt du cours des intérêts

Les dettes du débiteur qui fait l'objet d'une procédure collective (en l'espèce de sauvegarde) portent  parfois intérêts contractuelles ou de plein droit. Néanmoins, à compter du jugement d'ouverture ces dettes ne porteront plus intérêts sauf s'il s'agit de dettes qui avaient une échéance postérieure à 1 an.

Ex : un fournisseur devait être payé à 90 jours. Son client fait l'objet d'une procédure collective 1 mois avant le terme. Le fournisseur ne peut plus être payé pendant toute la période d'observation. Dans les relations contractuelles entre le fournisseur et le client, il était probablement prévu que tout retard de paiement faisait courir des intérêts de retard. Mais, dès lors que cette créance n'a pas une échéance supérieure à 1 an, alors même que le débiteur ne paye pas, les intérêts de retard ne courent pas en application du principe de l'arrêt du cours des intérêts. En effet, le législateur n'a pas souhaité que le passif du débiteur augmente jour après jour.

Ex 2 : un fournisseur devait être payé à 90 jours, le débiteur ne paye pas, mais il ne fait toujours pas l'objet d'une procédure collective. Au bout de ces 3 mois, le créancier a le droit à des intérêts de retard. Le créancier, lorsqu'il va déclarer sa créance, va déclarer le montant principal de sa créance et les 1 mois d'intérêts de retard mais à partir de ce moment les intérêts de retard vont s'arrêter.

Concernant les dettes qui ont une échéance supérieure à 1 an : elles produisent des intérêts mais, de même que le principal, ils ne pourront pas être payés. Jour après jour le passif du débiteur augmente mais il n'a pas le droit d'être payé.

        D. Le terme des dettes du débiteur

Le débiteur peut avoir une dette à terme càd pas immédiatement exigible. C'est en l'état d'une ou plusieurs dettes à terme que le débiteur est en procédure collective. La loi vient dire très clairement qu'en matière de sauvegarde, le jugement d'ouverture ne provoque pas la déchéance du terme càd la dette antérieure du débiteur qui n'était pas exigible au jour du jugement d'ouverture ne le devient pas. Cela reste une dette à terme. En vérité, peu importe qu'elle devienne ou non exigible puisqu'elle ne peut pas être payée. Il n'y a donc pas de déchéance du terme.

    IV. La problématique des revendications

Il s'agit d'un créancier antérieur qui est simultanément propriétaire d'un bien, ce bien étant entre les mains du débiteur au jour du jugement d'ouverture. La situation la plus courante est celle qui résulte d'une vente avec clause de réserve de propriété.

Ex : un vendeur vend un bien au débiteur en lui accordant des délais de paiements mais les conditions contractuelles prévoient que le vendeur reste propriétaire du bien vendu jusqu'à complet paiement.
Le vendeur, créancier du prix :
- soit a encore le bien entre les mains : il n'a rien à craindre car le bien est encore en sa possession. C'est une hypothèse rare. En effet, il n'est pas fréquent qu'on achète une voiture et que le bien reste entre les mains du vendeur jusqu'à complet paiement.

- soit il n'a plus le bien et il s'est libéré de la chose entre les mains de l'acheteur : l'acheteur c'est celui qui fait l'objet d'une procédure collective. Le vendeur est resté propriétaire parce que le prix n'a pas été intégralement payé sauf que l'acheteur n'a plus le droit de payer le vendeur. Mais, tant que le vendeur n'aura pas totalement payé, l'acheteur ne pourra pas devenir propriétaire de la chose. Or, tant que je ne suis pas propriétaire, je ne peux pas en disposer et je ne peux pas la revendre.

De plus, ces biens vendus par le vendeur à l'acheteur, non encore payés mais entre les mains de l'acheteur, contribuent à la solvabilité apparente du débiteur. Les tiers ont pu croire, de bonne foi, que ces biens utilisés par le débiteur lui appartenaient alors que, par l'effet de la clause de propriété, ces biens appartenaient encore au vendeur.

On voit que cette situation est floue à beaucoup d'égard. La loi dit alors que celui qui est propriétaire d'un bien qui est pourtant entre les mains du débiteur doit le revendiquer. Cette personne c'est généralement un vendeur avec clause de réserve de propriété mais c'est plus généralement toute personne propriétaire d'un bien dont le bien est entre les mains du débiteur.
Ex : cas du loueur de voiture, cas du déposant.

Il doit revendiquer le bien pour deux raisons :
- pour tenter de le récupérer,
- pour qu'il soit dit à la procédure collective que ce bien n'appartient pas au débiteur mais à un tiers et qu'il ne fait pas partie du patrimoine du débiteur.

Cette revendication de la part du propriétaire doit intervenir dans les 3 mois de la publication du jugement d'ouverture au BODACC. De la même manière que pour la déclaration de créance, même après le délai, le créancier ne perd pas son droit à revendication mais ses droits s'en trouvent affectés.

Ex : j'ai pris en location un camion. Je me sert de ce camion alors qu'il ne m'appartient pas et que je n'en suit que locataire. Le propriétaire va le revendiquer en disant que le camion lui appartient mais en même temps, il y a un contrat de location en cours.

Que devient ce contrat en cours ?
Il faut combiner les règles de déclaration, de revendication et de poursuites. J'ai besoin de ce contrat en cours mais dès lors que les loyers continuent d'être payés, je vais garder le camion. Donc, quand on est du côté de l'organisme prêteur il faut déclarer sa créance, choisir si le contrat va se continuer ou pas, revendiquer le bien s'il est entre les mains du débiteur, etc.

Le propriétaire doit donc revendiquer dans ce délai de 3 mois pour faire établir son droit de propriété et pour demander à récupérer ce bien, sauf s'il peut rester entre les mains du débiteur parce qu'un contrat va se poursuivre.
S'il y a contestation sur cette revendication, celle-ci est tranchées par le juge-commissaire et, s'il y a appel, par la Cour d'appel.
Il y a également des conditions spécifiques pour que la clause de réserve de propriété soit opposable. En pratique, l'administrateur va se faire autoriser par le juge-commissaire à payer le solde du prix de vente de manière à ce que l'acheteur (càd le débiteur en procédure collective) devienne bien véritablement le propriétaire du bien et puisse alors le transformer et/ou le revendre ce qui lui permet de faire tourner son activité.
Ex : je suis fournisseur de boissons à des cafés, hôtels, restaurants. Je vends avec paiement à terme et avec clause de réserve de propriété. Si le débiteur ne peut plus les revendre parce qu'il n'est pas propriétaire et s'il ne peut plus payer le fournisseur parce qu'il est en procédure collective, c'est un cercle vicieux. Le seule manière d'en sortir est de permettre au débiteur de boissons de payer son fournisseur antérieur par exception. Il va donc pleinement devenir propriétaire des boissons qu'il a acheté. Il peut alors les revendre, faire tourner son activité.


   Section 3. Les aspects sociaux de  la procédure de sauvegarde


    I. La situation des salariés par l'effet du jugement d'ouverture et pendant     la période d'observation

Les salariés ont une situation spécifique parce qu'ils sont cocontractants de l'entreprise au titre de leur contrat de travail. Ils sont créanciers antérieurs et postérieurs de l'entreprise et ils ont une place spécifique dans l'entreprise parce qu'ils ont besoin de l'entreprise et que l'entreprise a besoin d'eux. Ce sont des partenaires privilégiés. Cette pluralité de casquettes fait que les salariés connaissent un sort spécifique parce qu'ils sont à la fois créanciers antérieurs et postérieurs de l'entreprise.

        A. Ils sont créanciers antérieurs

Ils n'ont pas à déclarer leur créance. Néanmoins, le salarié n'est créancier antérieur que si des sommes lui sont dues au jour du jugement d'ouverture. Ceci est à la fois vrai et faux.

- C'est faux : parce que l'entreprise n'étant pas en cessation de paiement, l'entreprise a dû faire la dernière paye. Si elle ne l'a pas faite, c'est la première chose que demandera le tribunal. Généralement, en matière de sauvegarde, rien n'est dû aux salariés.

- C'est vrai : parce que les droits des salariés se constituent jour après jour. Certes, ils sont généralement payés à la fin du mois mais chaque jour du mois augmente la créance de l'entreprise. Les droits des salariés se constituent jour après jour ce qui signifie qu'au jour d'ouverture, certes l'entreprise a fait la paye du mois dernier mais les salariés ont droit à salaire pour les premiers jours du mois. Cette créance est donc une créance antérieure. Ainsi, les salariés ont donc acquis une créance antérieure.
De plus, les salariés ont toujours droit à autre chose que leur salaire (droit à des congés payés, aux remboursement de frais, ...) Chaque mois de travail donne droit à 2 jours de congés payés. Donc, quand le jugement d'ouverture est rendu, il a des droits acquis. En toute hypothèse, lorsque le jugement d'ouverture est rendu, les salariés sont des créanciers antérieurs. Néanmoins, ce n'est pas à eux de déclarer individuellement sa créance. C'est une opération qui se fait entre l'entreprise, le représentant du personnel et le mandataire valant représentant des créanciers.

Le salarié est-il lui aussi soumis à la règle de l'interdiction des paiements ?
Les salariés bénéficient généralement d'un privilège voire même d'un super-privilège. Ceci donne alors au salarié une chance ou une très bonne chance d'être payé en 1er rang. Mais ce n'est pas la même chose d'avoir une sûreté d'être payé que d'être réellement payé.

Ex : une entreprise de service ou une agence de communication a pour actifs des chaises, des bureaux, des ordinateurs, ... Cette agence dépose le bilan. Qu'y a-t-il à vendre ? Qu'est-ce que va retirer le liquidateur judiciaire de la vente ? Or, en face, il y a des dettes et notamment des dettes dues aux salariés. Mais qu'est-ce qu'un super-privilège s'il ne peut être exercé sur rien?
C'est pour cela que le législateur a créé une sorte "d'assurance de garantie des salaires" connue sous la forme "AGS", "le GARP", ...

L'AGS est une sorte d'assurance de garantie des salaires. Les entreprises cotisent à ces assurances lorsqu'elles sont in bonis et elle va jouer quand elle ferra l'objet d'une procédure collective et qu'elle devra de l'argent à ses salariés mais qu'elle ne pourra pas les payer.

Ex : Nous sommes aujourd'hui en sauvegarde, donc pas en état de cessation de paiement. On considère que l'entreprise doit être capable de payer aux salariés les créances qu'elle leur doit. Les salariés ont donc bien un droit du 1er au 16 mars. A la fin du mois de mars, l'entreprise en sauvegarde doit être capable de payer ses salariés pour tout le mois de mars càd pour 16 jours de créances antérieures et 14 jours de créances postérieures. Pour les salariés, dans un premier temps, le fait que leur employeur soit en procédure de sauvegarde ne change rien.

        B. Ils sont créanciers postérieurs

C'est la même logique que la poursuite des contrats en cours. Ils se poursuivent alors encore plus de plein droit que les autres. Donc, pour les salaires postérieurs qui constituent des créances postérieures, l'entreprise doit être capable de payer ses salariés. Donc, dans un premier temps, lorsque l'entreprise est en sauvegarde, rien n'est changé pour les salariés. La paye du mois en cours sera faite par l'employeur et ensuite, comme pour le bailleur, les salaires resteront payés pendant la période d'observation.

Donc, en qualité de créanciers antérieurs, les salariés n'en doivent pas moins être payés et, en qualité de créanciers postérieurs avec un contrat qui se continue, ils n'en doivent pas moins être payés.

Néanmoins, même en sauvegarde, il est possible que des licenciements soient nécessaires pendant la période d'observation car le poste salaires constituent généralement un poste de charges très important. Le contrat se poursuit de plein droit sauf que, à l'initiative de l'employeur, il va pouvoir y être mis fin par l'effet d'un licenciement qui va intervenir pendant la période d'observation.

Le licenciement est décidé par l'administrateur judiciaire et se fait autoriser par le juge-commissaire. Il n'en demeure pas moins qu'en sauvegarde, les règles de droit commun et notamment les règles relatives au PSE s'appliquent càd qu'il faut informer et consulter les représentants du personnel. On va donc combiner les règles relatives aux procédures collectives et les règles du droit du travail.

Évidemment, ces licenciements pendant la procédure de sauvegarde sont réputés par la loi comme devant être exceptionnels. Les salariés sont licenciés et ils ont doit à des indemnités de licenciement. Mais qui va les payer ? Rappelons qu'on est dans la situation d'une entreprise en état de cessation de paiement. Le coût du plan social sera une dette postérieure mais elle est exceptionnelle et il se peut que, quoi qu'en sauvegarde, l'entreprise n'ait pas les moyens de payer de ce plan social. Dans ce cas, la loi prévoit à titre exceptionnel que l'AGS puisse payer tout ou partie du plan de sauvegarde.

Cela signifie que les salariés ont la certitude qu'ils seront payés de leur salaire dus au jour du jugement d'ouverture, aux salaires dus pendant la période d'observation et de leurs indemnités de licenciement parce que soit l'entreprise peut la payer, soit c'est l'AGS qui la paiera.

Cependant, l'AGS ne paye pas tout. Elle ne paye que les indemnités légales et conventionnelles. De plus, l'AGS paye dans le cadre d'un plafond salarié par salarié càd que, même si l'AGS ne paye que ce qui est dû au terme de la loi ou de la convention collective, il y a une limite.

Pourquoi ce plafonnement ?
Ce plafonnement s'explique parce que l'AGS n'a pas des moyens illimités et parce qu'il a été limité à l'occasion du dossier Air Lib puisque les pilotes de ligne sont très bien payés et que si l'AGS avait due tout payer, elle aurait elle-même déposé le bilan.

A retenir : dans le cadre d'une procédure collective, les salariés créanciers antérieurs n'en sont pas moins payés. Les salariés en tant que créanciers postérieurs, comme tous les autres, sont payés. Les indemnités de licenciement sont en principe payés par l'entreprise sinon par l'AGS. De plus, par principe, le contrat de travail se poursuit.

Chapitre 2. La recherche d'une solution au travers  d'un plan de sauvegarde

   Section 1. Le bilan économique, social et environnemental


Le rédacteur est le débiteur s'il n'y a pas d'administrateur judiciaire. Pour établir son bilan, il peut avoir accès à des tiers (ex : demander des renseignements à la Banque de France). Il peut également entendre qui il veut (ex : chef d'entreprise.)

L'objectif est de faire une photographie de la situation actuelle de l'entreprise et de donner une raison d'être aux difficultés de l'entreprise.
Ces difficultés peuvent être dues à la conjoncture (ex : perte de clients, de chiffre d'affaires, augmentation du prix des fournisseurs) ou d'origine structurelle (ex : comment est structurée l'entreprise).
Ex : Eurotunnel était encore hyper endetté. Sa problématique n'était pas conjoncturelle (les clients continuaient à prendre le train).

Le bilan s'accompagne d'un inventaire des biens de l'entreprise càd d'une liste de ses actifs. Depuis 2005, le bilan économique et social devient également environnemental car l'environnement peut causer des difficultés à l'entreprise (Ex : Metaleurop : ses difficultés financière venait du fait qu'elle devait dépolluer).

   Section 2. Le rapport de l'administrateur judiciaire

Le deuxième document est le rapport de l'administrateur judiciaire. Il est fait à l'issu de la période d'observation au vu d'une part, du bilan économique, social et environnemental et d'autre part, du projet de plan de sauvegarde ou de l'absence de ce projet.

Le rapport est un document par lequel, au vu des causes et difficultés de l'entreprise et du projet de solution, l'administrateur fait un rapport au tribunal et donne généralement son avis. En matière de sauvegarde, ce qu'il y a de spécifique c'est qu'il n'y a qu'une seule solution : le plan de sauvegarde.

Ainsi, l'entreprise prépare un plan de sauvegarde et c'est ce plan qui va être proposé au tribunal pour qu'il le valide. L'administrateur judiciaire va donc présenter un rapport qui devrait être favorable puisqu'il n'y a qu'une solution qu'il a accompagné sinon soutenu pendant la période d'observation.
Le débiteur peut présenter un plan qu'on appelle le plan de redressement mais les tiers peuvent également présenter des plans "de cession". L'administrateur devra donc donner son avis sur ces différents plans. Néanmoins, en matière de sauvegarde, il n'y a pas de concurrence de plans puisque l'entreprise a un monopole pour présenter un plan de sauvegarde.


Chapitre 3. Le plan de sauvegarde


Il est préparé pendant la période d'observation càd cette période qui a une durée maximum de 12 voire 18 mois. Selon les cas, il est urgent d'aller vite et de mettre le plus rapidement possible ce plan de sauvegarde tandis que dans d'autres hypothèses il est urgent d'attendre puisque plus la période dure, plus les créanciers restent impayés ce qui laisse plus de temps à l'entreprise pour reconstruire sa trésorerie.

Un plan de sauvegarde a pour objectif de sauvegarder voire de redressement l'entreprise. Ce plan est essentiellement un plan d'apurement du passif. Pourquoi ?
L'entreprise a des difficultés. Ces difficultés se traduisent par des difficultés de nature financières. Si l'entreprise est en sauvegarde, c'est que l'entreprise a quasi-exclusivement des difficultés de nature financière sans être en état de cessation des paiements. Elle a donc des difficultés pour payer ses créanciers. D'ailleurs, l'effet juridique principal du jugement d'ouverture c'est l'arrêt des paiements des créanciers antérieurs. Le plan de sauvegarde va donc être le moyen de payer les créanciers antérieurs sachant que, pendant la période d'observation, l'entreprise a dû payer ses créanciers postérieurs et que, si on se projette après la durée d'observation donc pendant la durée du plan de sauvegarde, l'entreprise va devoir payer ses créanciers antérieurs mais elle va devoir en même temps payer ses créanciers courants.

L'objectif est donc bien d'apurer le passif antérieur et, dans le même temps, l'entreprise doit payer son nouveau passif, son passif quotidien. Par hypothèse, l'entreprise a des difficultés et elle était à la veille de ne pas pouvoir payer ses dettes. Par quelle opération l'entreprise va donc pouvoir à nouveau payer ses créanciers antérieurs en plus de ses créanciers postérieurs ? Soit il faut demander des sacrifices aux créanciers voire leur imposer ou il faut qu'il y ait des nouvelles sources de financement mise en place et la plus importante c'est de nouveaux apports des actionnaires. Ce qu'on appelle les fonds propres de l'entreprise, c'est l'argent dont dispose la société sans avoir à rembourser ces sommes.

Le plan de sauvegarde va consister à apurer le passif antérieur de l'entreprise tout en devant payer ses dettes quotidiennes.

   Section 1. Dispositions générales

Il s'agit pour l'entreprise de voir de quelle manière elle va pouvoir payer ses dettes antérieures qu'elle n'arrivait pas à payer. Il y a essentiellement deux manières : demander des sacrifices aux créanciers ou leur imposer.
Demander des sacrifices, cela peut vouloir dire leur demander d'abandonner une partie de leur créance ou leur demander des délais de paiement. Or, en droit commun, personne ne peut imposer à un créancier un abandon de créance. En revanche, la loi prévoit que le débiteur et le tribunal peuvent imposer des délais de paiement au créancier dans la limite de 10 ans.

Le mandataire judiciaire, qui connaît tous les créanciers puisque ces derniers ont déclaré leur créances entre ses mains, va pendant la période d'observation, envoyer un courrier recommandé à chacun des créanciers pour lui faire part des propositions de l'entreprise. Généralement, ces propositions sont sous la forme d'une alternative.

Le débiteur fait la proposition suivante à ses créanciers : "je te demande un abandon de créance de 50% et les 50% restant je vais te les payer en 2 fois en un ou deux ans et, si tu ne veux pas m'accorder d'abandon de créance, je vais tout te payer mais sur 10 ans."

Quand il reçoit ce courrier, le créancier a 1 mois pour répondre. Il a plusieurs possibilités : soit il accepte l'abandon de créance et choisi expressément l'option A, soit il choisi expressément l'option B, soit le créancier ne répond pas.
Généralement, la proposition faite par le créancier envisage expressément le cas du silence du débiteur en précisant qu'en cas de silence l'option A ou l'option B sera réputée admise. Néanmoins, si par le silence, l'abandon de créance est réputé accepté, c'est en quelque sorte imposer cet abandon ce qui paraît pour certains auteurs contraire à la loi.

Limitations :
- imposer un délai de paiement de maximum 10 ans,
- les annuités de remboursement ne peuvent pas être inférieurs à 5% de la dette et le premier payement fait au créancier ne peut pas intervenir plus d'un an après la date du jugement qui arrête le plan.

Qu'est-ce que pourrait, au pire, proposer un débiteur ?
Il pourrait proposer 9 annuités de 5% et une dernière annuité de 55%. On voit que par l'effet du temps, on impose des sacrifices aux créanciers.

Avant de proposer ce plan à ses créanciers, le débiteur a réfléchi pour avoir suffisamment d'argent pour payer ses créanciers antérieurs et postérieurs. Le plan repose donc sur des prévisions de chiffres d'affaires, de charges et surtout de trésorerie. Il faut que l'entreprise soit capable d'envisager un plan de trésorerie sur une durée de 10 ans et qu'il soit réalisable sinon il sera refusé par le tribunal.

Pour reprendre l'exemple : Imaginons que tous les créanciers acceptent l'hypothèse A. L'entreprise aura-t-elle la possibilité de payer tous ses créanciers à 1 an ? Peut-être que l'entreprise ne souhaite pas que tous ses créanciers accepte. Le mandataire va faire les comptes et va dire au débiteur que tant de créanciers ont choisi telle ou telle option et lui montre ce qu'il aura à payer l'année 1, 2 ... jusqu'à l'année 10. Il faudra alors voir si ce plan sera compatible avec l'activité prévisionnelle de l'entreprise. Si ce n'est pas le cas, le tribunal n'acceptera pas le plan parce qu'il ne sera pas réalisable.

Quels intérêts ont les créanciers a choisir soit l'hypothèse A, soit l'hypothèse B ?
Statistiquement, la plupart des plans échouent. Donc, soit le créancier prend vite l'argent mais peu et pour le surplus il fait une perte, soit il veut être payé en totalité mais il prend le risque d'insolvabilité à long terme de son débiteur. Pendant ce temps, l'entreprise va provisionner ces créances. Comme l'entreprise est en sauvegarde, l'entreprise va être prudente et elle va provisionner l'intégralité de sa créance. Pendant la période d'observation, elle reçoit le courrier avec l'option. Pour des raisons comptables, les créanciers choisissent souvent l'option A parce qu'ils ont déjà provisionnés en entier la créance. Donc comptablement, cela va correspondre à une plus-value à 50% de l'entreprise puisqu'elle va pouvoir récupérer une partie qu'elle avait mis en perte dans son bilan. L'entreprise préférera généralement faire une plus-value tout de suite que d'attendre 10 ans.
Ex : Eurotunnel était une entreprise dont les recettes étaient supérieures à ses charges. On doit déduire du résultat d'exploitation ce qu'on doit aux banques et c'est ce chiffres qui était démesuré entraînant des dettes colossales. L'entreprise n'avait même plus de quoi payer les intérêts de ses dettes. Globalement, la proposition A qui a été faite aux banques a été d'abandonner la quasi-totalité de ses dettes (80 ou 90% des dettes) et ces dernières ont accepté cette proposition.

Est-ce qu'à un quelconque moment on distingue créancier par créancier ? Telle demande aux créanciers chirographaires, telle demande aux titulaires de sûretés ?
Non. Dans le cadre d'un plan de sauvegarde qui est un plan d'apurement du passif antérieur, il n'est pas distingué selon que le créancier est chirographaires ou privilégié.

A quoi sert alors d'avoir un privilège ou une sûreté ?
Cela joue quand les biens de l'entreprise sont vendus. Mais, dans le plan de sauvegarde, on ne parle pas de vente d'actif. L'entreprise continue ses activités et garde ses actifs. Le plan de sauvegarde ne distingue pas entre les créanciers chirographaires et les créanciers titulaires de sûretés sauf que les créanciers privilégiés conservent leurs privilèges. Ils sont payés dans le cadre du plan de sauvegarde mais le créancier hypothécaire ne sera pas forcément payé en priorité. Ses sûretés ne s'exerceront que si les biens sont vendus.

On ne peut pas exclure que le plan de sauvegarde prévoit de vendre tel ou tel bien du débiteur notamment parce que ce bien n'est pas utile ou pas nécessaire à son entreprise etc. Donc certains actifs peuvent bien être vendus. Dans ce cas, soit ces actifs ne sont grevés d'aucune sûreté et le débiteur qui va vendre ses actifs dans le cadre du plan de sauvegarde va en percevoir le prix, soit ces actifs vendus, s'ils sont grevés de sûretés, vont être vendus et, parce qu'il y a vente du bien, le créanciers hypothécaire va être payé en priorité par le fruit de la vente de cet actif.

Le plan de sauvegarde, qui est essentiellement un plan d'apurement du passif antérieur, comporte ou peut comporter d'autres éléments. Le plan de sauvegarde peut être l'occasion d'une augmentation de capital et il est également souvent l'occasion d'un plan social. Néanmoins, il s'agit d'une autre catégorie de plan social que celui vu précédemment relatif aux licenciements prévus pendant la période d'observation.

En effet, l'entreprise doit payer son passif pendant la durée du plan. Malheureusement, l'entreprise peut dire qu'elle ne pourra réduire les dettes que si elle se sépare d'une partie des salariés conduisant à l'homologation du plan de sauvegarde.


   Section 2. Les comités de créanciers


Il s'agit de la nouveauté la plus importante de la loi de 2005 confirmée par l'ordonnance de 2008. Cette nouveauté est directement inspirée du droit américain. Cette nouveauté trouve factuellement sa source dans l'affaire Alstom. Alstom allait très mal. Son dossier a été traité par le Ministre des finances, à l'époque M.Sarkozy. Il fallait demander des efforts aux banques mais il y avait des centaines de banques qui avaient prêté de l'argent à l'entreprise. Au premier rang, il y avait les grandes banques françaises. Ces dernières ont accepté de faire un effort mais elles voulaient que tous les efforts soient équitablement répartis sur toutes les banques qui avaient prêté à Alstom. Certaines banques américaines n'ont pas voulu faire ces efforts. Donc, pendant un moment, les dirigeants d'Altom ont attendu que toutes les banques donnent leur accord pour le plan de sauvegarde d'Alstom. Finalement, cet accord unanime a été atteint. Ainsi, dans certaines circonstances, il faut peut-être que certains créanciers imposent leur loi à d'autres. C'est ce qui a conduit, sur le modèle du droit américain, à la création des comités de créanciers.

Pour les entreprises qui ont plus de 150 salariés et 20 000 000€ de chiffre d'affaires, deux comités sont obligatoires :
- le Comité des banquiers,
- le Comité des fournisseurs.

Concernant le comité des banquiers :
Il est composé obligatoirement de tous les banquiers de l'entreprise. Il s'agit aussi tant du crédit-bailleur que des entreprises qui font du factoring càd tous les créanciers qui d'apparente plus ou moins directement à une banque.

Concernant le comité des fournisseurs :
Il fallait avoir une créance qui représentait au mois 5% du passif fournisseur qui vient d'être abaissé à 3%. Donc chaque fournisseur détenant ces 3% est membre du comité des fournisseurs.

L'entreprise voit donc, dans un délai de 30 jours après le jugement d'ouverture, la création de ces deux comités.

Néanmoins, si l'entreprise a émis des emprunts obligataire un troisième comité des obligataires va être créé mais nous n'en parleront pas ici.

Ces deux comités regroupent les principaux créanciers de l'entreprise. Ces comités vont recevoir des propositions de plan donc, au lieu que, comme dans le droit commun, chaque créancier soit consulté individuellement au travers de lettres recommandées individuelles, c'est devant les comités que le débiteur va faire ses propositions de plan qui peuvent être différentes des offres adressées aux créanciers qui ne sont membres d'aucun comité.

Ainsi, on aura deux types de créanciers : les créanciers membres d'un des deux comités et des créanciers hors comité qui sont consultés comme en droit commun (ex : URSAFF, impôt, fournisseur de - de 3%).

Le comité des banquiers peut recevoir une offre différente que le comité des fournisseurs.

Les comités vont délibérer à la majorité des 2/3. Donc cette majorité va pouvoir imposer sa loi à la minorité inférieure à 1/3. Donc, dans le cas d'Alstom, les banquiers français auraient pu imposer leur loi aux tout petits banquiers des États-Unis. Ainsi, un créancier qui désapprouve le plan va pouvoir se faire imposer un sacrifice auquel il n'a pas consenti. La logique des comités devient une logique majoritaire.

Une créance, cela circule. Beaucoup de banques, lorsqu'elles ont une créance, peuvent être enclines à la céder à d'autres banques ou à des gens qui ont pour métier d'acheter des créances. Souvent celui qui a emprunté ne le sait pas parce que la banque qui cède la créance ne le dit pas au débiteur et souvent elle continu à assurer la gestion à la créance. Pour le débiteur cela ne change rien sauf que le banquier n'est plus qu'un gestionnaire de la créance. Évidemment les créances cédées sont celles qui comportent un risque de non remboursement.

Dans l'affaire Eurotunnel, beaucoup de banques avaient cédées leurs créances à des fonds. Ce "marché de la créance" a suscité une question dans le dossier. En effet, toutes les banques sont membres de plein droit des comités mais qu'en est-il de ces fonds "vautours" ? Ces fonds sont-ils membres de plein droit ou non de ces comités ?
Le comité des banquiers réunit tous les établissements financiers quel que soit le montant de leur créance : les banques, les établissements de crédit, les établissements financiers (dont ceux qui se portent régulièrement caution).
A l’occasion du dossier Eurotunnel s'est posée la question de savoir si un créancier non banque lui-même mais ayant acquis une créance d’origine bancaire doit ou pas être membre du comité des banquiers. Si on s’intéresse à la nature de la créance, si elle était bancaire et si la nature de la créance l’emporte, ce créancier doit être membre du comité. C’est ce qu’a décidé la jurisprudence dans le dossier Eurotunnel.
Si on s’intéresse à la qualité même du créancier, le créancier qui n’est pas une banque, même s’il est titulaire d’une créance historiquement bancaire, ne peut pas être membre du comité des banquiers.
La jurisprudence Eurotunnel a donc privilégié la nature de la créance sur l’identité du créancier. Cette jurisprudence a été confirmée par l’ordonnance du 18 décembre 2008 applicable au 15 février 2009.
Tous les banquiers ou établissements financiers sont donc membres du comité des banquiers.

Les choses sont différentes pour le comité des fournisseurs. C’est en réalité le comité des principaux fournisseurs. Ainsi, un fournisseur qui avait une créance au moins égale à 5% du passif avant l’ordonnance de 2008 était membre de ce comité et depuis la proportion a été réduite à 3%. Néanmoins, les plus petits fournisseurs peuvent être invités à participer au comité des fournisseurs par l’administrateur. Ces derniers sont alors libres de refuser cette invitation.

Dès lors que les comités statuent à la majorité (ce qui signifie implicitement qu'une majorité va pouvoir imposer sa décision à une minorité), la question de savoir qui en fait partie est très importante. De quel côté va pencher la majorité ? La minorité peut-elle bloquer ?

Jusqu’à 2008, il y avait une majorité en nombre (plus de la moitié) et en montant des créances (2/3).
Depuis l’ordonnance de 2008, il n’y a plus que la majorité des créances présentes ou représentées lors du vote. Cette majorité reste fixée à 2/3.
Pourquoi a-t-on supprimé l’autre majorité ? Cette suppression s'explique parce que quand il y a peu de membres dans un comité (par exemple 2), la majorité par part virile est l’unanimité. De plus, quand les banques vendaient leur créance, les acheteurs de créance pouvaient acheter des morceaux de créance de manière à avoir plus de membres au comité même si ces membres appartenaient au même groupe.
Les 2/3 des créances bancaires ou d’origine bancaire peuvent imposer leur loi à des créanciers qui ne représentent qu’un tiers de ces créances (même chose pour les fournisseurs). Selon que les créanciers sont ou non favorables au plan, ils vont pouvoir voter en faveur du plan ou le bloquer.

Il y a un 3ème comité, qui est le regroupement des obligataires. Il s’agit de prêts faits au long cours à la société. L’ordonnance de 2008 dit que tous les obligataires, même s’il y a plusieurs obligataires, même si ces empreints obligataires relèvent de droits différents, sont tous réunis ensemble dans ce regroupement qui statue à la majorité des 2/3 des présents et représentés.

Restent en dehors des comités les autres créanciers càd les créanciers publics (Trésor, Sécurité sociale) et les petits fournisseurs qui n’ont pas été invités au comité des fournisseurs. Ces créanciers sont traités comme quand il n’y a pas de comité.

Les créanciers des comités vont faire l’objet de propositions différentes. Par exemple, il peut leur être demandé d’abandonner une partie de leur créance.
Ex : le projet de plan prévoit un abandon de créance de 90% pour les banques. Si les 2/3 acceptent, les autres devront accepter aussi.
Dans l’ordonnance de 2008, il y a une disposition relative à la conversion de créance en capital. Entre 2005 et 2008, on se demandait si les créanciers pouvaient convertir leur créance en capital. Ceci a été expressément autorisé par l’ordonnance de 2008.
Ex : une majorité de banque accepte de convertir sa créance en capital. On passe de la qualité de créancier à celle d’actionnaire ou associé. C’est donc une manière de rentrer au capital de la société et éventuellement de prendre le contrôle de la société.

C’est l’entreprise qui propose cette conversion de créance en capital. Ensuite, qui dit augmentation de capital dit réunion d’une assemblée générale extraordinaire. Si le débiteur propose à ses créanciers de convertir leur créance en capital, c’est sous la condition que les actionnaires valident cette proposition. Soit le dirigeant est l’actionnaire unique ou principal et alors il sait que l’assemblée générale extraordinaire validera cette proposition. Mais s’il n’est pas l’actionnaire majoritaire, tout dépend alors de la décision des actionnaires en assemblée générale extraordinaire.
Ce mécanisme n’est possible que dans les sociétés où la responsabilité des associés et actionnaires est limitée.

Les créanciers en général, et a fortiori les membres des comités, reçoivent des propositions. L’initiative des propositions est l’œuvre du chef d’entreprise. Si elles sont refusées, l’ordonnance de 2008 donne aux créanciers membres des comités le droit de faire d’autres propositions. Ils ont le droit de faire des propositions, mais celles-ci ne sont soumises au comité que si le débiteur est d’accord. Si les comités refusent les propositions du débiteur, la procédure va reprendre mais sans comité.

Ex : une entreprise a des difficultés. Le traitement de ces difficultés amène le chef d’entreprise à faire des propositions (demander des sacrifices aux créanciers). Si ces sacrifices sont acceptés, tout va bien. S’ils sont refusés, le chef d’entreprise peut les payer à 100% sur 10 ans. Mais encore faut-il que cette option soit possible financièrement.

Qu’il y ait ou pas des comités, le plan de sauvegarde est finalement soumis au tribunal dans un délai de 18 mois maximum. Ce plan a été en amont validé par les créanciers, comités, administrateur judiciaire. Le tribunal peut refuser le plan, mais c’est difficilement imaginable. Dans ce cas :

- Soit le tribunal approuve le plan et l’entreprise n’est plus alors en période d’observation mais elle
   s’inscrit dans le cadre d’un plan d’apurement du passif d’une durée maximum de 10 ans.
- Soit le plan présenté et approuvé par les créanciers, est rejeté par le tribunal (qui, par exemple, ne
   le juge pas crédible financièrement). Alors l’entreprise devient vouée au redressement ou à la
   liquidation judiciaire.

Que se passe-t-il quand le plan a été approuvé ? 3 possibilités :

* Le plan est exécuté scrupuleusement. C’est rarement le cas. A l’expiration de la durée du plan, le commissaire à l’exécution du plan (ancien administrateur ou mandataire judiciaire) fait un rapport au tribunal au terme duquel il constate que le plan a été exécuté et que l’entreprise est définitivement sortie de ses difficultés donc de la procédure de sauvegarde.

* Le plan suppose une modification. La loi parle d’une modification substantielle dans les moyens ou les objectifs du plan.
Ex 1 : dans le cadre du plan, l’entreprise est engagée à maintenir l’emploi. Elle ne peut pas tenir cet engagement : c’est une modification substantielle dans les objectifs et moyens du plan. Cette modification doit faire l’objet d’une autorisation du tribunal.

Ex 2 : C'est le cas d'une modification substantielle dans le paiement des créanciers du plan (dans l’apurement du passif antérieur). Dans ce cas, je vais donc consulter les créanciers. Au vu de cette nouvelle consultation, le tribunal se décide sur la modification du plan. Soit il accepte, soit il refuse et l’entreprise sera conduite à un redressement ou une liquidation.

* L’inexécution du plan. C’est essentiellement le défaut de paiement des créanciers. Les créanciers sont généralement payés annuellement. Parfois, les tribunaux demandent au débiteur de provisionner l’échéance annuelle dans les 12 mois qui précèdent (tous les mois, le débiteur verse le 12ème de l’échéance annuelle entre les mains du commissaire).
Si le plan n’est pas exécuté, le commissaire à l’exécution du plan va tenter d’obtenir ce paiement. A défaut, le tribunal va être saisi d’une demande en résolution du plan (faite soit par le commissaire à l’exécution du plan, soit par un créancier, soit par le ministère public…).

Le tribunal va prononcer la résolution du plan. Le premier effet va être que les créanciers vont retrouver l’intégralité de leurs prérogatives, de leurs droits. Tous les sacrifices auxquels ils ont consenti sont mis à néant (dans la limite des sommes déjà perçues).
Ex : le créancier qui avait consenti à un abandon de créance de 80% et a été payé des 20% restants, redevient créancier pour 80%.

Que devient l’entreprise ? La loi dit que si l’entreprise est en même temps en cessation de paiement, le tribunal doit ouvrir soit un redressement, soit une liquidation judiciaire.

Jusqu’à l’ordonnance de 2008, le tribunal n’avait pas le choix entre les 2. Désormais il peut choisir entre redressement ou liquidation.
























PARTIE 3. LE REDRESSEMENT JUDICIAIRE

D’un point de vue législatif, le droit commun des procédures collectives est constitué par la sauvegarde. Sauf exception, le droit de la sauvegarde s’applique au redressement.
Ce qui vaut pour le redressement vaut aussi en principe pour la liquidation.
Jusqu’à la loi de sauvegarde (2005), le redressement était l’objectif prioritaire du législateur. C’est toujours le cas, mais le redressement porte 2 noms (sauvegarde et redressement).
3 différences :
Cessation des paiements.
Le débiteur n’a pas le monopole de demander l’ouverture d’un redressement.
Les plans de cession (reprise par des tiers).

Chapitre 1. L’ouverture d’un redressement judiciaire

C’est cette ouverture qui est à l’origine de l’expression "déposer le bilan". L’initiative principale appartient au débiteur, mais il est en concurrence.

L’initiative principale appartient au débiteur, à l’entreprise personne physique ou morale. Elle doit demander l’ouverture d’une procédure de redressement dans les 45 jours suivant l’état de cessation de paiement (15 jours avant 2005).
C’est une obligation pour le chef d’entreprise de demander l’ouverture dans les 45 jours.

On peut penser que le chef d’entreprise sait quand l’entreprise est en cessation des paiements. Il y a alors 3 possibilités : la conciliation, le redressement ou la liquidation.

Les chefs d’entreprise hésitent à demander l’ouverture d’un redressement judiciaire car ils craignent des sanctions. Ils ne prennent donc pas toujours l’initiative, donc ils sont en concurrence avec un créancier, avec le parquet et avec le tribunal qui peut d’office ouvrir une procédure de redressement judiciaire.

En réalité, ceux qui font vraiment concurrence au débiteur sont les créanciers qui, lassés de ne pas être payés, vont jusqu’à demander l’ouverture d’une procédure collective, ou plutôt vont jusqu’à le menacer d’ouvrir une procédure collective.

Il y a plusieurs problématiques du côté du créancier :
- La loi interdit cette espèce de chantage.
- Le créancier est soumis aux mêmes conditions : la cessation de paiement.

Comment le créancier peut-il savoir qu'il est en état de cessation de paiement ? Que faire comme démarches préalables ?
En général, le créancier a une créance liquide, certaine et exigible. Il a tenté de la recouvrer. Il va devoir prouver que le créancier est bien en cessation de paiements.
Certains créanciers savent tout sur leur client : les banquiers, l’URSAFF (le plus souvent).

C’est donc soit le débiteur qui demande l’ouverture (sans contradicteur), soit un tiers (un créancier) qui va assigner le débiteur en redressement judiciaire. Cela devient alors une procédure contradictoire, avec un demandeur et un défendeur.

Quelle que soit la personne qui demande l’ouverture de cette procédure, tôt ou tard une audience se tient et à l’issue le tribunal décide ou non d’ouvrir une procédure de redressement judiciaire.

31.03.09

Chapitre 2. La procédure elle-même et les modalités de son ouverture


Les choses sont globalement identiques à la procédure de sauvegarde sauf que, dans la procédure de sauvegarde, l'administrateur a pour rôle de surveiller l'entreprise tandis qu'en redressement judiciaire il a soit une mission de surveillance, soit une mission d'assistance voire de représentation : le chef d'entreprise est dépossédé de ses pouvoirs au profit de l'administrateur.

Quand il n'y a plus de dirigeant de droit ou que ces derniers, quoi qu'étant toujours en place, peuvent avoir démérités, on les soupçonne de mauvaise gestion voire de pratiques frauduleuses et c'est alors la mission du mandataire qui va jouer.

La seconde différente porte sur la période d'observation. Elle a en principe la même durée qu'en sauvegarde (càd 6, 12 voire 18 mois) mais un premier point est fait à échéance de 2 mois parce que, par hypothèse, l'entreprise était en état de cessation de paiement. Certes, par l'effet du jugement d'ouverture, elle ne paie plus son passif antérieur donc en principe elle reconstitue sa trésorerie. Mais il n'en demeure pas moins que l'entreprise a plus de difficultés lorsqu'elle est en procédure pour savoir ce qu'il en est de la situation économique et financière de l'entreprise.

Les règles sont les mêmes pendant la période d'observation qu'il s'agisse d'une sauvegarde ou d'un redressement :
- continuation des contrats en cours,
- équilibre minimum en trésorerie pendant la période d'observation,
- règles relatives aux privilèges conférés aux créanciers postérieurs,
- règles relatives aux licenciements.

Chapitre 3. Les conséquences attachées à l'état de cessation de paiement

Cela signifie que, lorsque l'entreprise fait l'objet d'un redressement judiciaire, elle n'était pas à jour de ses dettes depuis, au maximum 45 jours. A cela s'ajoute le fait que beaucoup de chefs d'entreprise pratiquent la "fuite en avant" càd qu'ils ne veulent pas déposer le bilan parce qu'ils ont peur d'un échec. Il se peut donc que la date de cessation de paiement se situe non pas dans les 45 jours avant le jour d'ouverture mais bien en amont. Si c'est le cas, il existe ce qu'on appelle une "période suspecte". Cette période débute avec la date de cessation de paiement et elle se termine avec la date du jugement d'ouverture. Elle est donc antérieure au jugement d'ouverture. Elle est dite "suspecte" parce que cette période, qui n'aurait pas dû durer plus de 45 jours, va en faire plus voire bien plus.

Elle se traduit par le fait que le chef d'entreprise, qui ne pouvait pas payer ses dettes, a dû jongler avec ses créanciers, sa trésorerie, son actif pour, malgré l'état de cessation de paiement, poursuivre tant bien que mal son activité. Cette période est donc suspecte car elle conduit à s'interroger sur ce qui s'est passé sur cette période précédant le jugement d'ouverture. On voit bien que l'existence de cette période, son contenu, les enjeux qui y sont attachés sont reliés au fait que l'entreprise est en état de cessation de paiement.


   Section 1. Le rôle de l'AGS

En matière de sauvegarde, l'AGS (l'Assurance pour la Garantie des salaires) pré-finançait le coût des plans sociaux qui intervenaient soit pendant la période d'observation soit ceux qui étaient un élément du plan de sauvegarde. Ce plan de sauvegarde peut en effet avoir pour composante un nouveau plan social.

En matière de redressement judiciaire, les choses sont un peu différentes. Bien entendu, comme en sauvegarde, l'AGS va pré-financer ces plans sociaux. Ce qui est vrai pour la sauvegarde est a fortiori vrai pour le redressement. Mais en matière de redressement, l'AGS va intervenir encore plus en amont, dès l'ouverture de la procédure collective parce que l'entreprise est en état de cessation de paiement. Il y a donc une dette à payer en urgence qui sont les salaires dus aux salariés. Or, précisément, l'entreprise est en état de cessation de paiement. Comment va-t-elle pouvoir payer très vite les salaires dus aux salariés alors qu'elle est en état de cessation de paiement et que c'est cet état qui l'a conduite à être en procédure de redressement ?

C'est la raison pour laquelle l'AGS va prendre en charge ce qui est dû au salarié au jour du jugement d'ouverture.
Ex : l'entreprise dépose le bilan le 15 mars, passe en Chambre du conseil le 20 mars et le jugement est rendu le 21 mars. Le 21 mars l'entreprise est donc en redressement judiciaire. Les salariés attendent leur salaire le 31 mars mais, par hypothèse, leur employeur n'a pas d'argent.
Dans ce cas, on va séparer le mois de mars en deux parties. Les sommes dues aux salariés du 1er au 20 mars vont être payées par l'AGS. En revanche, les sommes dues à partir du 21 mars sont des créances postérieures donc l'entreprise doit être capable de les payer. Ainsi, au titre du mois de mars, il y aura une double source de paiement des salaires.

En redressement comme en sauvegarde l'entreprise doit en effet être capable de payer ses créanciers postérieurs. C'est la raison pour laquelle, si elle n'y arrive pas, on va faire un plan de sauvegarde pendant la période d'observation. En effet, l'AGS va prendre en charge les sommes dues aux salariés au jour du jugement d'ouverture. Il s'agit donc des 20 premiers jours du mois, mais il peut également s'agir de congés payés.

Tout est fait pour que l'AGS paye très vite. Cela peut prendre entre 8 et 15 jours. Pour les salariés c'est évidemment vital car on parle quand même des salaires. Ainsi, la date du dépôt de bilan n'est pas indifférente dans ce contexte. En effet, pourquoi avoir déposer le bilan de 15 ? Qu'est-ce que cela change de déposer le bilan le 15 plutôt que le 31 ?
Si on dépose le bilan le 31, le jugement est rendu le 4 avril. Dans ce cas, l'AGS va prendre en charge les salaires dus pour tout le mois de mars et pour les 3 premiers jours d'avril. Donc, quand un chef d'entreprise est soucieux de l'activité de son entreprise et de la situation de ses salariés, il a tout intérêt à déposer le bilan en fin de mois pour que l'AGS prenne en charge le maximum de jour de salaires impayés. Il y a donc une sorte de "calendrier du dépôt de bilan".


   Section 2. La période suspecte


Cette période se situe entre la date de cessation de paiement et la date du jugement d'ouverture.

Si le chef d'entreprise respectait la loi, quelle devrait être la durée maximum de cette période suspecte ? On a 45 jours pour déposer le bilan et le temps que la justice traite la demande, on est à peu près à 60 jours au maximum. Néanmoins, et souvent de façon involontaire, soit les chefs d'entreprises ne voient pas la situation de leur entreprise ou ils la voit mais il se peut que la date réelle de cessation de paiement soit bien antérieure au jour du dépôt de bilan. Au moment de la demande, le chef d'entreprise doit noter la date à laquelle il a été en cessation de paiement. Quand le jugement d'ouverture est rendu, le tribunal indique quelle est selon lui la date de cessation de paiement. A ce stade, la date est fixée de façon provisoire.

Cependant, les organes de la procédure sont habilités à demander au tribunal de remonter dans le temps, s'il y a lieu, la date de cessation de paiement. Cette remontée peut aller jusqu'à 18 mois avant le jugement d'ouverture voire 24 mois s'agissant de certains actes.

Comment les choses se passent-elles ?
Lorsque la procédure est ouverte, les organes de la procédure vont se demander si la date de cessation de paiement telle que fixée dans le jugement d'ouverture correspond bien à la date fixée par le chef d'entreprise. Parfois, certains signes indiquent que la date de cessation de paiement pourrait être antérieure.
Ex : les charges sociales dues à l'URSAFF. Si l'URSAFF n'a pas été payé, c'est peut-être un signe et si ce dernier inscrit son privilège sur le FDC de l'entreprise par une mention au greffe du tribunal, cette mention témoigne qu'à l'époque, l'entreprise était déjà en état de cessation de paiement. Si, dans le passé, l'entreprise a fait un chèque et que ce dernier a été rejeté faute de provision, c'est là encore peut-être un signe. De même, si un fournisseur a engagé une action contre son client, cela peut aussi montrer que l'entreprise était déjà en état de cessation de paiement.

Plus la date est remontée dans le temps, plus longue est la période suspecte. De plus, qui dit période suspecte dit analyse des actes accomplis par l'entreprise pendant cette période parce que, par définition, si l'entreprise était en état de cessation de paiement mais qu'elle a pourtant poursuivi son entreprise, cela veut peut-être dire qu'elle a jouer avec sa trésorerie, ...


    I. Les nullités de la période suspecte

Cette période est dite "suspecte" parce que l'entreprise est en état de cessation de paiement et que, néanmoins, elle a pu poursuivre son activité. Il y a peut-être des actes susceptibles d'être annulés. Attention ! On n'est pas obligé de voir des fraudes mais le législateur veut reconstituer cette période, savoir ce qui s'est déroulé pendant cette période.

Deux séries d'actes vont être particulièrement regardés :
1. Les actes juridiques accomplis par l'entreprise qui sont finalement défavorables à cette entreprise.
Ex : vente à prix bradé d'un actif de l'entreprise

2. Les paiements faits à certains créanciers au mépris d'une forme d'égalité entre les créanciers.
Ex : si un créancier connaît la situation de l'entreprise, il peut se rapprocher de l'entreprise afin d'être payé en avance d'une dette qui n'est pas encore échue afin d'échapper à la règle de l'interdiction des paiements des créances antérieures.

Le législateur distingue donc entre les nullités de droit et les nullité facultatives.


        A. Les nullités de droit

Ce sont des nullités qui frappent des actes ou des paiements intervenus pendant la période suspecte et qui sont objectivement défavorables au débiteur ou qui témoignent d'une rupture d'égalité entre les créanciers.

* Les actes à titre gratuit :        
Ils sont au premier rang des actes frappés de nullité de plein droit. En effet, on ne voit pas pourquoi et comment un chef d'entreprise ferrait un acte gratuit alors qu'il est en état de cessation de paiement.

* Le contrat commutatif déséquilibré :         
C'est typiquement la vente à vil prix.
Ex : j'ai besoin d'argent tout de suite, je vend mes actifs peu chers afin d'avoir un peu d'argent.

* Le paiement de dette non échues :    
Pourquoi un débiteur en état de cessation de paiement ou proche de cette situation paierait-il ses créances en avance ?

* Le paiement de dettes échues par un moyen anormal :   
En effet, dans le monde des affaires il y a des modes normaux de paiement (chèques, lettre de change, carte bancaire). Mais, dès que j'utilise d'autres modes de paiement (délégation, dation en paiement), je sors du droit commun et ce paiement est donc suspect. La loi donne une liste indicative de ce qu'est un mode normal de paiement mais il y a tout le reste.
Ex : la dation en paiement. Si un promoteur doit de l'argent à la banque et qu'il paye la banque en donnant un appartement, c'est une dation en paiement. Ce paiement selon ce mode anormal est lui aussi frappé de nullité de plein droit.
C'est la jurisprudence qui va tenir compte au cas par cas, et notamment compte tenu du secteur d'activité dans lequel l'entreprise opère, de ce qui est un mode normal ou anormal de paiement.

* La constitution de sûretés pour dettes antérieurement contractées :
Ici, on vise la constitution conventionnelle de sûretés mais également les sûretés judiciaires prisent unilatéralement par le créancier.
Ex : si une dette est née antérieurement et qu'elle est initialement de nature chirographaire. Le temps passe et le créancier commence à s'inquiéter de la solvabilité de son débiteur donc le créancier va vouloir bénéficier d'une sûreté en garantie d'une dette pourtant née antérieurement. Dans ce cas, soit le créancier se rapproche de son débiteur et obtient de lui qu'il accorde conventionnellement une sûretés (ex : une hypothèque conventionnelle), soit le créancier prend une sûreté judiciaire unilatérale qui ne suppose pas l'accord du débiteur (ex : une hypothèque judiciaire).

Ainsi c'est une dette qui, à son origine, n'était pas garantie ce qui montre que le créancier commence à se méfier de la solvabilité de son débiteur. De plus, le principe de l'égalité des créanciers interdit qu'un créancier ait, dans ces circonstances, une situation plus favorable que d'autres de ses créanciers. Bref, on fait comme si l'entreprise avait déposé le bilan à bonne date et donc on va annuler les actes qui n'auraient pas dû être fait si l'entreprise avait déposé le bilan à bonne date.

* Toutes mesures conservatoires :
Sauf si ces mesures sont devenues définitives avant la date de cessation de paiement.

Rappel : Le tribunal ne peut pas revenir à plus de 18 mois en amont de la procédure d'ouverture même si période suspecte est encore antérieure.


        B. Les nullités facultatives

Cette fois, le tribunal n'est pas obligé de prononcer la nullité.

Quels sont les actes frappés de nullité facultative ?
Il s'agit principalement des paiements de dettes échues et également des actes à titre onéreux effectués ou conclus pendant la période suspecte à la condition que ceux qui en ont bénéficier (càd celui qui reçoit le paiement) aient eu connaissance de l'état de cessation de paiement. Là, on retrouve une sorte de "soupçon de délit d'initié". En effet, il s'agit là d'un paiement qui intervient à bonne date, la dette est échue. Le paiement intervient par mode normal et non pas par un mode anormal. Mais celui qui bénéfice de ce paiement avait connaissance de l'état de cessation de paiement. Par conséquent, si le dépôt de bilan avait eu lieu à bonne date, ce paiement n'aurait pas pu avoir lieu. Là, on sanctionne le créancier qui avait connaissance de l'état de cessation de paiement de son client.

De plus, les actes à titre gratuit se situant entre le 24ème et le 18ème mois avant la date du jugement d'ouverture sont également susceptibles d'une nullité facultative. Cela signifie que, pour les actes à titre gratuit, mais seulement pour eux, la période suspecte peut avoir une durée non pas de 18 mois mais de 24 mois. Pendant les 6 premiers mois de la période suspecte, la nullité est facultative, pendant les 18 mois suivant, elle est obligatoire pour le tribunal parce qu'un acte à titre gratuit n'a rien à faire dans le monde des affaires et qu'un tel acte est, par définition, suspect. Attention, ici on parle bien d'une durée maximum de la période suspecte.
Qui peut demander la nullité de ces actes ?
Les organes de la procédure et en l'espèce essentiellement l'administrateur judiciaire ou le mandataire judiciaire. Le régime juridique de l'action en nullité n'est pas réellement précisé par la loi.


    II. Les conséquences de la nullité

Si une vente est faite par l'entreprise en période suspecte à un prix bradé.
Ex : je vends à vil prix un tracteur 100 alors qu'il valait 1000. Cette vente relève de la catégorie des contrats commutatifs déséquilibrés. La nullité est demandée, le tribunal la prononce.

Ainsi, la vente est annulée donc celui qui avait acheté rend le tracteur à l'administrateur judiciaire et, comme la nullité a un effet rétroactif, l'entreprise devrait normalement rendre le prix qu'elle a reçu. Mais l'entreprise n'a pas le droit de payer ses créanciers antérieurs. Ainsi, l'acheteur du tracteur rend le bien mais on ne lui rend pas le prix et, pour ce prix, il devra déclarer sa créance. C'est donc particulièrement lourd pour cet acheteur.

C'est la même chose concernant le paiement des dettes non encore échues. Le créancier doit rendre l'argent et il ne sera pas payé sauf en qualité de créancier antérieur.

Tout ce système explique pourquoi on dit que les nullités pendant la période suspecte ont pour but de reconstituer le patrimoine du débiteur. On appelle cela la "reconstitution du patrimoine du débiteur".

CCL : D'une part l'AGS intervient, et d'autre part, il a pu exister une période suspecte et dans ce cas, il y aura peut-être des nullités.

Remarque concernant la date de dépôt de bilan : pourquoi ne pas étirer au maximum la période de paiement de 45 jours afin que le plus de jours de salaires possibles soient prient en compte par l'AGS ? Parce que les salariés ne vont jamais attendre de ne pas être payé pendant 2 mois !


Chapitre 4. Les solutions au redressement judiciaire :
le plan de cession


Le redressement c'est très proche de la sauvegarde. Il y a néanmoins quelques différences dont le premier est que, dans le cadre d'une sauvegarde, le chef d'entreprise a le monopole du plan de sauvegarde. Dans le cadre d'un redressement judiciaire, de la même manière, l'entreprise va travailler avec les mêmes personnes pour élaborer un plan de redressement (autrement appelé "plan de continuation"). Mais c'est deux plans de sauvegarde et de redressement sont exactement la même chose sauf que la procédure de redressement judiciaire permet "d'ouvrir" le champ possible et permet à des tiers de faire des offres de reprise. Donc, là où le plan de sauvegarde est en situation de monopole, le plan de redressement est potentiellement en position de concurrence.

Certes, l'entreprise en redressement travaille son plan de redressement comme en sauvegarde mais à tout moment des repreneurs peuvent faire une offre.

Un plan de cession c'est un plan de reprise des actifs de l'entreprise (et non pas des actifs et des passifs !). Ainsi, un repreneur peut se présenter pour dire que l'entreprise est intéressante dans ses activités mais pas ses dettes.

- D'un côté, il y a aura donc un plan de redressement qui prévoit que l'activité de l'entreprise continue et paye ses dettes sur la durée, comme dans un plan de sauvegarde.
- D'un autre côté, on aura des plan de cession qui se proposent de reprendre l'activité de l'entreprise, son activité, ses actifs, mais pas ses dettes.

Qu'en est-il alors des créanciers ?
D'un côté : plan de redressement. En principe il y aura paiement du passif à condition que la trésorerie le permette dans la durée.
D'un autre : un entrepreneur qui se propose de redresser l'activité de l'entreprise. Dans ce cas les créanciers vont être payés au moyen du prix que paye le repreneur.

Ainsi quand on dit "j'ai repris une entreprise à la barre du tribunal", cela veut dire qu'on a repris son activité, son actif mais pas ses dettes.

06.04.09

[Rappel : quand une entreprise demande l'ouverture d'un plan de cession, c'est qu'elle compte présenter par la suite un plan de redressement. Ce plan est exactement la même chose que le plan de sauvegarde sauf que les dirigeants sont en concurrence avec des tiers qui peuvent proposer des plans de reprises.]

Un plan de cession c'est une vente de l'activité càd des biens de l'entreprise. Or, une vente, une cession, cela fait irrésistiblement penser à une liquidation qui n'est rien d'autre que la vente des biens de l'entreprise. Lorsque la loi de 2005 a été élaborée, les législateurs se sont trouvés face à la situation suivante : avant 2005, la sauvegarde n'existait pas, on avait donc le choix entre redressement et liquidation. Le redressement pouvait alors déboucher sur deux possibilités :
- un plan de redressement càd que l'entreprise présente elle-même un plan de continuation.
- un plan de cession présenté par les tiers.

Il y a donc deux techniques de redressement avec un redressement par continuation et un redressement par cession.

A côté de cela, il y avait la liquidation qui, par définition, exclut tout redressement et qui se traduit par une liquidation càd une vente des actifs de l'entreprise.

Le législateur de 2005 s'est alors dit qu'il était curieux que la cession, qui est une vente, trouve sa place à l'occasion d'un redressement alors que s'il y a bien une procédure naturellement vouée à la vente, c'est la liquidation. La législateur s'est alors dit que le redressement devait désormais être lié au plan de redressement, tandis que la liquidation est le lieu naturel de vente. Il y a donc deux techniques de vente :
- la cession,
- la vente en liquidation, la "braderie" des actifs du débiteur.

Mais le législateur s'est alors heurté aux pratiques des professions concernées. En effet, jusqu'en 2005, les organes de la procédure en charge du redressement s'occupaient des plans de cession. Les administrateurs judiciaires trouvaient donc leur fonction dans le plan de cession. On voit bien qu'en basculant les cessions dans la liquidation, le législateur privait les administrateurs de certaines fonctions pour les confier au liquidateur. C'est pourquoi, lorsque la loi de 2005 était en passe d'être votée au Parlement, le législateur a continué à décider que le redressement devait déboucher sur un plan de redressement tandis que la liquidation devenait le lieu de toutes les ventes. Ce principe a donc été maintenu sauf que le législateur précise que, dans le cadre d'un redressement judiciaire, des tiers peuvent présenter des offres de cession.
Ceci signifie que désormais le plan de cession peut s'opérer dans deux procédures :
- en principe, en liquidation judiciaire,
- de façon exceptionnelle, en redressement judiciaire.

C'est la raison pour laquelle on parle du plan de cession à l'occasion du redressement alors que la matière est réglementée à l'occasion de la liquidation.

Un plan de cession est un plan de cession de l'activité de l'entreprise, c'est une cession "de l'entreprise", de ses actifs. Si cette cession intervient en liquidation, peut-on encore dire qu'une entreprise en liquidation est toujours une entreprise ? Qu'elle a toujours une activité ? Le fait de la mettre en liquidation n'est-elle pas à l'origine d'une mauvaise image de l'entreprise ? Toutes ces questions poussent à penser que les plans de cession fonctionnent mieux en redressement parce que, par hypothèse, l'entreprise n'est pas en liquidation.

Depuis 2005, il est donc possible qu'il y ait des plans de cession en redressement même si le principe veut qu'ils soient plutôt en liquidation.


   Section 1. Les conditions du plan de cession

    I. L'auteur du plan de cession

L'entreprise elle-même, celle qui est en redressement judiciaire, est en train de travailler un plan de redressement sauf que des tiers peuvent proposer des offres de cession de l'entreprise. La première condition à un plan de cession, c'est que l'offre doit émaner d'un tiers.
Mais un tiers par rapport à qui ? L'entreprise qui est en redressement judiciaire est soit une personne physique et, dans ce cas, le tiers c'est quelqu'un qui n'est pas cette PP et, pour éviter toute fraude, c'est quelqu'un qui n'est ni parent, ni allié de cette PP jusqu'au 2ème degré.

Ex : le mari ne peut pas travailler au plan de cession de l'entreprise de sa femme.

Si l'entreprise est une PM, ne peuvent présenter de plan de cession, ni les dirigeants de droit ou de faits de cette PM, ni même que les parents ou alliés au 2ème degré de ces dirigeants.

Pourquoi cette interdiction ?
Ex : une entreprise est en redressement judiciaire et elle ne peut ou ne veut présenter un plan de redressement. Globalement, elle ne peut présenter un plan qui lui permette d'apurer ses dettes. Si le dirigeant est autorisé à faire un plan de cession, il va pouvoir racheter les actifs sans racheter les dettes. Dans cette hypothèse, ce n'est pas lui qui paye les dettes. Ceci signifie que ce serait immoral que le dirigeant de la PM dépose le bilan d'un côté (càd qu'il "plante ses créanciers") et que d'un autre côté il reprenne les actifs de l'entreprise.

Voilà pourquoi il y a des interdictions qui sont faites à telle ou telle personne de présenter un plan de cession car il serait immoral d'arriver à des situations comme celle-là. Ces interdictions, si elles sont enfreintes, peuvent voir les personnes poursuivies pour escroquerie.

Certains dirigeants, frappés par cette interdiction, ont imaginé de faire présenter un plan de cession par un tiers qui peut être une société dont ils sont actionnaires ou associés et dont ils rachèteraient petit à petit les actions. Désormais, une telle cession d'actions ou de parts sociales n'est pas possible dans les 5 premières années qui suivent le plan de cession du tribunal. Néanmoins, depuis 2005, ces interdictions peuvent être levées à la demande du procureur de la République et avec l'autorisation du tribunal. En effet, on a pu voir avec l'affaire Air Liberté que le dirigeant était réellement le mieux à même de présenter un plan de cession or, il n'a pas pu le faire parce qu'il était dirigeant. C'est justement suite à cette affaire que l'hypothèse de la dérogation à ce principe a été créé.


    II. L'objet du plan de cession

- Le FDC

La loi parle de "reprise de l'entreprise". Il faut faire une distinction entre le contenu et le contenant. L'entreprise ce n'est pas l'enveloppe juridique qui entoure l'activité mais c'est l'activité elle-même. L'entreprise, si c'est une PP, c'est l'activité exercée par cette PP.

Dans la plupart des cas, l'enveloppe juridique c'est une PM, une société. Donc, quand on dit qu'on fait une offre de cession de l'entreprise, cette offre ne se fait pas sur les actions et les parts sociales, mais sur l'actif de cette PM. C'est ce qui explique qu'un repreneur ne reprenne pas de dettes. Il ne reprend qu'une entreprise, càd le contenu, càd son activité, càd ses actifs. Il ne reprend pas de dettes. Donc, quand la loi parle d'une cession "de l'entreprise", elle parle d'une cession de l'activité et non pas de l'enveloppe juridique qui entoure cette activité. En droit, cela s'appelle le FDC. Ainsi, d'abord et avant tout, l'objet du plan de cession c'est le FDC de l'entreprise. C'est une notion assez propre au droit français, mais quand on dit qu'on reprend une activité, cela signifie qu'on reprend un FDC càd le support juridique de l'activité de l'entreprise.

Mais, pour faire fonctionner ce FDC, il faut des actifs (ex : une usine, des machines, des stocks, des brevets, des licences, des marques, le droit au bail...) On voit donc que le coeur de la reprise c'est le FDC mais que, pour le reprendre réellement, il faut également récupérer tous les actifs de l'entreprise. Tout ce que je vais me proposer de reprendre, ce sont des actifs. En aucun cas je ne reprend des dettes. Ainsi, l'auteur de l'offre de cession fait donc une offre d'achat de son activité et de son FDC.


    III. Le choix entre le plan de redressement et les différents plan de cession

A partir de là, la vente peut-être totale ou partielle.
Elle est totale quand l'auteur se propose de reprendre la totalité de l'activité de l'entreprise donc la totalité de ses actifs.
Elle est partielle quand l'entreprise a plusieurs activités et que seule l'une d'entre elles fait l'objet d'une offre d'achat. On peut, en effet, imaginer que l'entreprise aient plusieurs activités et qu'un tiers soit intéressé par telle ou telle activité tandis qu'un autre sera intéressé par une autre activité.

Cette offre de cession ne peut intervenir que de la part d'un tiers et elle n'a pour objet que l'activité de l'entreprise càd tous les actifs de l'entreprise.

Personne ne contraint l'auteur de l'offre à faire cette offre. L'auteur de l'offre "fait son marché". Il dit ce qui l'intéresse dans l'actif de l'entreprise. Dans son offre, il indique ce qu'il entend reprendre et personne ne peut le contraindre à aller au-delà de son périmètre de reprise.

"Reprendre une entreprise à la barre du tribunal" signifie présenter une offre de cession et voir cette offre retenue par le tribunal. Cette offre est en principe en concurrence avec un plan de redressement voire avec d'autres offres de cession.

Qu'est-ce qui va guider le tribunal dans le choix ?
En principe, le tribunal va être saisi d'un plan de redressement sauf si les dirigeants d'entreprise se sont révélés incapables de présenter un tel plan. Mais, si des tiers ont proposé des offres de cession, le tribunal est saisi de ces offres. Il devra donc choisir entre toutes ces offres concurrentes pour décider qu'elle va être la meilleure solution de redressement de l'entreprise.

Quels sont les objectifs qui vont guider le tribunal ?
Le maintien de l'exploitation et la poursuite de l'activité, le maintien de l'emploi et les possibilités d'apurement du passif.


        A. Le maintien de l'emploi

Au-delà des actifs, il y a des personnes qui sont nécessaires à l'exploitation du FDC de l'entreprise. Dans son offre de cession, le tiers repreneur potentiel précise combien d'emplois il entend reprendre en même temps qu'il compte reprendre l'entreprise. Il peut tous les reprendre mais il peut aussi considérer qu'il y a trop de salariés et dans ce cas il précise quels sont les postes (et non les salariés) qu'il veut reprendre. On rentre bien dans le détails de ce qui fait l'offre : un FDC, les éléments d'actifs qui permettent l'exploitation de ce FDC, puis tout ou partie des salariés attachés à ce FDC.

Il manque alors des contrats. En effet, il y a des contrats qui sont nécessaires à la poursuite de l'activité de l'entreprise qui avaient été conclu par l'entreprise elle-même avec des tiers et que le repreneur va se proposer de reprendre et de poursuivre parce qu'il en a besoin.

B. La reprise des contrats.

Pour qu'une entreprise fonctionne, elle doit conclure deux types de contrats :
- des contrats amont càd tous les contrats de fourniture de biens et de services dont elle a besoin pour fonctionner.
Ex : contrats d'approvisionnement, contrats de location, contrats de fourniture d'électricité.

- des contrats avals càd les contrats avec les clients. Ces contrats sont généralement d'une double nature : des contrats instantanés ou des contrats qui s'inscrivent dans la durée.

L'entreprise a besoin de ces deux types de contrats pour fonctionner mais tous ne pourront pas être repris.
Ex : j'ai conclu un contrat où je m'engage pendant 3 ans à acheter des baguettes et en échange la boulangère me fait un prix. Mais la boulangerie fait l'objet d'un redressement et subit un plan de cession. Donc, moi qui suis client j'ai toute liberté pour aller voir ailleurs.

Ainsi, dans les deux groupes de contrats dont a besoin une entreprise, les contrats avals et amonts sont indispensables mais les contrats clients, à supposer qu'ils existent, ne peuvent pas être cédés au repreneur. En effet, on ne peut pas obliger un client à rester client dans une entreprise.

En revanche, le repreneur peut demander de reprendre les contrats de fourniture de services. Il va en faire un élément de son offre et, ce qui est original, c'est que le cocontractant, le fournisseur, va certes pouvoir donner son avis mais il ne va pas pouvoir s'opposer à la transmission au repreneur du contrat auquel il est parti.

Ex : le contrat le plus concerné est le contrat de bail commercial. Le boulanger n'est pas propriétaire du local où il exerce son activité. Ce couple de boulanger dépose le bilan et est en redressement. Dans l'offre, le repreneur va reprendre les actifs, les salariés, ... Mais un FDC est très lié à la localisation. Comment être sur que je vais pouvoir continuer à l'exploiter à l'endroit où il était auparavant ? Pour s'assurer de cela, je vais mettre dans mon offre que je souhaite reprendre le contrat de bail commercial. Je vais donc devenir locataire à la place des anciens locataires. On va interroger le propriétaire. Ce dernier peut donner un avis défavorable mais il ne peut pas bloquer la cession du contrat. La cession du contrat de bail commercial va être imposé au cocontractant càd au bailleur de l'immeuble qui avait deux locataires et qui en a désormais un ou plusieurs autres. Il y a donc une cession forcée de contrat.

Ex 2 : le boulanger qui dépose le bilan avait un contrat avec un céréalier. Je demande la poursuite de ce contrat de fourniture de farine parce qu'en tant que repreneur j'en ai besoin.

Ex 3 : la plupart des compagnies aériennes ne sont pas propriétaires de leurs avions. Si une compagnie aérienne fait faillite, je reprend le FDC, je vais reprendre les actifs nécessaires et donc au premier rang il y a les avions. Si je ne pouvais pas reprendre les avions, je ne pourrais pas reprendre l'entreprise donc, dans l'offre de cession, je vais mentionner cette volonté de reprendre les avions.

A retenir :
Une offre porte sur l'entreprise càd :
- sur l'activité ou plus exactement sur le FDC de l'entreprise,
- sur les actifs nécessaires à l'exploitation de ce FDC,
- tout ou partie des salariés,
- tout ou partie des contrats amonts càd des contrats de fourniture.

A tous ces égards, c'est l'entrepreneur qui choisi. S'il ne veut pas reprendre tous les contrats, tous les salariés ou toutes les activités, on ne pourra pas l'y forcer.


        C. Le prix

On entend parfois que, "quand on reprend une entreprise à la barre du tribunal on peut faire de bonnes affaires". Le repreneur fixe lui-même son prix et le tribunal se détermine sur cette offre.

Cette offre, et notamment ce prix, sont jugés satisfaisant ou non par le tribunal. Ni le tribunal, ni le repreneur ne peut opposer quelque chose à l'autre. Le prix dépendra donc nécessairement de l'offre et de la demande. C'est le repreneur qui "fait son marché". Ce repreneur peut être en compétition avec d'autres repreneurs mais surtout avec un plan de redressement.

Le plan de continuation c'est le débiteur, l'entreprise, ses dirigeants qui proposent ce plan qui est essentiellement un plan d'apurement du passif. Donc l'enveloppe continue d'exister, l'activité se poursuit, et le débiteur va expliquer comment il va apurer son passif et continuer l'activité.

Le plan de cession se propose de payer un prix, de reprendre l'activité.
Comment les créanciers vont-ils alors être payés ? Par le prix de vente. Mais ce n'est pas le repreneur qui va payer les créanciers ! Il ne reprend pas les dettes. Ce sont les organes de la procédure collective, grâce notamment au prix payé par l'entrepreneur que les créanciers vont être payés. Dans ce cas, soit le prix est suffisant pour payer les dettes et tant mieux pour les créanciers, soit le prix est insuffisant pour payer les dettes et tant pis pour les créanciers.

La problématique du repreneur c'est de payer le moins possible.

A retenir : 3 critères de choix pour le tribunal :
- le maintien et la poursuite de l'activité,
- le maintien de l'emploi,
- l'apurement du passif.

Le plan de redressement permet tout l'apurement du passif. Toutes les dettes seront payées mais peut-être avec réduction et avec délais. Il est clair que du point de vue du troisième critère, le plan de relance est préférable mais il y a un grand aléa sur la durée. D'un autre côté, le plan de cession permet d'avoir la sécurité du prix donc il n'y a pas d'aléa.

Comment les choses se déroulent-elles ?
Pendant que le débiteur réfléchi à une offre de redressement, les tiers vont réfléchir à des plans de cession. Toutes ces personnes vont se retrouver au tribunal et au final ce dernier déterminera ce qu'il choisi selon ce qui est soumis à son choix.

A retenir : une offre de cession c'est d'abord et avant tout une vente.

27.04.09
    IV. Les exceptions à l'absence de reprise des dettes par le repreneur

Le plan de cession est un plan de reprise d'actifs sans reprise de dettes. C'est ce qui permet de redévelopper l'activité. Il y a néanmoins 2 exceptions à cela :


        A. La reprise des dettes liée à la reprise des salariés

Cela signifie que si l'offre de cession est acceptée par le tribunal, notamment dans son aspect social, le repreneur va devenir le nouvel employeur des salariés repris. C'est un changement d'employeur qui se fait sous couvert de l'article L.122-12 du Code du travail ancien. Cela signifie que les salariés changent d'employeur tout en gardant tous leurs droits, notamment au titre de l'ancienneté.

Ainsi, le nouvel employeur n'aura jamais à payer des sommes qui seraient dues aux salariés par l'ancien employeur pour deux raisons :
- les sommes qui seraient dues aux salariés par l'ancien employeur sont des dettes qui, à ce titre, ne sont pas reprises par le repreneur,
- toutes les sommes dues par l'ancien employeur sont en principe payées par les AGS donc, quand le repreneur "hérite" des salariés, plus rien ne leur est dû.

De quel passif le nouvel employeur hérite-t-il ?
Il hérite du passif ou plutôt des dettes antérieures dues à l'ancienneté de l'entreprise. Alors même que vis-à-vis de l'employeur, l'entreprise n'a pas d'ancienneté, les salariés conservent tout de même la leur, notamment en cas d'indemnité de licenciement. Ainsi, si le nouvel employeur licencie au bout d'un an un ancien employé, le nouvel employeur va payer une indemnité de licenciement qui tient compte de la totalité du temps de travail avec les employeurs successifs.

A ce titre, comme la reprise des salariés se fait sous couvert de l'ancien article L.122-12, il y a la charge d'un passif éventuel qui est reprise.

        B. La reprise des sûretés

Parmi les biens objets du plan de cession,  il peut y avoir des biens grevés de sûretés spéciales.
Ex : un immeuble grevé d'une hypothèque au profit d'un banquier.

Que devient l'hypothèque par l'effet du plan de cession ? En droit commun des sûretés, quand un bien est vendu grevé d'une hypothèque, celle-ci suit l'immeuble (c'est le droit de suite du créancier hypothécaire) qui conserve son droit malgré le changement de propriétaire. Ainsi, celui qui achète un immeuble hypothéqué court le risque que le créancier hypothécaire, qui n'est pourtant pas son créancier mais celui du vendeur, fasse vendre son immeuble pour se faire payer de ce qui lui est dû.

En pratique, les choses ne se passent jamais ainsi. En effet, quand un immeuble est hypothéqué, le créancier hypothécaire va être payé avec le prix de vente de l'immeuble. Ce dernier donnera alors main-levée de l'immeuble. Ainsi, l'immeuble va être vendu sans être grevé d'hypothèque grâce à une procédure amiable.

Dans le cas d'une procédure collective, ce prix va être distribué en fonction des sûretés. Le créancier hypothécaire de la société qui a fait faillite va percevoir tout ou partie du prix. La plupart du temps, ce créancier n'est pas intégralement payé de ce qui lui est dû. Le prix sera quasiment toujours insuffisant pour le désintéresser.

Cependant ici, la procédure amiable dont on vient de parler ne peut pas s'appliquer puisque le créancier hypothécaire n'est pas intégralement payé de ce qui lui est dû.

Est-ce que le repreneur, dans le cadre d'un plan de cession, reprend un immeuble hypothéqué ou non sachant que le créancier hypothécaire ne donne pas de main-levée ?
On peut tout de suite imaginer que si l'immeuble était vendu hypothéqué, il n'y aurait plus de repreneur.

Que prévoit alors le Code de commerce ?
Il prévoit que, dans le cadre d'un plan de cession, le paiement du prix par le repreneur emporte main-levée de l'hypothèque. Tant pis pour le créancier hypothécaire. Ce dernier se contentera de tout ou partie du plan de cession proposé par le repreneur.

Cette disposition qui est normale et nécessaire mais elle est contraire aux intérêts des créanciers professionnels que sont les banques. En effet, cette purge de l'hypothèque par le paiement du prix ne fait pas l'affaire des créanciers en général et des banques en particulier car l'intérêt du repreneur est de reprendre le moins cher possible, or les créanciers seront payés grâce au prix proposé dans le plan de cession.

C'est pourquoi, depuis 1994, il y a un mécanisme correctif. Ce mécanisme assure le maintien des sûretés (càd, en l'espèce, le maintien de l'hypothèque), donc la transmission de l'hypothèque au repreneur. Il y a donc plus de droits et de garanties pour les banquiers mais à certaines conditions :
- l'entreprise doit avoir acheté l'immeuble,
- au moyen d'un prêt,
- garanti par l'hypothèque sur l'immeuble.

On pourrait imaginé une hypothèse contraire. En effet, si l'entreprise est propriétaire d'un immeuble et qu'elle a besoin d'argent. Elle va solliciter un prêt auprès de son banquier. Celui-ci accepte de prêter de l'argent et demande en garantie l'immeuble qu'elle possède déjà. Dans cette seconde hypothèse, il y a bien un prêt, un immeuble et une hypothèque mais l'hypothèque n'a pas été posée sur l'immeuble qui a été acheté grâce au prêt donc les conditions ne sont pas remplies.

Si ces conditions sont remplies et que l'entreprise tombe en redressement judiciaire, les actifs vont faire l'objet d'un plan de cession et parmi ces actifs, il y a l'immeuble. Que devient l'hypothèque ? Le principe c'est que, quand le repreneur paye le prix des actifs qu'il rachète, le paiement emporte main-levée de l'hypothèque sauf dans l'hypothèse que l'on vient de décrire. En effet, dans ce cas, le paiement du prix n'emporte pas main-levée de l'hypothèque, cette dernière continue à grever l'immeuble. En réalité, ici le repreneur nouveau propriétaire de l'immeuble va être tenu de continuer à payer le banquier créancier. Il va être tenu de payer au banquier toutes les échéances du prêt restant à courir jusqu'à sa fin. Ce n'est que lorsque le repreneur aura exécuté l'intégralité de cette obligation qui pèse sur lui qu'il y aura alors main-levée de l'hypothèque. C'est donc bien la prise en charge d'une dette par le repreneur (en l'espèce, d'une dette bancaire).

C'est très important en pratique parce que, si on se place côté repreneur, ce dernier s'intéresse à l'entreprise qui est en redressement. Il propose un prix au tribunal en espérant payer le moins cher possible. Son offre est acceptée. Mais s'il a oublié de vérifier que les conditions de l'exception sont ou non remplies, outre le prix qu'il propose, il aura à payer à la banque le solde des échéances du prêt qui lui reste dues. Il aura donc deux paiements à faire : le paiement du prix à l'administrateur judiciaire et le paiement à la banque du reste des échéances du prêt.

La jurisprudence est venue dire que les échéances dans ce cas sont dues de plein droit càd que si le repreneur a oublié d'en faire référence, tant pis pour lui, il devra les payer à la banque en plus du prix qu'il aura payé à l'administrateur judiciaire. C'est pourquoi, quand on formule une offre de cession, il faut être très attentif à l'existence ou non de sûretés parce que s'il y a des sûretés et que les conditions de reprise sont remplies, il devra toujours en assumer la charge.

Néanmoins, encore faut-il que le prêt soit toujours en cours. Pourquoi est-ce que le prêt pourrait ne pas être en cours ?
Parce que la banque pourrait y avoir mis fin.
Ex : Prêt bancaire garanti par une hypothèque en cours pour une durée de 15 ans. Au bout de 5 ans, l'emprunteur commence à avoir des difficultés financières et arrête de payer sa banque pendant quelques mois. Finalement, le banquier écrit à son emprunteur pour prononcer la déchéance du terme càd que, au lieu de devoir de l'argent sur 10 ans, l'emprunteur doit tout, tout de suite. L'emprunteur qui n'arrivait déjà pas à payer les traites ne va évidemment pas réussir à les payer toutes. Suite à cela, l'emprunteur dépose le bilan. Dans son patrimoine, on trouve l'immeuble hypothécaire. Un repreneur propose de reprendre l'activité mais, comme le banquier a prononcé la déchéance du terme, il n'y a plus de traites à devoir à l'avenir. Ainsi, le contrat n'est plus en cours même s'il n'a pas été remboursé donc, dans ce cas, le repreneur n'aura pas à payer la banque puisque le contrat avait pris fin par le fait de la banque avant la reprise de l'immeuble par le repreneur.

Cette disposition qui est favorable aux banquiers doit toutefois les inviter à être prudent parce que si la déchéance est prononcée, ils ne pourront plus se prévaloir de ces exceptions. C'est la seconde mais la plus importante exception qui veut qu'un plan de reprise ne reprenne que des actifs.

-> Ainsi, une offre de vente a été faite au travers du plan de cession mais maintenant le transfert de propriété n'interviendra qu'avec la signature des actes de cession ce qui peut être compliqué parce qu'il peut y avoir un acte de cession d'immeuble, de FDC, de brevets, etc. Or, la rédaction de ces actes de cession peut prendre plusieurs semaines voire plusieurs mois. C'est pourquoi, la loi a prévu l'hypothèse de l'exploitation de l'activité par le repreneur sous forme d'une location-gérance ce qui signifie que, dans son offre, le repreneur peut proposer, dès qu'un jugement aura été rendu en sa faveur, de devenir locataire-gérant de l'activité reprise (càd de l'exploiter sans en être encore devenu propriétaire), dans l'attente de la conclusion et de la signature des actes de cession. Concrètement, le lendemain du jugement, le repreneur devient le "patron" de l'activité qu'il a reprise sans en être le propriétaire mais en étant locataire-gérant.

Les choses peuvent donc aller très vite sur le terrain de l'activité elle-même même si juridiquement les formalités peuvent prendre un certain temps. Tôt ou tard, les actes de cession vont être conclus et signés. Ce sont ces actes qui font du repreneur le propriétaire des actifs. La signature de ces actes s'accompagne généralement du paiement du prix de cession, du prix d'achat. Généralement, l'administrateur judiciaire et le tribunal ont demandé au repreneur de verser au plus tard au juge du jugement le prix pour vérifier qu'il dispose bien de l'argent nécessaire au paiement des actifs qu'il se propose de racheter. Le paiement sera effectué au jour du jugement qui décide de choisir telle ou telle offre.

C'est la raison pour laquelle un plan de cession fait très rarement l'objet d'une inexécution. Une cession, c'est une vente. La seule obligation qui pèse sur le repreneur c'est de payer ce prix. Or, on est sûr que le prix sera payé puisqu'il a déjà été remis entre les mains de l'administrateur judiciaire avant même que l'offre de reprise soit acceptée. Ainsi, autant un plan de sauvegarde peut faire l'objet d'une inexécution puisqu'il s'inscrit dans la durée, autant un plan de cession est très à l'abri d'une inexécution puisque le prix est payé d'avance.


   Section 3. La modification du plan de cession

Comme un plan de sauvegarde, le plan de cession peut faire l'objet d'une modification même si le prix ne peut faire l'objet d'aucune modification par le tribunal.

Quel(s) autre(s) éléments pourraient faire l'objet d'une modification ?

- Le plan social
Le repreneur aurait pu dire qu'il reprenait 30 employés sur 60 en s'engageant à ne pas les licencier pendant 3 ans. S'il n'arrive pas à maintenir cette condition, il pourrait aller voir le tribunal pour dire qu'il n'arrive pas à tenir sa promesse et qu'il doit en licencier certains.

- L'inaliénabilité des actifs
Le tribunal, quand il opte en faveur d'un plan de cession, a le droit de frapper d'inaliénabilité les actifs repris parce qu'il ne veut pas que le repreneur rachète les actifs au meilleur prix et qu'il les revende immédiatement en faisant une grande marge d'affaire. Néanmoins, il se pourrait que le repreneur ait besoin de céder, en dépit de l'inaliénabilité, tel ou tel actif repris parce qu'il n'en a plus besoin. Dans ce cas, il va demander au tribunal de lever l'inaliénabilité de tel ou tel bien.
Le plan de cession organise une vente moyennant un prix perçu par l'administrateur judiciaire. Il se peut que l'entreprise qui est en redressement judiciaire et dont les actifs sont vendus ait de la trésorerie, des disponibilités engrangées pendant la période d'observation. Il est clair que le repreneur, celui qui rachète les actifs, n'achète pas l'argent de l'entreprise. En définitive, l'administrateur judiciaire a en caisse la trésorerie de l'entreprise (notamment celle qui s'est accumulée pendant la période d'observation) et le prix de cession. C'est avec cet argent qui a deux sources différentes que les créanciers de l'entreprise en redressement vont être payés.
A partir de là, il y a un classement puisqu'il y a une poche de trésorerie qui ne sera probablement pas suffisante pour payer tous les créanciers. C'est alors qu'on va payer les créanciers en fonction de leur privilège, de leurs sûretés, de leur rang.

Dans cette situation, il n'y a jamais assez d'argent pour payer les créanciers. Ceci signifie que, d'un côté, dans le plan de sauvegarde, les créanciers seront payés à 100% même si c'est sur la longue durée. D'un autre côté, dans le plan de redressement, c'est la même chose sauf s'il y a abandon de créance. Dans le cas d'un redressement débouchant sur un plan de cession, il n'y aura pas assez d'argent pour payer tous les créanciers d'où l'intérêt pour les créanciers d'avoir des sûretés, des garanties, d'être en rang préférable plutôt que d'être chirographaire.

Lorsqu'on a parlé du plan de sauvegarde ou de continuation, on n'a jamais parlé de sûretés parce que les créanciers sont traités de la même manière puisque, par hypothèse, ils sont payés à 100%. Ceci signifie que, dans un plan de sauvegarde, les créanciers conservent leurs sûretés mais ils ne les exercent pas. Pendant toute la durée du plan (càd éventuellement pendant 10 ans), le créancier hypothécaire garde son hypothèque mais il ne l'utilise pas parce qu'il est en principe payé sur la durée pendant 10 ans.

Les choses sont radicalement différente en cas de plan de cession. Dans ce cas, l'administrateur judiciaire a une somme d'argent pour payer tous les créanciers de l'entreprise en redressement et cette somme est toujours insuffisante. Il faut donc faire un classement. Lorsqu'on a parlé du privilège de new money, ceux-là passent avant tous les autres ou presque. Lorsqu'on a parlé du privilège de l'article L.622-17, c'est un privilège qui va passer plus ou moins avant les autres. Puis il y a les créanciers privilégiers, ...
Il va donc falloir organiser tout cela pour pouvoir payer par priorité les créanciers de premiers rang jusqu'aux créanciers chirographaires en espérant qu'il restera quelque chose pour eux. S'il ne reste pas assez pour payer tous les créanciers chirographaires, ils seront payés au prorata càd au marc le franc.

En résumé : Une entreprise est mise en redressement judiciaire :
- s'il y a un plan de sauvegarde : tous les créanciers vont être intégralement payés mais sur une durée plus ou moins longue. Dans ce cas, puisqu'ils vont tous être payés, les sûretés ne jouent pas. Les créanciers qui en bénéficient les garde sans les exercer.
- s'il y a un plan de cession : l'administrateur dispose d'une certaine somme d'argent constituée par la trésorerie de l'entreprise et par le prix de cession. Généralement cette somme ne suffit pas à payer tout le monde. C'est alors que les sûretés et les privilèges vont jouer. La question qui se pose dans ce cas est de savoir comment classer les créanciers ?

Pour répondre à cette question, il faut faire une grande distinction entre les créanciers antérieurs et postérieurs.
* En principe : les créanciers postérieurs bénéficient d'un privilège (le privilège de la période d'observation) et celui-ci, par définition, va leur permettre d'être payés avant les créanciers antérieurs.

* Mais il y a deux exceptions :
- Certains créanciers antérieurs passent avant les créanciers postérieurs. En effet, parmi les créanciers antérieurs, il faut faire une distinction. Il y a des créanciers antérieurs qui ont un tel privilège qu'ils vont, en dépit de ce qu'on vient de dire, passer avant les créanciers postérieurs.
Ex : les salariés et leur super-privilège, les créanciers antérieurs qui ont le privilège de new money.

- Les créanciers antérieurs titulaires de sûretés réelles spéciales. C'est le cas du créancier hypothécaire.
Ex : une banque, avant le jugement d'ouverture d'un redressement judiciaire, prête de l'argent avec une hypothèque. Elle est créancier hypothécaire de premier rang. C'est donc un créancier antérieur titulaire d'une sûreté réelle immobilière spéciale.
Si le débiteur tombe en redressement judiciaire et que ce redressement débouche sur un plan de continuation, la banque va peut-être être payée sur 10 ans mais entièrement.
Si l'emprunteur tombe en redressement et fait l'objet d'un plan de cession càd d'un plan qui organise la vente des actifs du débiteur. Parmi ces actifs, il y a l'immeuble hypothéqué au profit de la banque. La banque dit qu'elle a une hypothèque, qu'elle est inscrit en premier rang donc elle appréhende tout le prix de vente de l'immeuble qui lui est dévolu par priorité jusqu'à ce que tout ce qui lui est dû soit remboursé. Soit l'immeuble est vendu très cher et la banque est totalement désintéressée, soit elle ne l'est pas totalement et pour le surplus, elle est chirographaire.

Le problème c'est qu'on est en procédure collective et que le créancier hypothécaire est un créancier antérieur. Ainsi, la banque va éventuellement être primée par certains créanciers postérieurs et éventuellement par d'autres créanciers antérieurs qui seraient mieux garantis ou mieux placés que la banque. Donc, parce que l'emprunteur est en procédure collective, l'hypothèque de premier rang ne va pas paraître si efficace que prévu.

Malgré son premier rang la banque, quoi que créancier hypothécaire de premier rang, va être primée par certains créanciers antérieurs ou postérieurs et elle ne prendra que ce qu'il reste. C'est toute la logique des procédures collectives.

Imaginons qu'on ait emprunté à la banque pour acheter un appartement. On n'arrive pas à payer l'appartement. La banque était hypothécaire. Elle va alors faire vendre l'appartement. Cette fois, comme on n'est pas en procédure collective, elle va être payée en priorité sur le prix. Les choses sont différentes quand l'emprunteur est en procédure collective.

Quand les actifs d'une entreprises en redressement judiciaire sont vendus au travers d'un plan de cession se pose la problématique du paiement des créanciers par rapport au prix de cession et au classement des créanciers antérieurs et postérieurs. Dans la quasi-totalité des cas, les créanciers ne sont pas tous payés ce qui signifie que la faillite de leur débiteur va leur être défavorable.
















































PARTIE 4. LA LIQUIDATION JUDICIAIRE


Statistiquement, d'une manière ou d'un autre, les procédures collectives se terminent majoritairement en une liquidation judiciaire.
Il y a plusieurs manières d'arriver à la liquidation judiciaire :
- le tribunal ouvre immédiatement et directement une liquidation judiciaire,
- le tribunal ouvre une autre procédure (sauvegarde ou redressement) et, en cours de période d'observation, il est établit qu'aucun plan de sauvegarde ou de cession n'est possible et il convertit la première procédure en liquidation,
- une entreprise a été mise en sauvegarde ou en redressement. Elle a fait homologuer par le tribunal un plan de sauvegarde mais malheureusement ce plan n'a pas pu être exécuté dans la durée. Dans ces conditions, cette entreprise, quoi qu'ayant fait l'objet d'un plan, va se retrouver en liquidation judiciaire.

Il y a une époque, ces voies d'accès à la liquidation judiciaire débouchaient sur un taux de liquidation de 95%. Ce taux a probablement été réduit par la loi de 2005 d'une part, et par la loi de 2008 d'autre part. Majoritairement, les procédures collectives aboutissent à une liquidation.

C'est donc l'échec du système qui fait pourtant tout pour éviter la liquidation. Ceci est dû à plusieurs facteurs :
- l'absence de réactivité des dirigeants d'entreprises qui s'y prennent trop tard pour réagir ne laissant que la possibilité d'une liquidation,
- l'économie française est de plus en plus une économie de service et de moins en moins une économie industrielle. Or les activités de service se prêtent beaucoup moins à une reprise (ex : dans un cabinet d'avocats, il n'y a que du savoir-faire, de l'incorporel.)

04.05.09

La liquidation judiciaire, comme son nom l'indique, tend à la liquidation càd à la vente de tous les biens de l'entreprise dont l'activité ne peut pas être poursuivie parce que l'entreprise n'a pas ou plus d'activité ou parce qu'elle n'a pas d'avenir. Dans ce cas, l'activité, si elle n'est pas déjà arrêtée, va s'interrompre définitivement et tous les biens de l'entreprise vont être liquidés pour payer les créanciers. Cela ressemble donc beaucoup à un redressement avec cession.

•Dans quelles circonstances une entreprise est-elle mise en liquidation judiciaire ?

* La liquidation judiciaire immédiate.
C'est le moyen le plus immédiat. Cette liquidation est celle qui n'a été précédée ni par une sauvegarde, ni par un redressement.
Elle est ouverte par le tribunal à la demande soit :
- du débiteur qui dépose le bilan mais qui, en déposant le bilan, demande une liquidation,
- d'un créancier,
- du parquet,
- d'office par le tribunal.
* La liquidation judiciaire par conversion
Ici, il s'agit d'une conversion soit d'une procédure de sauvegarde, soit d'une procédure de redressement. Cela signifie qu'une entreprise est d'abord mise en sauvegarde ou en redressement, qu'elle rentre donc en période d'observation et que, pendant cette période d'observation ou à son issue, le tribunal converti la procédure initiale en liquidation.
Pourquoi ? Pour deux raisons :
- Aucun plan de sauvegarde ou de redressement n'a été proposé ou homologué,
- L'entreprise a de telles difficultés financières qu'elle n'a pas d'autre issue que la liquidation.
Qui peut demander cette conversion ?
- Le débiteur lui-même,
- Les organes de la procédure (administrateur et mandataire),
- Le tribunal d'office.

Dans cette seconde situation, le débiteur ne passe pas immédiatement du statut d'entreprise in bonis à entreprise en liquidation.
* La liquidation judiciaire par résolution
On parle ici de la résolution soit d'un plan de sauvegarde, soit d'un plan de continuation. Les choses sont ici plus complexes. L'entreprise a d'abord fait l'objet d'une sauvegarde ou d'un redressement. Ensuite, l'entreprise a bénéficié d'un plan de sauvegarde ou de redressement et, pendant le cours de ce plan, l'entreprise est défaillante, elle n'arrive pas à exécuter son plan. Le plan est résolu et cette résolution débouche presque inéluctablement sur une liquidation judiciaire.

C'est l'addition de ces 3 moyens qui permettait de dire avant la loi de 2005 qu'entre 80 et 90% des procédures collectives aboutissaient à une liquidation judiciaire. Dans les trois cas, l'entreprise se retrouve en liquidation judiciaire ce qui signifie qu'elle n'aura bientôt pas ou plus d'activité et que tôt ou tard tous ses actifs seront vendus pour désintéresser les créanciers.

•Quels sont les organes de la procédure de liquidation ?
Ils se ramènent à une seule personne qui est le liquidateur judiciaire dont les fonctions sont exercées par celui qu'on appelle le mandataire judiciaire.

* En matière de liquidation, il a un double rôle :
- en tant que liquidateur du bien, il est chargé en priorité de vendre les actifs de l'entreprise et d'en répartir le prix entre les créanciers.
- en tant que représentant des créanciers, c'est lui qui reçoit les déclarations de créances des créanciers puisque ces derniers doivent déclarer leurs créances.

* De même, on trouve dans la procédure :
- Le tribunal lui-même qui joue un rôle puisqu'il va continuer à ouvrir et à clôturer la procédure.
- Un juge-commissaire,
- Il peut également y avoir des contrôles.
Si la liquidation est ouverte avec, pour une courte durée, la poursuite de l'activité, celle-ci peut se faire sous l'égide d'un administrateur judiciaire.
Toutefois, l'organe dominant est le liquidateur.
* Mais que vont devenir des représentants légaux de l'entreprise débitrice ?
Cette question s'explique parce que le liquidateur judiciaire prend les commande de l'entreprise parce qu'il n'y a plus qu'un seul objectif qui est celui de vendre les biens de l'entreprise. Jusqu'à la loi de 2005, dès sa désignation, le liquidateur judiciaire prenait la place des dirigeants de la société.
Ex : si l'entreprise débitrice était une SARL dotée d'un gérant, ce dernier était privé de ses fonctions par la nomination du liquidateur judiciaire.

Cela conduisait à des conséquences complexes :
Ainsi, une entreprise est mise en liquidation judiciaire contre le gré de ses dirigeants.
Ex : si le parquet a demandé l'ouverture d'une telle procédure.
En dépit de l'opposition des dirigeants, la liquidation judiciaire est prononcée. Jusqu'en 2006, les dirigeants étaient totalement dessaisis de leurs pouvoirs. Néanmoins, dans le même temps, l'entreprise avait le droit de faire appel du jugement de liquidation judiciaire.

Mais qui est l'organe qui engage une action en justice ? Ce sont ses dirigeants sauf que ces derniers s'étaient vu dépourvu de tout droit par le fait de la nomination du liquidateur. Puisque le nouveau dirigeant c'est le liquidateur, c'est ce dernier qui avait le droit de faire appel. Les liquidateurs ne faisaient jamais appel au nom de la société du jugement en liquidation.

Il fallait donc trouver une manière de concilier les textes et la pratique avait élaboré le schéma suivant : le liquidateur se faisait autoriser par le tribunal de faire appel de la décision qui avait ouvert contre leur gré la liquidation judiciaire. Les anciens dirigeants se faisaient nommer mandataire ad litem avec pour seul objectif de faire appel de la décision en question. C'était d'autant plus compliqué que le délai d'appel est de 10 jours. Cela signifie qu'à compter du jugement de liquidation, les dirigeants devaient se précipiter au tribunal pour, dans le délai de 10 jours, faire appel du jugement. S'ils n'étaient pas au courant ou mal conseillés, le droit d'appel était inexistant. Désormais, l'ordonnance de 2005 prévoit que les dirigeants d'une entreprise en liquidation restent en fonction mais ils n'ont quasiment plus de pouvoirs. Toutefois, ils conservent le pouvoir de faire appel du jugement de liquidation judiciaire. L'appel n'est pas suspensif. En effet, seul l'appel du parquet est suspensif.

La différence entre liquidation d'une PP et liquidation d'une PM

* Quand un PM est mise en liquidation judiciaire :
Ses biens vont être vendus pour payer autant que possible les créanciers même si tous ne vont pas être payés. Cela signifie que la liquidation judiciaire va "planter" une partie des créanciers. L'avantage des PM c'est que les associés ou actionnaires de la société ne sont pas concernés par cette liquidation. C'est pourquoi, la plupart du temps, on exerce une activité au sein d'une société comme cela les biens de la société sont perdus mais pas les siens.

Toutefois, le risque c'est que les créanciers ne soient pas tous payés intégralement par la liquidation des biens de la société. Il y a un risque qu'il n'y ait pas assez d'argent. Mais peut-être que les dirigeants de cette société n'ont pas été très compétents ou très honnêtes. Ils ont peut-être commis des fautes de gestion qui sont à l'origine des difficultés de la société. Dans certaines circonstances, à certaines conditions, les dirigeants de la société peuvent être recherchés en responsabilité.

* Quand une PP est mise en liquidation judiciaire :
Dans ce cas, sauf exception, tous ses biens sont englobés dans la liquidation judiciaire et pas seulement ses biens professionnels. En principe, tout va être vendu pour payer ses créanciers. Pour une PP, la liquidation judiciaire c'est la ruine. Mais, comme en matière de PM, il est quasiment certains que, même si tous les biens sont vendus, les créanciers ne seront pas tous intégralement désintéressés. Donc, non seulement la PP a tout perdu mais en plus, elle a le poids des dettes qu'elle n'a toujours pas réussi à payer.
Cela signifie-t-il que la PP traîne ses dettes résiduelles tout au long de sa vie ? Non. La liquidation judiciaire, notamment de la PP, va tôt ou tard être clôturée. Le jour où cette liquidation judiciaire est terminée on fige les choses et les créanciers qui n'ont pas été intégralement payés ne gardent pas de droit résiduels pour l'avenir. Le débiteur peut alors redémarrer une activité sans traîner le poids des dettes impayées.

Le droit commun des procédures collectives est constitué par le droit de la sauvegarde. Ce droit s'applique, sauf exception au redressement et le régime du redressement s'applique à la liquidation.

Depuis la loi de 2005, le "plan de cession" trouve naturellement sa place en liquidation parce qu'une cession est une vente et que le lieu privilégié pour la vente d'actifs, c'est la liquidation.



Chapitre 1. La réalisation des actifs


La liquidation se caractérise d'abord par la liquidation des actifs, càd leur vente. En principe, leur vente dans les meilleurs délais dès le jugement prononçant la liquidation judiciaire sauf que la liquidation peut s'accompagner d'une poursuite d'activité pour une durée maximum de 6 mois de sorte que la vente des actifs pourrait n'intervenir qu'à l'expiration de la période de la durée d'activité. D'ailleurs, la poursuite d'activité est principalement faite pour permettre un plan de cession. Un plan de cession c'est un plan de cession d'une activité et des actifs qui concourent à cette activité. Une liquidation peut donc s'accompagner d'une poursuite d'activité permettant la mise en place d'un plan de cession.


Il y a donc deux modes de réalisation des actifs :

    I. Le plan de cession

Dans ce cadre là, on cède une activité ou l'activité de l'entreprise càd, juridiquement parlant, son FDC et les actifs qui permettent cette exploitation.
Ex : brevets, marques, stocks, contrats, ...
On parle d'ailleurs d'une cession d'entreprise. Ce mode de réalisation des actifs que constitue le plan de cession est privilégié par le législateur parce que ce qui est cédé c'est une exploitation avec, notamment, les emplois qui vont avec. En effet, le plan de cession s'accompagne du transfert de tout ou partie des salariés attachés à l'activité.

Toutefois, ce mode de réalisation des actifs n'est pas toujours possible pour plusieurs raisons :
- Il se peut qu'il n'y ait plus d'activité,
- Il se peut qu'il n'y ait pas de repreneur.

C'est pourquoi il y a un autre mode de réalisation des actifs.


    II. La vente de tous les actifs du débiteur en liquidation judiciaire

Cela va du matériel de bureau jusqu'aux immeubles. Ce second mode de réalisation des actifs est une véritable liquidation judiciaire. Dans ce cas, on ne cède pas une activité mais les actifs isolés les uns après les autres. Dans cette seconde hypothèse, on ne maintien pas l'activité ni l'emploi. Cela signifie donc que tous les salariés seront licenciés par le liquidateur car, puisqu'il n'y a plus d'activité ni de repreneur, aucun salarié ne peut continuer son activité. C'est une véritable liquidation.

Dans ce second mode, le principe c'est que les actifs sont vendus aux enchères. C'est d'abord vrai pour les immeubles. Ces derniers appartenant à la société en liquidation judiciaire sont, en principe, mis aux enchères sous l'égide du tribunal. Les immeubles sont vendus dans les formes de la saisie immobilière. Cette vente aux enchères est théoriquement le moyen d'obtenir le meilleur prix. Toutefois, le juge-commissaire peut décider d'organiser plutôt une vente de gré à gré ou une vente aux enchères organisée d'avantage sous l'égide d'un notaire que d'un juge-commissaire, ...
Les biens meubles sont eux aussi vendus aux enchères publiques par l'intermédiaire d'un commissaire-priseur. De la même manière, le juge-commissaire peut autoriser dans ce cas une vente de gré à gré. De même, la pratique de la remise d'enveloppes cachetées au liquidateur s'est développée. La vente de gré à gré suppose que la vente ait trouvé un acheteur. La remise d'enveloppe est une technique entre la vente de gré à gré et la vente aux enchères. Elle permet éventuellement d'éviter des manoeuvres qui peuvent être réalisées lorsque les uns et les autres se voient surenchérir l'un sur l'autre lors d'une vente aux enchères publiques.

L'idée du législateur c'est que la vente des actifs ait lieu dans les meilleurs délais sans attente de la part du liquidateur. Sinon, en cas de carence du liquidateur, les créanciers titulaires de sûretés peuvent eux-mêmes enclencher la vente des biens sur lesquels ils ont des sûretés.
Ex : un créancier hypothécaire constatant l'inertie du liquidateur peut décider de mettre en vente l'immeuble sur lequel il a une hypothèque.

Chapitre 2. Le paiement du passif


   Section 1. La détermination et la configuration du passif


Dans ce cas, la liquidation peut avoir a été immédiate, c'est alors une procédure collective qui n'a été précédée par aucune autre. Cette procédure collective unique qui est la liquidation judiciaire donne lieu de la part des créanciers à la déclaration de leurs créances. En revanche, si la liquidation judiciaire n'a pas été immédiate mais qu'elle a été précédée par une autre procédure collective (sauvegarde ou redressement), les créanciers ont donc déjà déclaré leurs créances lors de la procédure précédente. Ils ne vont donc pas procéder à une autre déclaration sauf si, par exemple, la teneur de leurs droits à changer.
Ex : une société est placée en redressement judiciaire. Elle fait homologuer par le tribunal un plan de redressement pour une durée de 10 ans. Elle commence à exécuter son plan mais n'arrive rapidement plus à payer. Le plan de redressement a échoué et l'entreprise est en liquidation. Les créanciers ont alors commencé à être payé de leur créance les années où l'entreprise arrivait à exécuter son plan. Les créanciers vont donc continuer à être payé déduction faite de ce qu'ils ont déjà reçu.

Ex 2 : une société est mise en redressement judiciaire. Elle a des créanciers qui déclarent leurs créances. L'entreprise présente un plan de redressement au tribunal. Ce dernier accepte ce plan. La société redevient in bonis. Dans ce cadre, elle peut contracter de nouvelles dettes. Donc, si elle n'exécute pas son plan et retombe en liquidation, elle a pu avoir de nouveaux créanciers. Il y a les créanciers antérieurs et les créanciers postérieurs qui vont se manifester lors de la procédure de liquidation. La liquidation a pour seul objectif de payer autant que possible ces créanciers avec, éventuellement, le contenu de la trésorerie qu'il y avait dans l'entreprise au jour de la liquidation judiciaire mais surtout les créanciers vont être payés avec le prix de la réalisation des actifs.

Comme en matière de plan de cession va se poser la question de l'ordre de paiement des créanciers. En effet, d'un côté il y a de l'argent entre les mains du liquidateur et d'un autre côté il y a tous les créanciers. Or, dans la quasi totalité des cas il n'y a pas assez d'argent pour tous les payer ce qui explique l'idée de l'ordre des créanciers.

Il faut alors distinguer entre les créanciers antérieurs et postérieurs sauf qu'en matière de liquidation judiciaire il y a très peu de créanciers postérieurs. C'est pourquoi, il faut surtout distinguer entre les créanciers titulaires de sûretés et créanciers chirographaires. Ensuite, il faut continuer à les classer en distinguant par exemple les créanciers de new money, ...
Puis, on va commencer à payer les créanciers et ainsi de suite.

    Sections 2. Quelques spécificités

Ce n'est pas parce que je suis créancier hypothécaire de premier rang que je suis sûr d'être payé en premier.

En matière de liquidation judiciaire, il est permis au créancier gagiste de demander l'attribution judiciaire du gage. Cela présente pour lui un grand intérêt.
Ex : si le bien gagé est vendu par le liquidateur, le créancier gagiste va être payé au moyen du prix de vente du bien gagé sauf que, comme en matière hypothécaire, il va être primé parce que le créancier gagiste qui a pourtant un droit de préférence peut être primé par un autre créancier.

En revanche, si ce créancier gagiste demande à devenir lui-même propriétaire du bien gagé, il ne souffre d'aucune concurrence. Il ne souffre d'aucun concours puisqu'il est payé en nature par le prix du bien gagé.
- Si le bien gagé a une valeur inférieure au montant de sa créance : le créancier gagiste appréhende le bien gagé, en devient propriétaire mais reste créancier chirographaire pour le surplus.
- Si le bien gagé a une valeur supérieure à la créance, il doit une soulte au liquidateur qui représente la différence entre la valeur du bien et le montant de la créance.

Dans les deux cas, le créancier gagiste n'est primé par personne parce qu'étant payé en nature, il ne peut subir aucune concurrence.

Ce qui est vrai de l'attribution judiciaire du gage n'est pas vrai pour l'hypothèque. L'attribution judiciaire est, en l'état des textes, limitée aux biens meubles.

Chapitre 3. La clôture de la liquidation judiciaire

Tôt ou tard une liquidation judiciaire doit être clôturée. Elle le sera quand la totalité du produit de la réalisation des actifs aura servi à désintéresser autant que possible les créanciers. Si tous les créanciers sont payés, tout s'arrête également mais il n'y a jamais assez d'argent pour payer tout.

Il y a donc deux techniques de clôture :
• La clôture de la liquidation pour insuffisance d'actif. C'est la technique la plus courante.
• La technique de la clôture pour extinction du passif. Cela signifie que le produit de la réalisation des actifs a permis l'extinction de toutes les dettes. Ainsi, le passif est éteint et il peut même y avoir un boni de liquidation. A qui va cet argent ? Si le débiteur est une PP, cet argent lui appartient. Il n'est alors pas ruiné. Si le débiteur est une PM, le boni de liquidation appartient aux associés ou aux actionnaires.

* Dans l'hypothèse de la clôture de la liquidation pour insuffisance d'actifs :
- Tous les actifs ont été vendus,
- La totalité du prix de vente des actifs a été dédié aux paiements des créanciers mais tous n'ont pas été payés. Dans ce cas, la liquidation va être clôturée parce qu'il ne servirait à rien de continuer une liquidation qui a montré ses limites.

- Si le débiteur mis en liquidation judiciaire est une PP, il a donc bien perdu tous ses biens, y compris personnels. Ses créanciers ont été plus ou moins payés mais sa liquidation est clôturée et il n'est plus débiteur de ses créanciers pour les dettes non apurées. Les créanciers font une perte et ne sont pas totalement désintéressés. Le débiteur PP pourra alors redémarrer une activité sans avoir à payer des dettes résiduelles avec le produit de la nouvelle activité. La seule exception a cela serait dans le cas d'une fraude de la part du débiteur qui aurait, par exemple, dissimulé un de ses biens. Dans ce cas, les créanciers non intégralement payés retrouveraient un droit direct et personnel sur le débiteur.
- Si le débiteur est une PM, la clôture de la liquidation judiciaire fait disparaître juridiquement la personnalité morale.
















PARTIE 5. LES RESPONSABILITES ET LES SANCTIONS ENCOURUES DANS LE CADRE D'UNE PROCEDURE COLLECTIVE


 La question des responsabilités et des sanctions est un point crucial du droit des procédures collectives : le droit des procédures collectives est-il ou non un droit sanctionnateur ? Quels objectifs poursuit-il ?

On est passé depuis très longtemps d'un droit qui était sanctionnateur à un droit qui l'est de moins en moins parce que l'objectif du législateur est plutôt d'essayer de conserver l'activité, les emplois, ...

C'est une bonne chose parce que cela permet aux chefs d'entreprises de solliciter au plus vite une procédure collective sans craindre les sanctions d'une liquidation judiciaire or, s'il y avait auparavant énormément de procédures collectives c'est bien parce que ces chefs d'entreprises avaient peurs des sanctions. Toutefois, il est normal qu'à l'occasion d'une procédure collective, on s'interroge sur la cause des difficultés de l'entreprise et sur d'éventuelles fautes commises à cette occasion.

Par ailleurs, et indépendamment même de toute faute grave, la procédure collective peut être l'occasion de se poser la question de l'aptitude des chefs d'entreprises à diriger une telle société. Pour le bien de l'économie en général, il n'est pas sûr que le chef d'entreprise incompétent et dont l'incompétence a en partie conduit son entreprise en procédure collective ait le droit de redémarrer une nouvelle activité.

Évidemment, s'il y a eu des malversation, des infractions commises, il n'y a même pas de discussion.

• Il n'y a pas d'économie libérale sans crédit càd qu'il n'y a pas d'économie sans banque. S'est développé pendant plusieurs années un mouvement de mise en cause de la responsabilité des banquiers par la jurisprudence. On leur attribuait tous les maux de l'économie. Ceci aboutissait à une sorte de paradoxe qui est qu'on reprochait au banquier tout et son contraire càd soit d'avoir trop soutenu une entreprise (c'est le soutien abusif), soit d'avoir cesser de soutenir une entreprise (c'est la rupture abusive de crédit). Ainsi, ils craignaient constamment de voir leur responsabilité engagé.

Les banquiers ont alors obtenu du législateur qu'il intègre dans le Code de commerce l'article L.650-1 qui, à sa manière, proclame l'immunité de responsabilité des banquiers à l'occasion d'une procédure collective. Cet article dispose que "les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices découlant des concours consentis lorsque leur débiteur est soumis à une procédure collective".

Ce principe d'immunité est aussitôt tempéré par des exceptions. En effet, il est fait exception à ce principe en cas :
- de fraude du créancier,
- d'immixtion caractérisé de l'emprunteur,
- si les garanties prises par le banquier en contrepartie des concours sont disproportionnées par rapport aux crédits. Les banques ont donc gagné une première victoire qui n'est toutefois pas absolue. Mais attention car cette irresponsabilité s'applique uniquement pour les procédures collectives. Il n'y a pas encore beaucoup de jurisprudence sur cette hypothèse et notamment sur le caractère de "disproportion".

 Les différences entre les PP et les PM.

- Lorsqu'une PP est soumise à une procédure collective et notamment de liquidation judiciaire.
Dans ce cas, le débiteur PP a tout perdu. Ce débiteur peut être d'une frappé d'une sanction pénale alors que c'est pourtant avec ses biens et son argent qu'il a joué. On comprend que ce débiteur soit accessible à une responsabilité parce qu'il a fait des actes qui ne sont pas toujours autorisés mais il s'agissait tout de même de son argent. On pourrait alors envisager une sanction professionnelle parce qu'il est un mauvais commerçant, un mauvais chef d'entreprise. On peut ainsi comprendre que ce débiteur puisse être frappé de sanction professionnelle et de sanction pénale mais cela n'a pas de sens de parler de responsabilité civile car, de toute façon, il a perdu tout ce qu'il avait.

- Lorsque le débiteur PM soumis à une procédure collective.
Cette PM va elle aussi tout perdre et avec la vente de tout ses biens, le liquidateur va essayer de payer tous les créanciers. Cette PM, comme la PP, est ruinée. Mais, au-delà de la PM il y a ses dirigeants et ses actionnaires ou associés. Tout l'intérêt d'exercer une activité sous forme de société c'est que, effectivement, en cas de liquidation elle sera ruinée mais cette disparition laisse à l'écart ses dirigeants, actionnaires et associés.

Toutefois, en qualité de dirigeant de la société, ce dernier a peut-être été incompétent, il a peut-être commis des fautes civiles, pénales, ... Ainsi, s'il a commis un ABS, c'est autant d'argent qui ne seront pas versés aux créanciers. Dans certaines circonstances, les associés et actionnaires d'une part, et dirigeants d'autre part, vont peut-être avoir à rendre des comptes sur leur activité parce qu'on ne peut pas tout faire en société.

11.05.09
La responsabilité civile
La responsabilité professionnelle ou disciplinaire
La responsabilité pénale

























TITRE 1. LA RESPONSABILITE CIVILE


Par définition, elle ne concerne que les dirigeants d'une PM soumise à une procédure collective parce que, si c'est la PP qui est soumise elle-même à une telle procédure, et notamment en cas de liquidation judiciaire, tous ses biens ont été entraînés dans cette procédure de sorte que condamner cette PP et mettre en oeuvre sa responsabilité civile n'a aucun sens car tout son patrimoine répond déjà dans le cadre de la procédure collective. Peut-être que cette PP a commis des fautes mais elle en a déjà répondu en étant placée elle-même en liquidation judiciaire. Tout son patrimoine a d'ors et déjà répondu de ses dettes. Si cette PP a été mise en liquidation judiciaire, cette procédure a été clôturée généralement pour insuffisance d'actifs ou, beaucoup plus rarement, pour extinction du passif. Par la suite, cette PP retrouve la plénitude de ses droits et n'est pas justiciable d'une quelconque responsabilité civile.

Tel n'est pas le cas des dirigeants de PM soumises elles-mêmes à un procédure collective parce que, quand la PM est mise en liquidation judiciaire, elle perd tous ses biens, engage tout son patrimoine mais, en définitive, si la liquidation est clôturée pour insuffisance d'actifs, il y a une "cession de rattrapage" à l'encontre des dirigeants. En effet, ceci s'explique parce qu'une PM ne fonctionne que par l'intermédiaire de ses dirigeants et il se peut que ces derniers aient commis des fautes dont ils doivent alors répondre. La sanction de leur faute en terme de responsabilité civile est de payer tout ou partie des dettes de la PM dont la liquidation a été clôturée pour insuffisance d'actifs.

Cette responsabilité civile "répond" à l'autonomie de la PM qui a pour effet de mettre le patrimoine des dirigeants à l'abri. Toutefois, la limite de cette protection du patrimoine des dirigeants c'est leur faute. Il n'y a matière à responsabilité civile dans le cadre d'une procédure collective que si :
- c'est une PM qui a fait l'objet d'une telle procédure,
- cette PM a été immédiatement ou ultérieurement mise en liquidation judiciaire,
- cette liquidation a débouché sur une insuffisance d'actifs.

Si ces trois conditions sont réunies, il y a donc des créanciers qui ne sont pas payés. Dans ce cas, le moyen de les payer c'est de le faire par les dirigeants pourvu que ces derniers aient été fautifs.

Chapitre unique. La responsabilité civile pour insuffisance d'actifs

   Section 1. Les conditions de cette responsabilité civile pour                   insuffisance d'actifs

    I. L'obligation d'une liquidation judiciaire pour insuffisance d'actifs

Pourquoi n'y a-t-il que ce seul cas de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actifs ?

Cette situation s'explique au regard des caractéristiques des autres procédures :

- Dans le cadre d'une procédure de sauvegarde.
Le plan de sauvegarde est un plan d'apurement du passif. Si les créanciers acceptent de consentir des abandons de créances c'est parce qu'ils en ont décidé ainsi. Ils sont payés partiellement mais délibérément. S'ils n'ont pas accepté cette première solution, alors ils seront payés entièrement mais sur la durée. Ici, il n'y a pas de place pour l'insuffisance d'actifs. Toutefois, il y a le cas des créanciers minoritaire au sein des comités auxquels la majorité a pu imposer des abandons de créances mais, dans ce cas, c'est la loi de la majorité. Il n'y a donc pas lieu à responsabilité civile.

- Dans le cadre d'une procédure de redressement.
Si le redressement débouche sur un plan de redressement, c'est le même schéma que pour la sauvegarde puisqu'il y a soit abandon de créance, soit un paiement à 100% mais sur la durée.

- Dans le cadre d'une procédure de liquidation.
Lorsque cette procédure est clôturée pour extinction du passif, ce dernier a été éteint donc les créanciers ont été payés à 100%.

Dans ces trois hypothèses, on pourrait dire qu'il n'y a pas de préjudice puisque les créanciers sont intégralement payés à 100%. Si le plan de continuation échoue, l'entreprise se retrouvera dans le cadre d'une liquidation et c'est éventuellement dans ce cas que des sanctions pourront être appliquées. Ceci explique pourquoi la responsabilité civile est limitée à l'hypothèse de la liquidation judiciaire clôturée par insuffisance d'actifs.


    II. Les dirigeants

Ce sont les dirigeants de la personne morale mise en liquidation qui sont visés.

* Il peut s'agir de dirigeants PP ou PM.
Dans certains types de société (ex : la SAS), le dirigeant peut être une PM. Dans ce cas, si le dirigeant concerné est une PM, il est permis de remonter jusqu'aux PP qui dirigent une PM qui elle-même dirige une PM.

* Il peut s'agir des dirigeants de droit ou des dirigeants de faits.

- Pour les dirigeants de droit
La notion de dirigeant de droit se décline type de PM par type de PM.
En effet, dans une SARL ou une SNC, le(s) dirigeant(s) de droit sont le(s) gérant(s). En revanche, dans une SA, cela dépend de son mode de fonctionnement selon qu'elle a un directoire où, dans ce cas, ce seront les membres du directoire qui seront dirigeants de droit.

- Pour les dirigeants de fait
Il est normal qu'ils soient assimilés aux dirigeants de droit en matière de responsabilité civile personnelle. Ce qu'on va rechercher, c'est l'auteur même de la faute. De plus, les sociétés sont des lieux idéals pour qu'ils y ait des dirigeants légaux de droit alors que ce sont des dirigeants de faits qui décident de tout. Pour être dirigeants de fait, il faut faire des actes positifs de gestion comme si le dirigeant de fait était un véritable dirigeant de droit. La jurisprudence est surtout venue dire qui n'était pas dirigeant de fait.

Ex : un actionnaire majoritaire voire un actionnaire unique n'est pas nécessairement un dirigeant de droit s'il se cantonne dans son rôle d'actionnaire sans interférer dans le rôle du dirigeant de droit.

Ex 2 : cas de l'EURL ou de la SASU. Ce sont deux sociétés commerciales qui ont, pour la première, une seul associé et, pour la seconde, un seul actionnaire. Si cet associé ou cet actionnaire unique se cantonne dans ce rôle, il n'est pas dirigeant de droit. Il se contente d'approuver tous les ans les comptes annuels et il laisse un dirigeant de fait gérer l'activité.

L'hypothèse du banquier dirigeant de fait a posé des problèmes quand ce dernier prend presque des décisions de gestion pour son client.


    III. L'hypothèse d'une faute

En droit commun des sociétés, un dirigeant peut se rendre coupable de trois types de faute civile. comme le précise l'article L.221 et suivants). Il s'agit de :
- la violation de la loi,
- la violation des statuts,
- la faute de gestion.
La seule faute qui engage la responsabilité du dirigeant c'est la faute de gestion.
Qu'est-ce qu'une faute de gestion ?
C'est très factuel, conjoncturel, empirique. Mais surtout les juges, quand ils vont qualifier cette faute de gestion, doivent se replacer à l'époque où cette faute a été commise. Certes, l'entreprise est en liquidation judiciaire. Une faute de gestion va être imputée au dirigeant mais, lorsque la décision a été prise, pouvait-on dire à l'époque qu'il s'agissait d'une faute de gestion ? C'est tout le travail auquel doit se livrer la jurisprudence.

Comment cela se passe-t-il quotidiennement dans la vie de l'entreprise ? Quand des décisions importantes doivent être prises, le dirigeant est sensible à sa responsabilité. La manière de conjurer ce risque pour un dirigeant c'est de se faire conseiller.
Ex : rapprochement Renault / Nissan. Il s'agissait d'une décision très lourde pour Renault. Fallait-il le faire ? Dans cette affaire, ce n'est pas directement le dirigeant qui a pris cette décision mais ce sont probablement ses collaborateurs qui ont dû lui dire qu'il s'agissait d'une décision positive. Heureusement, dans ce cas, l'affaire n'a pas tourné mal mais, si finalement cela avait été le cas, que se serait-il passé ? En l'occurrence, il s'agissait d'une décision collective qui avait été approuvée par tout le monde donc, à l'époque, ce n'était pas une faute de gestion. Cela aurait pu mal tourner mais cela n'aurait pas été une faute de gestion.


        B. Cette faute doit être à l'origine de l'insuffisance d'actifs

C'est une condition supplémentaire. Il faut que le ou les demandeurs à l'action civile démontrent le lien de causalité entre la faute de gestion et l'insuffisance d'actifs.

De ce point de vue là, le droit a évolué dans un sens favorable au chef d'entreprise et c'est une bonne chose. Jusqu'en 1985, la loi posait une double présomption de faute et de causalité càd que, en cas d'insuffisance d'actifs, le dirigeant était présumé fautif et sa faute était présumée avoir contribué à l'insuffisance d'actifs. Il appartenait alors au dirigeant de détruire cette double présomption en démontant qu'il n'avait pas commis de faute.

Depuis 1985, cette double présomption a disparu. Cette solution a d'ailleurs été confirmée en 2005 puis en 2008. Maintenant, il appartient au demandeur à l'action de prouver la faute de gestion et de prouver que c'est cette faute qui a directement contribué à l'insuffisance d'actifs.

C'est une mission plutôt difficile mais c'est un choix de politique législative qui consiste à ne pas vouloir décourager les entrepreneurs en agitant le spectre de la responsabilité. Aujourd'hui, il n'y a plus cette double présomption.


    IV. La condition tenant à l'insuffisance d'actifs elle-même

On retrouve la trilogie de la responsabilité civile :
- une faute,
- un lien de causalité,
- un préjudice.

L'insuffisance d'actifs dans le cadre d'une liquidation judiciaire est l'une des hypothèses de clôture.

Quand sait-on avec certitude qu'il existe une insuffisance d'actifs ?
Quand la liquidation est clôturée pour insuffisance d'actifs. Toutefois, cette clôture intervient souvent assez tard, plusieurs mois voire plusieurs années après la liquidation. A l'inverse, l'action en responsabilité civile doit être engagée assez vite et elle l'est avant que la liquidation soit clôturée. Généralement, la responsabilité des dirigeants ne sera jugée que lorsque la liquidation aura été clôturée. Alors, on saura s'il y a eu ou non une extinction du passif ou une insuffisance d'actifs.

   Section 2. La procédure à suivre

C'est une action attitrée. Ceci signifie qu'elle ne peut pas être engagée par un ou plusieurs créanciers qui ferraient valoir à cette occasion leurs droits propres. Elle ne peut être engagée que par les organes de la procédure, essentiellement le liquidateur judiciaire ou le Ministère public.

Le liquidateur judiciaire, cela se comprend car on est dans le cadre d'une procédure de liquidation judiciaire où l'organe principal et unique est le liquidateur judiciaire. S'y ajoute le Ministère public parce que c'est une action d'intérêt général. La nouveauté de 2005, confirmée en 2008, c'est le droit d'action reconnu au contrôleur. Un contrôleur est un créancier nommé à sa demande par le juge commissaire qui a pour mission d'être tenu au courant de la procédure collective et de son évolution et de donner son avis à chacune des étapes de cette procédure sachant que l'avis des contrôleurs c'est l'avis des créanciers.

Depuis 2005, si le liquidateur judiciaire est passif càd si, malgré la demande des contrôleurs, il n'agit pas en responsabilité, ceux-ci, à la majorité et après une mise en demeure restée infructueuse pendant 2 mois, peuvent saisir le tribunal pour une action en responsabilité civile pour insuffisance d'actifs à l'encontre des dirigeants. Cette action se prescrit par 3 ans à compter du jugement qui prononce la liquidation judiciaire.

Cette action ne s'inscrit que dans le cadre d'une liquidation judiciaire donc, a contrario, ni dans le cadre d'une sauvegarde, ni dans le cadre d'un redressement. Cependant, il y a plusieurs manières d'arriver à une liquidation judiciaire. Soit la liquidation judiciaire est immédiate, soit elle est différée et c'est une liquidation judiciaire par conversion, soit c'est une liquidation judiciaire par résolution. Néanmoins, il faut que l'entreprise soit en liquidation judiciaire.

C'est à partir de la mise en liquidation qu'on va apprécier si les conditions de la responsabilité sont réunies et c'est à partir de ce moment que le délai de prescription va commencer à courir .
Ex : Une entreprise est en sauvegarde, elle met en place un plan de sauvegarde approuvé par le tribunal. Ce plan s'inscrit dans la durée. Au bout de 5 ans, la société n'arrive pas à tenir son plan. Il y a donc résolution du plan. Dans ce cas, la résolution d'un plan de sauvegarde peut entraîner non plus uniquement une liquidation mais un redressement. L'entreprise n'est donc toujours pas en liquidation.

Tout est logiquement fait pour éviter la liquidation. Cependant, pour cette procédure, il faut que l'entreprise soit bel et bien en liquidation judiciaire. Tant que n'apparaît pas une éventuelle insuffisance d'actifs, qui n'apparaît que dans le cadre d'une liquidation, on ne pourra pas envisager la responsabilité civile.

   Section 3. Le résultat de cette action

C'est une action en responsabilité civile qui va se traduire, s'il y a lieu à condamnation du ou des dirigeants, à des DI. Le montant de ces DI est limité au montant de l'insuffisance d'actifs puisque c'est une action en responsabilité pour insuffisance d'actifs de sorte que, si c'est la totalité de l'insuffisance d'actifs qui est mis à la charge des dirigeants, les créanciers seront intégralement payés. Ils ont été payés en partie par la procédure collective et, pour le reste, grâce à la condamnation des dirigeants.

Sauf que, la loi vient dire que le tribunal peut ne mettre à la charge des dirigeants qu'une partie de l'insuffisance d'actifs. Il pourra donc "doser" les DI en proportion de la faute commise ou au regard de la causalité entre la faute et l'insuffisance d'actifs sachant que, s'il y a plusieurs dirigeants, le tribunal peut les condamner solidairement.

L'argent est destiné au créancier sauf que la loi décide que l'argent passe par le patrimoine du débiteur (càd de l'entreprise qui est en liquidation judiciaire) et que, quand il a transité par le patrimoine du débiteur, il est ensuite réparti entre les créanciers non pas en fonction de leur sûreté, de leur privilège ou de leur rang mais au marc le franc càd au prorata de la créance de chacun. Par cette répartition, il faut entendre une réparation au prorata de la quote-part de chacun des créanciers dans l'insuffisance d'actifs sachant que le dirigeant condamné peut être lui-même créancier de l'entreprise. C'est même souvent le cas si le dirigeant est actionnaire ou associé et s'il a prêté de l'argent à son entreprise sous la forme d'avances en compte courant. Là, la réforme de 2008 est venue dire que le dirigeant qui est condamné, donc débiteur des DI, mais qui, en tant que créancier, pourrait bénéficier du produit de sa condamnation, ne profite pas de la condamnation qui le frappe. Ainsi, quand les organes de la procédure vont s'interroger sur l'existence d'une insuffisance d'actifs, ils vont neutraliser les créances du dirigeants contre la société.

Cette action a au final un cadre limité. Il faut qu'au départ une PM soit soumise à une procédure collective qui ne peut être qu'une liquidation qui doit alors faire apparaître une insuffisance d'actifs. Cette addition de conditions a un effet dissuasif qui est délibéré. Le législateur a souhaité que la responsabilité des dirigeants ne soit pas trop encouragée.

Y a-t-il beaucoup de condamnation ?
La réponse serait plutôt non mais évidemment, cela dépend des liquidateurs et des tribunaux de commerce selon qu'ils ont ou pas la main lourde.

La faute de gestion est le lieu idéal de l'expertise et surtout de l'expertise judiciaire. Cela signifie que très souvent une telle action démarre par une expertise. Là, il y a deux pratiques : une pratique loyale et une pratique déloyale.
- La pratique loyale : l'expertise est contradictoire càd que l'expert est nommé par le tribunal. Ses travaux sont contradictoire càd que les dirigeants susceptibles d'être concernés sont parties à l'expertise. Il y aura donc, d'un côté le liquidateur judiciaire, et de l'autre le ou les dirigeants. Ainsi, le ou les dirigeants peuvent faire des remarques.
- La pratique déloyale : un expert est désigné par le tribunal à la demande du liquidateur. Cependant, l'expert n'associe pas les dirigeants à ses travaux. Il va donc faire son expertise au vu des documents fournis par le liquidateur sans que les dirigeants n'aient pu s'expliquer dessus. Ce rapport est pourtant déterminant dans la procédure car s'il penche vers une faute de gestion, le jugement du tribunal penchera probablement vers cette solution là également.

La réforme de 2008 est venue dire que, dans cette hypothèse, les dirigeants ont le droit de prendre connaissance de l'expertise au moins un mois avant la date d'audience à laquelle ils seront jugés. Ce correctif n'est pas encore allé assez loin car cela devrait être forcément contradictoire.

TITRE 2. LA RESPONSABILITE PROFESSIONNELLE OU DISCIPLINAIRE


Il s'agit de tirer les conséquences, pour une personne donnée, de ses agissements généralement fautifs voire frauduleux et sur la capacité de cette personne à exercer à l'avenir une profession commerciale.

Ex : il s'agit d'un débiteur PP ou du dirigeant d'un débiteur PM dont il va être démontré que le comportement a conduit à l'ouverture d'une procédure collective. Pour l'avenir, il parait souhaitable que ce commerçant ou que ce dirigeant ne puisse plus exercer une telle fonction.

C'est pour cela qu'on parle de responsabilité professionnelle ou disciplinaire. Elle peut s'ajouter à la responsabilité civile voire à la responsabilité pénale, l'objectif étant tout autre puisqu'il s'agit d'éviter qu'un commerçant qui a failli ne puisse redevenir commerçant et à nouveau faillir.
Quelles sont les procédures collectives concernées ?

Le périmètre est plus large car il ne s'agit pas seulement de la liquidation mais également du redressement. En revanche, la sauvegarde n'est pas concernée car on reste dans l'idée qu'il faut inciter les chefs d'entreprise à solliciter sans crainte l'ouverture d'une sauvegarde.

Cette seconde forme de responsabilité débouche sur une faillite personnelle. C'est l'ultime cas où le droit français continu à parler de faillite personnelle quand le dirigeant ou le commerçant est défaillant.

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    Bonjour à tous, je suis la mère célibataire de Putri Adiratnaa de Jakarta, je voudrais partager ce grand témoignage sur la façon dont j'ai obtenu un prêt de M. Benjamin, lorsque nous avons été chassés de notre maison alors que je ne pouvais plus payer mes factures, après se faire arnaquer par diverses sociétés en ligne et refuser un prêt de ma banque et d'une autre caisse populaire que j'ai visitée. Mes enfants ont été pris en charge par la famille d'accueil, j'étais tout seul dans la rue. Le jour où j'ai honteusement rencontré un camarade de classe qui m'a présenté Daisy Maureen. Au début, je lui ai dit que je ne suis plus prête à prendre le risque de demander un prêt en ligne, mais elle m'a assuré que je recevrais mon prêt de leur part. Dans un second temps, en raison de mon itinérance, j'ai dû faire un essai et demandé le prêt, heureusement pour moi, j'ai reçu un prêt de $80,000.00 de M. Benjamin. Je suis heureux d'avoir pris le risque et demandé le prêt. Mes enfants m'ont été rendus et maintenant je possède une maison et une entreprise à moi. Tous les remerciements et gratitude vont au service de financement Le_Meridian et à l'aide de M. Benjamin pour m'avoir donné un sens à la vie alors que j'avais perdu tout espoir. Si vous recherchez actuellement une assistance de prêt, vous pouvez les contacter via: {lfdsloans@lemeridianfds.com} ou WhatsApp + 1-989-394-3740

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